Fin de l’obligation pour les hôteliers d’être assujettis au système de classification des étoiles et des pouvoirs élargis pour serrer la vis aux chalets offerts sur des plateformes de location : Québec remanie le cadre de l’hébergement touristique, qu’il ne juge « plus adapté à la réalité d’aujourd’hui ».

Certaines des mesures du projet de loi sur l’hébergement touristique présenté mardi par la ministre du Tourisme Caroline Proulx ont reçu un accueil favorable. Mais chez les hôteliers, les changements entourant les panonceaux étoilés que l’on retrouve à l’entrée des établissements suscitent certaines interrogations.

La pièce législative, qui toucherait 13 500 établissements d’hébergements enregistrés, fait miroiter des économies annuelles de 3 millions en temps et en argent pour l’industrie. Elle propose de remplacer l’actuel système d’étoiles qui relève de la Corporation de l’industrie touristique du Québec (CITQ) – un organisme paragouvernemental – par une déclaration annuelle de l’offre d’hébergement et des services offerts, regroupés dans un seul document numérique. Cela se traduirait donc par un allègement réglementaire ainsi que des économies oscillant en moyenne entre 1700 $ et 1800 $ pour un établissement de 200 chambres, selon les estimations gouvernementales.

« Le choix du consommateur se fait différemment, a dit Mme Proulx, en conférence de presse, en soulignant que le Québec était le seul endroit en Amérique du Nord où un tel système existait. Ce que les clients recherchent, c’est le prix, les services. On va chercher les avis d’autres voyageurs. »

Selon elle, les panonceaux étoilés n’ont plus leur raison d’être. La ministre estime que ce n’est pas à un organisme paragouvernemental de jouer ce rôle. D’importantes ressources doivent être consacrées par les hôteliers aux évaluations de la CITQ, qui s’effectuent en fonction d’une grille d’environ 150 pages.

Ève Paré, présidente-directrice générale de l’Association des hôtels du Grand Montréal, croit également que le nouveau système devrait générer des économies. Mais le système des étoiles obligatoire comportait néanmoins certains avantages même s’il était mûr pour une modernisation.

« L’idée de perdre une étoile est souvent le levier pour convaincre une équipe de direction de bouger pour procéder à des investissements, a expliqué Mme Paré, au bout du fil. Dans les appels d’offres de certains clients commerciaux, il y avait également des critères (sur le nombre d’étoiles). C’était utile pour cela. »

Québec a ouvert la porte à offrir une reconnaissance à un organisme qui offrira un service d’évaluation sur la qualité de l’offre d’hébergement afin de stimuler l’adhésion des hôteliers. Reste à voir si ceux-ci voudront emboîter le pas.

Tour de vis

L’autre grande mesure permettrait notamment à la ministre de suspendre l’enregistrement de résidences secondaires et de chalets offerts en location sur des plateformes numériques comme Airbnb en cas d’infractions aux règles municipales, par exemple en ce qui a trait à la nuisance sonore. Ce pouvoir existe déjà pour les résidences principales.

Mme Proulx a expliqué qu’il y aura des discussions avec les municipalités pour établir la « liste de nuisances » qui pourraient mener à la possibilité de suspendre les enregistrements.

Alors que dans l’industrie hôtelière on se réjouit de voir Québec aller plus loin pour encadrer ce type d’hébergement, les municipalités ont salué le resserrement au moment où l’hébergement collaboratif est en vogue dans les endroits de villégiature.

« Quotidiennement, nous avons d’importants enjeux en matière de voisinage, a estimé le maire de Saint-Donat et président caucus des municipalités locales de l’Union des municipalités du Québec Joé Deslauriers. La ministre nous a entendus. »

Il est également proposé que tout projet d’hébergement soit validé auprès de la municipalité concernée en amont d’une demande d’enregistrement. Celles-ci devraient également avoir accès à un registre des exploitants pour être au courant des enregistrements octroyés sur leur territoire.

Le projet de loi vise également à permettre à la ministre du Tourisme de suspendre ou refuser un enregistrement si la personne qui en fait la demande a déjà été déclarée coupable d’une infraction à une loi ou un règlement entourant l’exploitation d’un établissement d’hébergement touristique.

« Le diable va être dans les détails avec les règlements, mais nous accueillons favorablement l’idée de moderniser la classification et le resserrement de l’étau sur l’hébergement collaboratif », a estimé le président-directeur général de l’Association Hôtellerie Québec, Xavier Gret, dans le cadre d’un entretien téléphonique.

Celui-ci a salué la volonté du gouvernement Legault d’encadrer la province dans son ensemble sur la question des résidences secondaires et chalets offerts sur des plateformes de location.