(Washington) Le gouvernement américain a annoncé lundi qu’il allait bloquer l’importation d’une série de biens originaires de la région chinoise du Xinjiang, accusant Pékin d’y avoir recours au « travail forcé » de la minorité musulmane ouïghoure.

C’est « un message clair » adressé aux autorités chinoises : « Il est temps qu’elles mettent un terme au travail forcé supervisé par l’État et qu’elles respectent les droits humains de tous les peuples », a déclaré dans un communiqué le chef de la diplomatie Mike Pompeo.

Concrètement les services des douanes américaines ont émis quatre décrets pour interdire l’entrée aux États-Unis de produits capillaires, de coton, de pièces informatiques ou textile fabriqués dans des entreprises de la région. Un cinquième décret vise tous les biens fabriqués dans le camp dit « de rééducation » de Lop County.  

« Ce n’est pas un centre éducatif, c’est un camp de concentration où les minorités ethniques et religieuses sont sujettes à des abus et obligées de travailler dans des conditions atroces sans recours ni liberté. C’est de l’esclavage moderne », a estimé lors d’un point-presse Ken Cuccinelli, ministre adjoint à la Sécurité intérieure.

Les Ouïghours, musulmans et turcophones, constituent le principal groupe ethnique du Xinjiang, une immense région de l’ouest de la Chine qui a notamment des frontières communes avec l’Afghanistan et le Pakistan.

Les États-Unis, comme d’autres pays occidentaux et de nombreuses organisations internationales, accusent Pékin de mener des persécutions à grande échelle contre les Ouïghours et d’avoir arbitrairement interné plus d’un million de musulmans du Xinjiang dans des camps.

La Chine dément ce chiffre et affirme qu’il s’agit de centres de formation professionnelle, destinés à aider la population à trouver un emploi afin de l’éloigner de la tentation de l’extrémisme islamiste. Outre ces détentions massives, Pékin est également accusé de stérilisations forcées dans la région.

Les douanes américaines avaient déjà saisi à la mi-juin une cargaison de produits à base de cheveux humains, suspectés d’avoir été conditionnés dans des camps de travail du Xinjiang. Washington a également adopté des sanctions ciblées contre des dirigeants politiques et les entreprises impliquées dans la région.

De son côté, l’Union européenne a proposé lundi à la Chine l’envoi d’« observateurs indépendants » au Xinjiang. La France l’avait déjà proposé en vain en juillet.

Le dossier des Ouïghours alimente l’escalade qui a plongé les relations entre les États-Unis et la Chine dans leur plus grave crise depuis leur reconnaissance mutuelle en 1979.

En mars, un centre de réflexion australien, l’Institut australien de stratégie politique (ASPI), avait estimé dans un rapport détaillé que des dizaines de milliers de Ouïghours détenus au Xinjiang avaient été transférés dans des usines fournissant 83 marques mondialement connues, comme Apple, Sony, Adidas, Nike ou BMW.