La première étude sur les données réelles des organismes de bienfaisance trace un portrait concret de la philanthropie québécoise… et de ses défis.

Le nombre de dons d’entreprises aux organismes de bienfaisance a chuté de 32 % depuis cinq ans. Cependant, leur contribution totale est en hausse de 36,5 %, parce que celles qui ont persisté à donner ont doublé le montant de leur don.

Si la pandémie a peu ralenti les donateurs individuels, elle a grandement réduit la cohorte des entreprises donatrices, faisant chuter leur nombre de 31 % entre 2019 et 2020.

Voilà quelques-uns des résultats qui émergent de la toute première étude d’envergure menée à partir des véritables données des organismes philanthropiques québécois plutôt que des sondages.

Ce travail a été réalisé à l’instigation de quatre firmes de soutien au secteur philanthropique, BNP Performance philanthropique, Logilys-Prodon, Unicause et Absolu Communication.

« Comme une de nos entreprises partenaires offre un service de base de données, on s’est dit : pourquoi ne pas proposer aux organismes d’analyser leurs propres bases de données pour avoir vraiment des données réelles, et non pas un sondage sur la perception que les gens peuvent avoir de la philanthropie », explique Christian Bolduc, PDG de BNP Performance philanthropique.

Pour produire le rapport qui est présenté ce 9 juin, les auteurs ont analysé les dons effectués entre le 1er janvier 2017 et le 31 décembre 2021 auprès de 75 organismes de bienfaisance du Québec.

Ils ont compilé 1 893 544 transactions réalisées par des individus et 131 913 par des organisations et entreprises.

Voici quelques exemples marquants des résultats très fouillés de cette Étude sur l’évolution de la philanthropie québécoise – Portrait global.

Moins de dons et de donateurs chez les entreprises

Entre 2017 et 2021

Nombre de donateurs individuels : + 1,2 %

Nombre de dons individuels : - 2,7 %

Nombre d’entreprises donatrices : - 29,2 %

Nombre de dons d’entreprises : - 31,9 %

Depuis cinq ans, alors que l’effort des donateurs individuels s’est maintenu, le nombre d’entreprises donatrices et le nombre de dons d’entreprises ont connu une chute de l’ordre de 30 %.

« On veut éventuellement creuser plus loin les données qu’on a obtenues pour voir ce qui peut expliquer cette baisse », indique Christian Bolduc, inquiet des répercussions à long terme de cette désaffection.

Mais hausse de la contribution totale

Entre 2017 et 2021

Contribution totale des donateurs individuels : + 27,8 %

Don individuel moyen : + 31,2 %

Contribution totale des entreprises : + 36,5 %

Don d’entreprise moyen : + 100,3 %

L’explication de la hausse de 36 % de la contribution totale des entreprises : le montant moyen de leurs dons a explosé de 100,3 %, passant de 2690 $ en 2017 à 5389 $ en 2021.

Du côté des donateurs individuels, le don moyen, qui s’établissait à 48,40 $ en 2017, a atteint 63,50 $ en 2021, soit une hausse de 31,2 %.

Les effets de la pandémie

De 2019 à 2020

Nombre de donateurs individuels : - 2,6 %

Nombre de dons individuels : + 0,4 %

Don individuel moyen en 2020 : 52 $, - 1,5 %

Nombre d’entreprises donatrices : - 31,1 %

Nombre de dons d’entreprises : - 29,7 %

La pandémie a eu moins d’impact que prévu sur les dons individuels.

Entre 2019 et 2020, le nombre de donateurs individuels (- 2,6 %) et leur don moyen (- 1,5 %) ont très légèrement fléchi, mais le nombre de dons s’est maintenu, de sorte que leur contribution totale n’a diminué que de 1,1 %.

La philanthropie entrepreneuriale a été beaucoup plus touchée.

En 2020, le nombre de donateurs et le nombre de dons ont tous deux chuté d’environ 30 % par rapport à 2019.

Les auteurs observent toutefois « un plus grand engagement de la part des donateurs corporatifs avec un don moyen en croissance de 59,5 % ». C’est ce qui explique que la contribution totale des entreprises a crû de 12,2 % entre 2019 et 2020.

L’enjeu générationnel

Répartition des générations dans les dons individuels (2017 à 2021)

Aînés (nés en 1945 ou avant) : 26 %

Baby-boomers (nés entre 1946 et 1965) : 41 %

X (nés entre 1966 et 1980) : 17,1 %

Y (nés entre 1981 et 1995) : 13,6 %

Z (nés en 1996 ou après) : 2,2 %

« Étant donné qu’une grande proportion des donateurs se retrouvent chez les donateurs plus âgés, les organismes de bienfaisance devront travailler d’autant plus fort pour susciter la générosité chez les générations X, Y et Z, avise Christian Bolduc. Sinon, ça pourrait entraîner une baisse des contributions philanthropiques dans le futur, d’autant que les prochaines générations vont être probablement moins nombreuses sur le plan démographique que les boomers. »