Selon le Globe and Mail, Rogers s’est entendu pour vendre Freedom Mobile à Xplornet, plutôt qu’à Québecor, qui s’était montré intéressé, dans un effort visant à répondre aux exigences du fédéral dans le but d’obtenir l’approbation des autorités pour son projet de fusion avec Shaw. Quelle serait la suite pour l’entreprise québécoise ?

Quelles sont les implications pour Québecor ?

« C’est clair que Québecor n’est pas le partenaire préféré de Rogers, s’ils ont le choix », dit en entrevue l’analyste Jérôme Dubreuil, de Valeurs mobilières Desjardins. « On verra si le gouvernement est ouvert à la proposition de Rogers. Québecor n’était pas vraiment inclus dans les négociations. Si on présume que l’information du Globe and Mail est juste, alors Rogers trouve qu’une transaction avec Xplornet est plus favorable qu’une transaction avec Globalive [l’autre acquéreur pressenti pour Freedom Mobile]. »

Québecor peut-il toujours s’étendre à l’extérieur du Québec dans le sans-fil ?

Québecor a toujours la possibilité de percer le marché du sans-fil à l’aide d’un accès d’exploitant de réseau mobile virtuel. On ne connaît toutefois pas encore les règles et les tarifs de ce modèle d’opérateur virtuel, « mais c’est assurément une possibilité pour Québecor », dit Jérôme Dubreuil. À cet égard, Québecor s’était dit prêt l’an passé à négocier des tarifs avec les principaux fournisseurs [Rogers, Bell et Telus] en précisant que cette possibilité n’était toutefois envisageable que « sous les bonnes conditions ».

Est-ce une solution intéressante ?

Jérôme Dubreuil ne croit pas que ce serait un projet « extrêmement profitable ». « Les règles font en sorte que les gros joueurs auront leur mot à dire dans cette négociation-là. En même temps, ce n’est pas un projet qui requiert de grosses mises de fonds au départ étant donné que tu peux utiliser les réseaux des autres joueurs. C’est un faible investissement initial. Tu peux probablement démontrer que ça vaut la peine à tout le moins d’explorer le marché », dit-il.

PHOTO DAVID BOILY, ARCHIVES LA PRESSE

Québecor aimerait déployer son service de téléphonie mobile hors du Québec.

Québecor a-t-il d’autres options ?

Acheter Xplornet éventuellement est certainement une option. « Par contre, dit Jérôme Dubreuil, l’entreprise ontarienne Xplornet a été achetée en 2020 par la firme américaine d’investissement Stonepeak. La durée de détention typique d’un investissement d’une firme du genre est d’environ 5 à 10 ans. Québecor serait un acheteur potentiel des actifs advenant qu’ils soient disponibles dans quelques années », croit cet expert.

Québecor tient-il à avoir une présence dans le sans-fil hors Québec ?

Le grand patron de Québecor, Pierre Karl Péladeau, a dit que l’achat de blocs de spectre au pays (Ontario, Manitoba, Alberta, etc.) l’été dernier au coût de 830 millions était le « premier pas » vers l’expansion des activités de télécommunications à l’extérieur du Québec. Si la revente à profit de ces licences n’est pas à écarter, Pierre Karl Péladeau soutient que Québecor a l’expertise et les moyens pour réussir à déployer son service de téléphonie mobile au Canada anglais. Les coûts liés à une croissance hors Québec alimentent néanmoins les inquiétudes. Le succès de Québecor au Québec s’explique notamment par son offre de produits (sans-fil, câble, internet et téléphonie résidentielle). L’environnement concurrentiel à l’extérieur du Québec avec un seul produit – le sans-fil – pourrait s’avérer difficile.

Et Cogeco, dans tout ça ?

« Cogeco ne souhaitait pas acheter Freedom », lance Jérôme Dubreuil. « Cogeco pourrait devenir un partenaire avec des ententes d’itinérance à tarifs avantageux ou faire de la revente du réseau de Xplornet et offrir le service sans fil dans leur marché à eux, surtout en Ontario dans le coin d’Oakville, car au Québec, Freedom n’y est pas. Il n’y aurait pas d’entente à conclure. » Cogeco pourrait par ailleurs devenir un exploitant de réseaux mobiles virtuels. La direction dit toutefois attendre que les règles entourant ce modèle soient connues avant de prendre une décision.