Il y a 12 ans, Étienne Borgeat et son collègue Olivier Letard, deux jeunes ingénieurs fraîchement diplômés, quittent leur emploi pour créer leur propre firme de génie-conseil, spécialisée dans la gestion de vie de produits (Product Lifecycle Management). PCO Innovation compte aujourd'hui 600 ingénieurs disséminés aux quatre coins du monde où ils s'activent à réinventer les processus industriels des géants manufacturiers mondiaux.

«On travaillait pour une firme qui faisait du CAD (Computer-Aid Design) qui allait plus ou moins bien. On a décidé de partir à notre compte en nous concentrant sur la valeur ajoutée que l'on pouvait apporter à nos clients industriels», rappelle Étienne Borgeat.

Une approche différente

Douze ans plus tard, ces clients sont devenus Boeing, Airbus, Bombardier, Renault, Peugeot, Volvo Trucks, BMW, Toyota, Nestlé, L'Oréal, Rolex... Des acteurs globaux chez qui PCO Innovation dépêche ses ingénieurs-spécialistes dans leurs départements d'ingénierie.

«Notre rôle est essentiellement de raccourcir le processus d'innovation de produits pour ces grosses entreprises industrielles. Déjà, la réalisation de plans en trois dimensions a permis de réduire le temps de conception d'un produit.

«Avec le Product Lifecycle Management, on pousse plus loin l'optimisation des ressources et du temps. Fabriquer un avion ou une voiture implique des milliers de pièces. Nous, on est là pour faciliter l'intégration de toutes ces pièces.

«On accompagne nos clients à partir de l'idée d'un produit à sa conception en usine. On n'est pas là pour leur faire réaliser des gains de productivité, mais pour raccourcir leur processus d'innovation», explique le PDG qui a fêté ses 40 ans cette année.

C'est d'ailleurs ce qui distingue PCO de ses concurrents, estime Étienne Bourgeat.

«On n'est pas comme les grands groupes-conseils en informatique tels que CGI. On est le plus important groupe international indépendant dans le domaine de la gestion de vie de produits. Il n'y a pas d'équivalents. IBM offre bien des services dans ce domaine, mais ça reste marginal par rapport à nous», souligne-t-il.

PCO Innovation a aussi l'avantage de pouvoir compter sur la forte proximité de ses clients. Les interventions de PCO placent ses ingénieurs au coeur même du processus d'innovation des groupes industriels.

«On vient de réaliser pour Michelin - un acteur mondial qui a une immense et complexe opération d'approvisionnement, de fabrication et de distribution - le plan de son système informatique pour les 10 prochaines années et pour l'ensemble de ses activités mondiales. On est vraiment très proches des grands enjeux», constate l'ingénieur.

Le bond européen

L'entreprise fondée en 2000 par les deux jeunes associés a connu dès le départ une bonne croissance. En 2007, la société, qui s'appelait à l'époque idCAD, employait 150 ingénieurs québécois lorsqu'elle a fait l'acquisition de la firme française PCO Technologie.

«PCO était une entreprise-partenaire. Elle a voulu nous acheter, mais c'est nous finalement qui l'avons acquise. D'un coup, on a doublé de taille avec 300 ingénieurs à notre emploi. J'ai passé trois ans à faire la navette entre Lyon et Montréal pour bien réaliser l'intégration», résume Étienne Borgeat.

idCAD est devenue PCO Innovation et le groupe a poursuivi sa croissance interne pour doubler de taille et compter aujourd'hui 600 ingénieurs.

«Notre prochain objectif est de prendre de l'expansion en Allemagne, en Scandinavie et aux États-Unis, où on peut consolider le marché des petites firmes encore indépendantes. On va être bientôt 1000 consultants», prévoit le PDG de PCO.

PCO Innovation recrute des ingénieurs en informatique, en mécanique ou électrique. Au-delà des spécialistes en informatique, elle doit aussi compter sur des ingénieurs qui ont une grande connaissance des processus industriels des clients qu'elle dessert.

La jeune société a son siège social à Montréal et des bureaux à Seattle, Munich, Paris, Lyon, Grenoble, Rennes et Toulouse.

C'est en France que le groupe réalise la plus importante portion de son chiffre d'affaires. La taille et le rayonnement de ses clients français lui permettent toutefois de ne pas trop souffrir du fort ralentissement économique qu'on y observe.

«On a Renault, Alstom, EADS, Michelin, Airbus, L'Oréal. Même LVMH s'intéresse aujourd'hui à la gestion de vie des produits», souligne Étienne Borgeat.

Le PDG admet toutefois que l'année 2009-2010 a été plus difficile à vivre. Pour la première fois de son existence, PCO a enregistré une décroissance de ses heures facturées. L'an dernier, cependant, le groupe a connu une augmentation de 26% de ses revenus.

«On réalise 60% de nos revenus en Europe et en Asie, 30% aux États-Unis et 10% au Canada, principalement au Québec. Depuis un an, on augmente la part de nos revenus américains et on veut continuer de le faire», dit-il.

PCO a un bureau à Seattle où une trentaine de ses ingénieurs ont participé au programme du 787. Le groupe est évidemment associé au lancement de la prochaine CSeries de Bombardier.

Une firme convoitée

Cette proximité avec Bombardier a d'ailleurs amené un moment le Groupe CGI à penser acquérir PCO. Tout comme le groupe indien Tata Technology qui ne cache pas son intérêt envers sa firme québécoise.

«On avait Tata Technology comme client parce que la firme n'était pas dans notre domaine. Mais depuis cinq-six ans, nos principaux concurrents proviennent de l'Inde et Tata Technology aimerait bien acquérir notre clientèle européenne et nord-américaine», constate Étienne Borgeat.

Son partenaire Olivier Letard et lui sont les deux seuls propriétaires de PCO Innovation et ils n'ont pas l'intention de vendre, pour l'instant à tout le moins.