Même si bien peu d’entreprises manufacturières étaient encore complètement inactives, ce lundi devrait marquer le retour au travail de dizaines de milliers d’employés, et le début de leur adaptation à des conditions inhabituelles.

À compter de ce lundi matin, les entreprises manufacturières qui n’avaient pas encore le droit de le faire peuvent accueillir un nombre d’employés correspondant à 50 plus la moitié des employés restants.

« Un site manufacturier employant 60 travailleurs lors d’un même quart de travail doit assurer son fonctionnement avec un maximum de 55 employés », explique par exemple le gouvernement du Québec dans les consignes publiées sur internet. Ou encore, 275 employés dans un site en accueillant normalement 500. Un retour au travail complet ne sera pas permis avant encore deux semaines.

Jusqu’à 100 000 employés pourraient ainsi reprendre le collier ce lundi, selon Manufacturiers et Exportateurs du Québec (MEQ).

La relance est accueillie avec joie par les membres de cet organisme. Les activités manufacturières n’ont pas été arrêtées ailleurs au Canada et dans plusieurs États américains.

« Plus ça durait, plus ça avait un impact sur notre compétitivité, note la présidente-directrice générale de MEQ, Véronique Proulx. Plusieurs membres nous disaient que leurs concurrents essayaient de leur gruger leurs parts de marché. Il était temps que ça recommence. »

Formation chez Bombardier

Dans les différentes installations du plus gros manufacturier au Québec, Bombardier, le vrai retour au travail ne s’effectuera que mardi. La journée de lundi sera consacrée à permettre aux employés d’apprivoiser le nouvel environnement.

Les employés ont été convoqués par cohortes pour des séances d’environ deux heures au cours desquelles on leur fera une présentation des nouvelles mesures, leur remettra les équipements nécessaires et les emmènera pour une tournée d’usine afin de voir concrètement les changements à leurs postes de travail et aux installations communes, comme la cafétéria et les casiers.

Certains employés ont vu leur horaire modifié temporairement. Alors que les installations de Bombardier utilisent normalement un quart de travail densifié durant le jour et un autre plus épars en soirée, on a cherché à équilibrer les deux quarts de travail pour remettre au travail le plus de gens possible tout en respectant les règles, explique le porte-parole Mark Masluch.

À l’opposé du spectre, chez le fabricant et distributeur d’équipement d’aération Ventimétal, on sera en mesure lundi d’accueillir la totalité de la quinzaine d’employés.

Ils seront tous équipés d’une visière et seront invités à moins se déplacer dans l’usine et à ne plus partager leurs outils. Le comptoir des pièces a été élargi pour maintenir une certaine distance avec les clients.

« Le plus gros enjeu que nous avons eu, c’est la réticence à revenir, confie la gestionnaire Jennifer Lizotte. Il a fallu les rassurer, leur montrer que nous avions pris les mesures pour les protéger. »

  • Chez Ventimétal, à Laval, les employés comme les ferblantiers Daniel Lalande (premier plan) et Paul-Guillaume Tessier-Martineau sont invités à porter la visière, à rester le plus possible à leur poste de travail et à ne pas partager leurs outils.

    PHOTO ALAIN ROBERGE, LA PRESSE

    Chez Ventimétal, à Laval, les employés comme les ferblantiers Daniel Lalande (premier plan) et Paul-Guillaume Tessier-Martineau sont invités à porter la visière, à rester le plus possible à leur poste de travail et à ne pas partager leurs outils.

  • L’absence d’environ la moitié des employés réguliers permet de respecter encore assez facilement la distanciation chez Dimensions portes et fenêtres, à Terrebonne.

    PHOTO ALAIN ROBERGE, LA PRESSE

    L’absence d’environ la moitié des employés réguliers permet de respecter encore assez facilement la distanciation chez Dimensions portes et fenêtres, à Terrebonne.

  • Quand les opérations ne le permettent pas, par exemple lorsqu’il faut plus d’un employé pour compléter l’assemblage d’une fenêtre, Dimensions leur demande de porter la visière.

    PHOTO ALAIN ROBERGE, LA PRESSE

    Quand les opérations ne le permettent pas, par exemple lorsqu’il faut plus d’un employé pour compléter l’assemblage d’une fenêtre, Dimensions leur demande de porter la visière.

  • Dans les différents sites de Bombardier, le nombre de portes d’entrée a été réduit et le marquage au sol permet aux employés de respecter la distanciation. Des gardes de sécurité ont été ajoutés pour poser quelques questions de santé à l’entrée.

    PHOTO FOURNIE PAR BOMBARDIER

    Dans les différents sites de Bombardier, le nombre de portes d’entrée a été réduit et le marquage au sol permet aux employés de respecter la distanciation. Des gardes de sécurité ont été ajoutés pour poser quelques questions de santé à l’entrée.

  • Les places seront rares dans les cafétérias de Bombardier, comme celle-ci à Saint-Laurent, où des chaises et des tables ont été retirées.

    PHOTO FOURNIE PAR BOMBARDIER

    Les places seront rares dans les cafétérias de Bombardier, comme celle-ci à Saint-Laurent, où des chaises et des tables ont été retirées.

  • Toujours à la cafétéria de Bombardier, on ne trouvera maintenant plus que des plats préemballés. Un peu partout dans l’usine, des indications au sol imposent une circulation à sens unique.

    PHOTO FOURNIE PAR BOMBARDIER

    Toujours à la cafétéria de Bombardier, on ne trouvera maintenant plus que des plats préemballés. Un peu partout dans l’usine, des indications au sol imposent une circulation à sens unique.

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Chez Dimensions portes et fenêtres, le retour au travail s’est effectué il y a trois semaines. Les deux usines de l’entreprise de la couronne nord de Montréal fonctionnent actuellement avec environ 140 employés, alors qu’elles peuvent en accueillir jusqu’à 250 en haute saison. Cela a grandement facilité les mesures de distanciation.

« Nos postes de travail ont quand même déjà pas mal d’espace, note Mathieu Audette, vice-président aux ventes et au marketing. Il n’y a que l’assemblage d’une fenêtre qui requiert parfois que quatre personnes soient autour de la même grosse table. Elles portent une visière et se lavent les mains plus souvent. »

Il reconnaît néanmoins que les choses pourraient se compliquer quand d’autres employés s’ajouteront. Mais il craint que ce problème ne se manifeste pas de sitôt.

« Ce qui manque pour l’instant, ce sont des commandes. »

Les mesures de distanciation se font aussi sentir dans la gestion de l’usine. Les rencontres entre la direction et les contremaîtres se font maintenant en vidéoconférence, même si la plupart des participants sont dans le même immeuble.

« Trois ou quatre personnes peuvent être dans la salle de conférence pendant que d’autres sont sur leur téléphone », raconte M. Audette.

Respect des règles

Deux questions se posent quant à la durée des mesures de sécurité sanitaires mises en place dans les usines : pendant combien de temps seront-elles nécessaires et pendant combien de temps seront-elles respectées ?

« C’est une question d’amélioration continue, ce ne sera pas parfait la première journée, prévient Mme Proulx. La communication sera la clé. »

Chez Dimensions, on espère que les employés respecteront les règles non seulement dans l’usine, mais aussi à l’extérieur.

« On a demandé à tous nos chefs d’équipe de rappeler aux gens de respecter les mesures de confinement et d’être prudents, indique M. Audette. S’ils commencent à se promener d’un bord et de l’autre, ils peuvent d’abord être infectés et ne pas pouvoir venir travailler, mais aussi infecter d’autres gens de l’équipe. »

Ceci dit, la gravité de la crise semble avoir eu un impact positif sur le respect des consignes de certains employés.

« Personne ne s’est obstiné pour ne pas porter la visière, remarque Mme Lizotte. Avant, juste les lunettes de sécurité, ça prenait tout pour leur faire mettre. »