Pas une goutte. Zéro. C’est ce qu’ont reçu les agriculteurs de la Californie qui avaient demandé de l’eau au département des Ressources en eau, au début de l’hiver, pour poursuivre leurs activités.

L’eau se fait rare dans cet État qui fait pousser ce que mangent une bonne partie des États-Unis et du Canada. La ressource est gérée de façon serrée depuis longtemps : l’eau est attribuée aux besoins de base des habitants et allouée ensuite à d’autres usages, quand il y en a suffisamment.

Au début du mois de décembre, dans une partie de l’État qui compte 27 millions d’habitants, la décision est tombée : il n’y aura pas d’eau allouée pour l’agriculture, l’irrigation ou le jardinage. C’est la première fois que ça arrive à cette période de l’année. La prochaine étape risque d’être les restrictions à la consommation pour tous.

La sécheresse chronique est en train de transformer le paysage de la Californie. La culture des amandes, qui exige énormément d’eau, est de moins en moins possible. Il faudra peut-être un jour abandonner ce secteur qui génère des milliards de revenus.

Ailleurs dans le monde, la question se pose aussi. Il n’y a pas assez d’eau disponible pour combler tous les besoins. Plusieurs pays seront tôt ou tard obligés de choisir entre les différents usages pour l’eau dont ils disposent.

Dans une analyse publiée récemment, l’économiste de la Banque Nationale Angelo Katsoras souligne que le secteur industriel de la Chine accapare depuis longtemps les ressources en eau du pays, au détriment de l’agriculture. Les Chinois représentent 20 % de la population mondiale, mais ils ont accès à seulement 7 % de l’eau disponible. Une des conséquences est que le pays compte de plus en plus sur les importations pour nourrir sa population.

Les ressources en eau de la planète ont beau être limitées, les besoins sont en croissance.

La transition énergétique qui s’amorce est nécessaire, mais elle accroîtra considérablement la demande d’eau, notamment pour l’extraction minière, qui consomme beaucoup d’eau.

Les batteries des voitures électriques et les éoliennes nécessitent une quantité énorme de minéraux comme le lithium, le graphite et le cobalt. Le cuivre est aussi un ingrédient indispensable à la décarbonation des économies. Une turbine d’éolienne de 3 mégawatts peut contenir près de 5 tonnes de cuivre et un véhicule électrique contient entre 60 et 83 kg de cuivre de plus qu’un véhicule à essence, selon une estimation de Goldman Sachs citée dans l’analyse de la Banque Nationale.

Un prix trop bas

Peu importe l’angle utilisé pour envisager des solutions aux pénuries d’eau, ça risque de coûter cher. Il faut constater que la ressource n’est pas évaluée à sa juste valeur. Les pays qui en consomment le plus sont souvent ceux qui la paient le moins cher.

L’eau est toujours considérée comme un bien commun, indispensable à la vie. Ça devient aussi une marchandise. Depuis un an, l’eau se négocie à la Bourse de Chicago sous forme de contrat à terme.

Le marché de l’eau en Californie est suivi par un indice financier, le NASDAQ Veles California Water Index, qui reflète le prix des transactions d’eau réalisées dans la semaine précédente. Cet indice est en augmentation constante depuis sa création, en 2018.

C’est un marché qui peine à s’organiser, mais qui deviendra peut-être nécessaire à mesure que les pénuries s’aggraveront. L’eau a déjà un prix, qu’on aime ça ou pas, et ce prix est appelé à augmenter.