La portion québécoise de 58 kilomètres de la ligne de transport d’électricité vers New York coûtera 1,14 milliard de dollars à Hydro-Québec.

Cet investissement est nécessaire pour le contrat d’exportation de 20 ans conclu avec l’État de New York, fait valoir la société d’État dans sa demande d’approbation du projet soumise à la Régie de l’énergie.

La future ligne de transport sera construite entre le poste d’Hydro-Québec à La Prairie et la frontière américaine, soit une longueur de 58 kilomètres. Elle sera complètement enfouie sous terre sur une portion de 56,1 kilomètres et sous la rivière Richelieu pour 1,6 kilomètre jusqu’à la frontière.

Le coût prévu de 1,14 milliard pour la construction d’un convertisseur et de la ligne de transport vers New York est deux fois supérieur à celui de la portion québécoise de l’autre projet d’interconnexion, aérien celui-là, qui doit relier le Québec au Massachusetts en passant par le Maine. Le coût de ce lien connu sous le nom d’Appalaches-Maine est de 600 millions pour une longueur de 100 kilomètres.

Le lien Hertel-New York sera donc plus de trois fois plus dispendieux et probablement le projet le plus coûteux par kilomètre construit au Québec.

Malgré l’importance de l’investissement requis pour exporter vers New York, Hydro-Québec affirme que le projet n’aura pas d’impact sur les tarifs d’électricité au Québec. Beaucoup d’information sur le calcul des coûts et la rentabilité du projet a été transmise confidentiellement à la Régie et n’est pas accessible.

Le contrat avec New York porte sur l’exportation de 9,45 térawattheures pour une période de 20 ans commençant en 2025. Hydro-Québec a estimé les impacts tarifaires du projet sur des périodes de 20 ans et de 40 ans et soutient que, « pour l’ensemble de ces périodes, le projet ne génère pas d’impact à la hausse sur le tarif de transport ».

Les Mohawks de Kahnawake doivent être copropriétaires de la future ligne de transport en sol québécois. Aucun détail sur le partage des coûts et bénéfices de ce partenariat n’a été soumis à la Régie. « Des négociations sont en cours pour qu’à la mise en service du projet, la ligne constitue un actif d’une entité détenue conjointement par Hydro-Québec et le Conseil des Mohawks de Kahnawà : ke », indique la société d’État dans sa demande d’approbation.

Hydro-Québec fait savoir qu’elle commencera ses travaux avant même que la Régie se prononce sur le projet.

Certaines activités d’ingénierie seront entreprises « dès à présent afin de respecter l’échéancier des travaux », précise-t-elle dans sa requête.

À la frontière américaine, la ligne de transport d’Hydro-Québec fera la jonction avec le lien construit par son partenaire américain Transmission Developers Inc. qui passera sous le lac Champlain. Ce projet, connu sous le nom de Champlain Hudson Power Express, consiste en un lien de 545 kilomètres entre la frontière et la ville de New York. Le coût de la portion américaine de l’interconnexion a doublé depuis qu’il a été annoncé et est maintenant estimé à 4,5 milliards US. Du côté américain, le projet a déjà obtenu tous les permis nécessaires et il est présentement en attente des dernières autorisations de l’État de New York avant d’être mis en chantier.

Hydro-Québec a présenté à la Régie des hypothèses sur l’évolution de l’inflation, qui risque d’avoir un impact sur le coût de son projet de 1,14 milliard, mais ces hypothèses sont confidentielles. Toute augmentation des coûts de plus de 15 % devra être avalisée par son conseil d’administration, indique la société d’État.

10 000 mégawatts de projets industriels en attente

La file des entreprises qui convoitent l’électricité québécoise continue de s’allonger, et des projets totalisant 10 000 mégawatts sont actuellement en attente, selon la présidente-directrice générale d’Hydro-Québec, Sophie Brochu. « Nous avons de grandes décisions à prendre », a dit Mme Brochu, qui était l’invitée du Conseil des relations internationales de Montréal lundi. Elle a répété que le coût des nouveaux approvisionnements en électricité est de 11 cents le kilowattheure et qu’il faut réfléchir à la tarification actuelle, qui favorise les riches. Même si les surplus sont chose du passé, le gouvernement québécois offre toujours des rabais pouvant atteindre 20 % sur le tarif des grandes entreprises qui investissent au Québec. GM et BASF, qui veulent investir à Bécancour dans les matériaux de batterie, pourraient bénéficier de ces tarifs réduits. Hydro-Québec a l’obligation de fournir de l’électricité pour toutes les demandes de branchement de 50 mégawatts et moins. Au-delà de cette limite, la décision appartient au gouvernement qui tient compte d’autres facteurs comme les retombées économiques attendues d’un projet. À 10 000 mégawatts, la demande d’électricité pour des projets industriels est supérieure à la consommation industrielle actuelle, qui est de 8500 mégawatts, a précisé Sophie Brochu.

Hélène Baril, La Presse