(Québec) Le gouvernement Legault franchit un pas de plus pour accroître l’autonomie alimentaire du Québec. Il présentera ce vendredi son plan visant à faire doubler le volume des aliments produits en serre d’ici cinq ans, a appris La Presse.

Pour avoir droit à une aide de Québec, les entreprises devront axer leur production sur l’achat local.

Dotée d’un budget de 91 millions, la stratégie vise non seulement les grandes entreprises serricoles bien établies, mais aussi les petits agriculteurs qui allongent leur période de production grâce à l’utilisation de grands tunnels dans leurs champs. Des producteurs comme le maraîcher vedette Jean-Martin Fortier, qui sera d’ailleurs sur la colline Parlementaire aux côtés du ministre de l’Agriculture, André Lamontagne, pour participer à cette annonce.

Un nouveau programme a ainsi été créé pour les producteurs de fruits et légumes qui désirent allonger leur période de production dans le but de prendre de l’expansion sur le marché local en modernisant leurs installations existantes. L’aide financière pourra atteindre un maximum de 50 % des dépenses admissibles, jusqu’à concurrence de 50 000 $.

Rabais d’électricité

À l’autre bout du spectre, les grandes entreprises qui sont en mesure de prendre de l’expansion dans le marché des grandes chaînes d’alimentation pourront bénéficier d’une aide financière accordée sous la forme d’un remboursement sur leur facture mensuelle d’électricité pouvant atteindre 40 %. La condition est de faire un investissement d’au moins 3 millions.

Ces entreprises pourront vendre une portion de leurs récoltes à l’extérieur des frontières du Québec – dans une autre province, par exemple – mais il n’est pas question d’accorder une subvention si toute la production est destinée à l’exportation.

Un troisième programme destiné aux entreprises qui alimentent les marchés régionaux ou nationaux visera les projets d’au moins 100 000 $. L’objectif est d’augmenter les superficies et de moderniser les équipements existants. L’aide financière pourra atteindre un maximum de 50 % des dépenses admissibles, jusqu’à concurrence de 600 000 $.

Avec le dépôt de sa « stratégie de croissance des serres au Québec 2020-2025 – Pour une plus grande autonomie alimentaire », le gouvernement caquiste tient l’une de ses promesses électorales phares. Dans le contexte de la pandémie, il souhaite aussi s’en servir comme outil de relance économique.

Tarif préférentiel

Ce plan s’ajoute au projet de mise en place d’un tarif préférentiel de 5,59 cents le kilowattheure pour toutes les serres du Québec.

À l’heure actuelle, les serres qui consomment plus de 300 kWh ont droit à ce tarif pour la facture d’éclairage destinée à la photosynthèse, c’est-à-dire pour la lumière artificielle servant à la croissance des plantes.

Seulement une quinzaine d’entreprises se qualifient pour ce tarif. Le nouveau programme qui s’appliquerait également au chauffage est actuellement devant la Régie de l’énergie du Québec, qui doit trancher sous peu sur le dossier.

Le Québec compte 553 entreprises serricoles de fruits et de légumes. Selon le ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec (MAPAQ), en 2018, elles totalisaient 123 hectares pour une valeur de 148 millions de dollars.

La culture en serre permettrait d’obtenir des rendements de cinq à dix fois supérieurs à la production en champ, estime le MAPAQ.

Avec l’adoption de différentes mesures, le ministre de l’Agriculture souhaite faire passer la souveraineté alimentaire du Québec de 51 % à 56 % au cours des prochaines années, une augmentation de 10 %. Le Québec étant un pays nordique, cette hausse passe nécessairement par l’ajout de superficies de serres.

Extension du réseau triphasé

Le ministre de l’Énergie et des Ressources naturelles, Jonatan Julien, annoncera aussi vendredi un nouveau programme de 15,2 millions afin de soutenir les projets qui nécessitent l’extension du réseau triphasé de distribution d’électricité. Plusieurs régions rurales ne sont pas desservies par ce réseau pourtant nécessaire pour l’utilisation de nouvelles technologies électriques comme celles utilisées dans les serres.

L’ITA volera de ses propres ailes

La dernière école d’État québécoise, l’Institut de technologie agroalimentaire (ITA), volera désormais de ses propres ailes. Le ministre Lamontagne a déposé hier un projet de loi à l’Assemblée nationale visant à créer une nouvelle entité qui ne relèverait plus du MAPAQ, mais d’un conseil d’administration. Sa mission d’offrir la formation collégiale en agriculture sur les campus de La Pocatière et de Saint-Hyacinthe resterait la même, mais l’établissement d’enseignement profiterait d’une flexibilité accrue et d’une plus grande autonomie. « Le vaisseau amiral de la formation agroalimentaire au Québec fait face à des difficultés causées par un cadre institutionnel mal adapté à ses besoins. Actuellement, l’école doit fonctionner selon les mêmes règles qu’un ministère, ce qui nuit à sa flexibilité et à son développement. Le projet de loi que j’ai présenté aujourd’hui vise à corriger la situation », a déclaré jeudi le ministre.