La réouverture mercredi des ateliers de mécanique sortira de l’hibernation les concessionnaires automobiles et leur permettra de rappeler au travail la majorité de leur main-d’œuvre.

« Ça remet doucement l’industrie en marche », se réjouissait prudemment lundi le président-directeur général de la Corporation des concessionnaires automobiles du Québec (CCAQ), Robert Poëti.

Au cours des derniers jours, l’organisme avait soumis au gouvernement un aperçu des procédures qui pourraient être mises en place dans les ateliers de mécanique pour assurer que le travail s’effectue sans trop accentuer les risques de propagation de la COVID-19.

Cela incluait notamment de fonctionner uniquement par rendez-vous et de désinfecter les voitures avant la remise au client.

« Ils vont nous dire les règles [mardi], mais ça devrait ressembler à ce qu’on a envoyé, a affirmé M. Poëti lundi. Les règles qui seront imposées, on va les suivre. »

Les changements de pneus devraient constituer l’essentiel de la clientèle au départ. « Il y a 7 millions de véhicules au Québec, donc ça va prendre du temps », a prévenu M. Poëti.

La décision de Québec a néanmoins pris de court certains concessionnaires, qui s’activaient en après-midi pour en apprendre davantage et préparer une réouverture dès mercredi.

« Ça veut dire qu’on va avoir du pain sur la planche [mardi] ! », a par exemple réagi Jean-Claude Gravel, propriétaire du Groupe Gravel, lorsque mis au courant de certains détails par La Presse.

Selon lui, l’atelier de mécanique représente environ la moitié du chiffre d’affaires de ses établissements, mais jusqu’à 75 % de leur personnel. Pour Norman Hébert, président et chef de la direction du Groupe Park Avenue, c’est plutôt environ 60 % de ses quelque 1200 employés avant la crise, dont environ 200 qui devraient être rappelés au travail rapidement, les autres étant réintégrés progressivement.

M. Hébert prévoyait que le centre d’appels de son entreprise serait rouvert dès ce mardi pour amorcer la prise de rendez-vous. Les clients ne pourront rester sur place durant les travaux et devront disposer de leurs propres moyens pour retourner à la maison en attendant, afin de respecter les règles de distanciation.

À l’abri

Les quelques concessionnaires sondés par La Presse au cours des jours ayant précédé l’annonce de la réouverture des ateliers mécaniques ne semblaient pas trop s’en faire pour leur avenir à moyen ou court terme.

« On s’est protégés, on va être capables de passer à travers cette période », estime M. Hébert, président et chef de la direction du Groupe Park Avenue, qui avait dû mettre la presque totalité de son personnel à pied.

Il ne faudrait pas que ça dure six mois, mais pour deux ou trois mois, c’est correct.

Mario Bourgeois, propriétaire de Bourgeois Chevrolet à Rawdon

La pandémie tombait à un moment délicat pour les concessionnaires. Les trois mois du printemps peuvent générer jusqu’à 70 % des profits de l’année chez le Groupe Gravel, selon son propriétaire. C’est aussi un moment où les stocks sont à leurs niveaux les plus élevés, en prévision de cette haute saison, maximisant ainsi la pression financière.

Qui plus est, elle suit une année 2019 au cours de laquelle les ventes ont chuté dans l’ensemble de l’industrie, rappelle Cathy Laroche, vice-présidente aux communications, au marketing et aux médias d’Albi le Géant.

« Les filiales de financement des constructeurs et les banques sont toutes en train de mettre en place des programmes » pour soulager les concessionnaires, a indiqué M. Hébert.

Chez GM, par exemple, on a permis aux concessionnaires de ne rien payer des prêts liés à leurs stocks avant le mois de juin, selon M. Gravel. La facture, qui va néanmoins continuer de courir, pourra ensuite être étalée sur un an.

Très peu de ventes

Depuis la fermeture forcée de leurs établissements, la plupart des concessionnaires ont maintenu un minimum d’activités de vente, par l’internet. Leur tâche était toutefois compliquée par le fait que la loi québécoise ne permet pas la conclusion d’une vente automobile entièrement en ligne. Entre autres, la signature doit être faite en personne, chez le concessionnaire.

Des assouplissements avaient toutefois été obtenus auprès de l’Office de la protection du consommateur, selon M. Poëti, afin que la loi, sans être changée pour l’instant, soit appliquée « avec jugement et discernement ».

M. Hébert espère que la crise ait démontré l’utilité de modifier la loi, d’autant que la signature électronique est acceptée dans d’autres territoires canadiens.

« Il y a beaucoup d’embûches réglementaires au Québec, mais parfois, c’est dans ce genre de situation qu’on trouve des solutions. »

Les rares transactions conclues au cours des dernières semaines visaient le plus souvent le remplacement de voitures victimes de bris majeurs et devant être utilisées par des services essentiels, ont indiqué les concessionnaires sondés.