De plus en plus de Québécois ont des maladies du foie sans être alcooliques. Un chercheur de l’Institut de recherches cliniques de Montréal (IRCM) croit avoir trouvé une solution pour les soigner.

« La maladie du foie gras non alcoolique touche entre 25 % et 35 % de la population », explique le biologiste Nabil Seidah, de l’IRCM, qui est l’auteur principal de l’étude publiée début novembre dans la revue Metabolism. « La forme plus grave de cette maladie, la stéatose hépatique, est aussi de plus en plus fréquente. Elle touche plus de 5 % de la population au Canada et ça devrait passer à 6,5 % d’ici 2030. »

Dans un cas sur cinq, la stéatose mène à la cirrhose, ce qui peut nécessiter une greffe de foie. Le risque de cancer est aussi très élevé avec la cirrhose.

La maladie du foie gras non alcoolique est liée à une trop forte consommation de certains aliments ultratransformés, de gras et de sucres.

La prévalence de la maladie du foie gras non alcoolique a doublé depuis 30 ans. Et elle touche de plus en plus de femmes : en 1990, elles étaient 50 % moins touchées que les hommes, alors qu’en 2020, elles étaient seulement 25 % moins touchées, selon une étude publiée en 2022 par des chercheurs de l’Université Stanford dans la revue Clinical and Molecular Hepatology.

La molécule que M. Seidah a identifiée pour traiter la maladie du foie gras non alcoolique inhibe une protéine appelée PCSK7. Chez l’animal, si cette protéine est inhibée, le foie revient à son état normal – même avec la forme plus grave de la maladie, la stéatose.

« Il y a beaucoup d’intérêt pour trouver une manière de traiter cette maladie, dit-il. Pour le moment, la seule thérapie autorisée est une forte dose de vitamine E, mais il y a beaucoup de toxicité. »

PHOTO BERNARD BRAULT, ARCHIVES LA PRESSE

Nabil Seidah, biologiste à l’Institut de recherches cliniques de Montréal

Il y a 300 essais cliniques en cours dans le monde pour d’autres molécules. Il semble que l’Ozempic [médicament autorisé pour le diabète, aussi utilisé contre l’obésité] fonctionne, mais là aussi, il y a des effets secondaires importants, au niveau gastro-intestinal.

Nabil Seidah, auteur principal de l’étude

L’équipe de M. Seidah travaille maintenant avec un autre modèle animal, une souris humanisée qui exprime exclusivement le gène de la PCSK7 humaine et qui serait sensible à ses inhibiteurs. Si les effets bénéfiques des inhibiteurs de PCSK7 sur la maladie du foie gras non alcoolique et sur la stéatose hépatique se confirment, ainsi que l’absence d’effets secondaires, il pense qu’un médicament pourrait être approuvé d’ici quatre à cinq ans.

Un œil sur des inhibiteurs

Ce n’est pas la première fois que M. Seidah est à l’origine d’un médicament révolutionnaire. Ses travaux ont mené au développement des inhibiteurs de la protéine PCSK9 qui, depuis une demi-douzaine d’années, traitent les patients souffrant d’hypercholestérolémie familiale. Ces patients ont des taux de cholestérol trop élevés pour répondre aux statines, les médicaments couramment utilisés pour les baisser. Quelques dizaines de milliers de Québécois, y compris des patients intolérants aux statines, prennent ces médicaments inhibiteurs de PCSK9.

Les inhibiteurs de PCSK9 pourraient d’ailleurs jouer un rôle dans le traitement de la maladie du foie non alcoolique, selon M. Seidah.

Des données préliminaires chez la souris montrent qu’ils sont efficaces contre la stéatose hépatique non alcoolique et, peut-être même, qu’ils peuvent diminuer le risque de cancer du foie.

Nabil Seidah, auteur principal de l’étude

Autre bonne nouvelle, les inhibiteurs de PCSK9 pourraient être offerts sous forme de pilules, au lieu d’injections, rapporte le biologiste de l’IRCM.

Des chercheurs américains ont, par ailleurs, annoncé qu’une thérapie génique visant le gène de la protéine PCSK9 guérissait en une seule fois l’hypercholestérolémie familiale. Ces avancées, si elles se confirment, devraient pouvoir être appliquées aux inhibiteurs de PCSK7.

Une version précédente de cet article utilisait erronément la formulation « maladie du foie gras non hépatique »

En savoir plus
  • 18 %
    Proportion de la population souffrant de maladie du foie gras non alcoolique en 1990 dans le monde
    Source : clinical and molecular hepatology
    39 %
    Proportion de la population souffrant de maladie du foie gras non alcoolique en 2020 dans le monde
    Source : clinical and molecular hepatology