Le suspense entourant les intenses négociations qui ont eu lieu à Séoul pour en arriver à une position commune des membres du G20 a duré jusqu'à la dernière minute.

Au coeur des différends, la «guerre des monnaies», avec les questions des déséquilibres commerciaux et des devises, a continué à diviser les États membres: le Canada et les États-Unis, d'un côté, la Chine, l'Allemagne et le Brésil de l'autre.

Les dirigeants des États et gouvernements des 20 plus grandes puissances mondiales se sont livrés à un véritable sprint de pourparlers durant toute la journée de vendredi, dans l'espoir d'en arriver à une entente finale dans une série de dossiers, dont celui, plus épineux, des devises.

Les discussions, qui ont suivi une nuit de négociations entre sherpas et fonctionnaires, portaient sur les thèmes du développement, de la réforme réglementaire financière et des changements climatiques.

En ouvrant la première séance, le président du pays hôte, Lee Myung-bak, a remercié les parties pour leur travail, mais demandé à ses partenaires de faire des concessions pour en arriver à une entente, même si elle devait être plus limitée que certains l'auraient souhaité.

Harper défend les États-Unis

Durant les journées et les heures qui ont précédé ce sprint final, les tensions sont demeurées vives entre les États membres. Plusieurs ont continué à critiquer la décision de la banque centrale des États-Unis d'injecter 600 nouveaux milliards dans son économie.

Le premier ministre Stephen Harper a profité de sa première déclaration publique, hier après-midi, pour se ranger derrière les Américains et pour dénoncer l'approche chinoise de la dévaluation compétitive du yuan.

«Le vrai problème pour notre pays, c'est que cette dépréciation du dollar américain nous fait porter un fardeau trop lourd, parce que certaines autres devises n'ont pas de flexibilité. C'est le vrai problème que l'on doit régler», a lancé M. Harper en point de presse.

Au moment d'écrire ces lignes, le communiqué final du Sommet n'avait pas encore été rendu public. Mais, déjà, il semblait acquis qu'aucune solution concrète n'allait être proposée pour régler ces deux problèmes.

Le plafonnement à 4% du PIB pour les surplus et les déficits des comptes courants, que les États-Unis ont proposé il y a quelques semaines dans l'espoir de remédier au problème des déficits commerciaux, semblait définitivement écarté.

«Fixer des limites pour les surplus ou les déficits des comptes courants n'est ni économiquement justifié ni politiquement approprié, a déclaré la chancelière allemande, Angela Merkel. Cela irait aussi à l'encontre des principes du libre marché.»

En se confiant à l'agence Reuters, un négociateur indien s'est dit heureux que la position des pays émergents, comme l'Inde, le Brésil et la Chine, ait été prise en compte à cet égard. Selon lui, la formulation choisie correspondrait au «plus petit dénominateur commun».

En marge d'un souper inaugural, à Séoul mercredi soir, le président des États-Unis, Barack Obama, a rencontré ses homologues de la Chine et de l'Allemagne en aparté pour tenter d'aplanir leurs divergences.

Puis, lors d'une réunion d'information, hier matin, un haut fonctionnaire canadien s'est dit confiant que les États membres s'en tiendraient à tout le moins à la déclaration adoptée par les ministres des Finances et les gouverneurs des banques centrales, il y a trois semaines.

Cette déclaration prévoyait que les grandes économies, comme les États-Unis, engagent plus de surplus, tandis que les économies émergentes, comme la Chine, encouragent la consommation interne et permettent la flexibilité de leur monnaie.

«Il ne faut pas anticiper que l'on va tout régler aujourd'hui», a dit ce haut fonctionnaire.

Selon plusieurs agences de presse, le Fonds monétaire international pourrait de plus participer à la prochaine étape de ce dossier, en attendant le prochain sommet, en France.

Consensus de Séoul

Au-delà de cette «guerre des monnaies», hautement médiatisée, le sommet de Séoul doit donner lieu à certaines avancées, y compris de nouvelles orientations en matière de développement international et d'aide humanitaire.

Le brouillon d'une déclaration finale sur cette question, que La Presse a consulté, est titré «Consensus de Séoul».

Les États membres y reconnaissent que la crise a eu des effets dévastateurs à l'égard de certaines populations. «On évalue que, à cause de la récente crise, 64 millions plus de gens vivront dans l'extrême pauvreté», peut-on lire dans le document. Ce critère s'applique à ceux qui vivent avec moins de 1,25$ par jour.

Pour tenter de remédier à la situation, les États membres s'engageraient à rehausser leurs efforts, en partenariat avec les pays concernés. Le Consensus de Séoul prévoit une série d'initiatives, certaines chapeautées par la Banque mondiale, de même que la reconnaissance du rôle du secteur privé dans les efforts de développement international.

Le pays hôte du sommet, la Corée du Sud, avait fait d'une telle entente l'une de ses priorités. Avec Reuters, AFP, Bloomberg et The New York Times