Le nombre de boursicoteurs explose au Québec… en même temps que la volatilité boursière.

Depuis le début du mois de mars, Desjardins a enregistré une augmentation de 300 % des demandes d’ouverture de compte à son service de courtage en ligne Disnat.

Le nombre de transactions effectuées par les clients est quant à lui en hausse de 133 % par rapport à février.

Son de cloche similaire chez BMO Ligne d’action, plateforme de courtage en ligne de la Banque de Montréal. « Nous observons des volumes records tant au niveau des demandes d’ouverture de comptes qu’au niveau des volumes de transactions », indique Marie-Catherine Noël, porte-parole de BMO.

La Banque Royale – plus grande institution financière au pays – ne divulgue pas de statistiques pour son service RBC Placements en direct. Il s’agit d’une période « sans précédent », souligne toutefois le directeur des communications, Denis Dubé.

Chez Banque Nationale Courtage direct, le président, Claude-Frédéric Robert, indique que trois fois plus de comptes ont été ouverts cette année en mars, comparativement à mars 2019.

L’explosion du nombre de nouveaux clients s’explique de deux façons, selon le porte-parole de Desjardins, Richard Lacasse.

Il y a une volonté d’acheter des titres alors que le marché est bas et plusieurs investisseurs disposent de davantage de temps parce qu’ils suivent les consignes et demeurent à la maison pour contrer la COVID-19.

Richard Lacasse

« Les mouvements des marchés boursiers dans le dernier mois ont incité les investisseurs à être plus actifs. Les transactions sont légèrement indexées vers les achats, c’est-à-dire qu’il y a un plus grand nombre de transactions d’achats que de ventes qui se font », ajoute Marie-Catherine Noël.

Surcharge d’appels

Eric Laplace, professionnel du secteur de l’assurance et résidant de Terrebonne, vient tout juste d’ouvrir un compte de courtage en ligne. « J’y pensais depuis un moment. J’en parlais avec un collègue et j’en suis venu à la conclusion que c’est le bon moment. Le marché est en baisse. Il y a des opportunités, je fais du télétravail et c’est plus tranquille en indemnisation en ce moment en raison de la situation actuelle », explique-t-il.

L’intérêt soudain des gens pour la Bourse a pour effet de surcharger d’appels les courtiers à escompte, ce qui peut causer une certaine frustration chez les clients.

« Actuellement, comme pour d’autres acteurs dans le marché, il y a un délai de traitement des ouvertures de comptes de cinq jours, lesquelles se font par du personnel en télétravail », dit Richard Lacasse.

Des temps risqués

L’Autorité des marchés financiers soutient être « bien consciente » que dans la situation actuelle des marchés découlant de la pandémie, des personnes pourraient être tentées de se lancer dans le courtage en ligne. « Il y a évidemment des risques et des conseils à donner », dit le porte-parole Sylvain Théberge (voir autre texte ci-contre).

Pour le trader professionnel Voicu Valentir, les mises en garde ne seront jamais trop nombreuses.

« Beaucoup de gens confinés à la maison font des transactions en Bourse parce qu’ils ont présentement beaucoup de temps pour le faire. Il faut les prévenir : les machines mènent tout aujourd’hui. Si tu passes un ordre d’achat, les machines se placent immédiatement devant toi. Elles sont hyperactives. »

En d’autres mots, difficile de tirer son épingle du jeu en multipliant les transactions, soutient M. Valentir.

C’est difficile pour moi en tant que day-trader professionnel de faire de l’argent, imagine pour un investisseur de détail qui débute.

Voicu Valentir

Il recommande d’aller à la pêche avec des lignes mortes, c’est-à-dire avec des ordres d’achat très bas sur des titres de qualité. « Les meilleurs moments sont à l’ouverture et à la fermeture. Entre 11 h et 15 h, c’est juste des swings pour tuer le plus de monde possible. »

« Mais si tu viens de perdre ton emploi et que tu te fais laver en Bourse en plus, l’esclavage t’attend pour le reste de tes jours ! »

Des outils

La plupart des plateformes de courtage à escompte proposent des outils pour aider les petits investisseurs, et certaines firmes bonifient leur soutien. « Nous avons récemment mis en place une série de webinaires destinés aux nouveaux clients pour les accompagner dans leurs premiers pas », dit Claude-Frédéric Robert, de Banque Nationale Courtage direct.

Chez Disnat, la direction affirme sensibiliser les nouveaux clients au fait que d’être investisseur autonome comporte des risques. « Nous les dirigeons vers une section de notre site et nous sommes passés de un à trois et parfois quatre podcasts par jour avec un gestionnaire de portefeuille pour décrypter les variations majeures sur les grandes places boursières », dit Richard Lacasse.

Quatre choses à savoir avant de se lancer

Ne pas brûler les étapes

Il importe de bien connaître les principes du placement et d’établir votre profil d’investisseur, souligne l’Autorité des marchés financiers (AMF). Une bonne compréhension de sa situation financière, de ses besoins et de ses objectifs en tant qu’investisseur est primordiale. Le petit investisseur sera responsable de ses décisions de placement et des résultats, bons et mauvais.

Avoir des attentes réalistes

De nombreux courtiers offrent l’option d’ouvrir des comptes fictifs, où il est possible de d’abord tester les fonctionnalités de la plateforme. L’AMF suggère d’en profiter pour faire des essais afin d’évaluer les rendements que vous auriez obtenus.

Prévoir du temps

Investir de manière autonome nécessite de consacrer du temps à suivre l’évolution des marchés, de ses placements et de sa répartition d’actifs. Demeurer à l’affût des marchés est exigeant.

Considérer les frais

La réduction des frais de courtage ne devrait pas être la motivation principale de l’investisseur autonome. Si vous réalisez beaucoup de transactions d’achat et de vente dans le but de minimiser vos frais, vous pourriez avoir de mauvaises surprises.

Source : Autorité des marchés financiers