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Est-ce que le jeûne intermittent est bon pour la santé ?

Marc-André Niquet

Oui. Mais il n’est pas clair si c’est simplement parce qu’on mange moins ou à cause d’une modification du métabolisme, comme l’affirment ses partisans.

« Avec le jeûne intermittent, on peut avoir une perte de poids modeste d’environ 5 % », indique Stéphanie Chevalier, chercheuse au programme de désordres métaboliques de l’Institut de recherche du Centre universitaire de santé McGill. « Mais il y a peu d’études valables. Et jusqu’à maintenant, on n’a pas démontré vraiment que le jeûne intermittent permet de perdre du poids autrement qu’en limitant le nombre de calories consommées. »

Le jeûne intermittent a plusieurs déclinaisons. On peut jeûner un jour sur deux, ou deux jours par semaine, ou tous les jours pendant 16 heures d’affilée.

Le cardiologue Martin Juneau, de l’Institut de cardiologie, est pour sa part convaincu que le jeûne intermittent modifie le métabolisme.

PHOTO MARCO CAMPANOZZI, ARCHIVES LA PRESSE

Le Dr Martin Juneau, cardiologue de l’Institut de cardiologie

Quand on jeûne plus de 12 heures, la glycémie baisse et l’insuline aussi. Quand l’insuline est basse, on a accès aux graisses stockées dans le gras viscéral comme source d’énergie. Il ne faut pas oublier que les dépenses d’énergie sont dues à 80 % au métabolisme et à 20 % à l’activité physique.

Le Dr Martin Juneau, cardiologue de l’Institut de cardiologie

Le DJuneau estime que plusieurs données métaboliques montrent que c’est ce qui se passe avec le jeûne intermittent. Des études animales appuient cette thèse. Il cite des études en cours à l’Institut de cardiologie, et une autre qui a montré qu’une combinaison de jeûne intermittent et d’exercice peut faire chuter de 40 % la prévalence du diabète dans un groupe.

Une méta-analyse des études sur le jeûne intermittent, publiée fin 2021 dans le JAMA Network Open, concluait toutefois que la preuve de l’hypothèse métabolique n’est pas établie. « Il manque de données probantes pour arriver à cette conclusion », explique l’auteur principal de la méta-analyse, Chanthawat Patikorn, de l’Université de l’Utah.

Pour ce qui est des modalités, le DJuneau préfère le jeûne 16/8. « Si on ne mange pas de collation le soir, on fait naturellement un jeûne de 12 heures chaque nuit. Alors il suffit simplement d’allonger ce jeûne. »

Mais attention : il faut éviter toute calorie pendant le jeûne. « Même un demi-biscuit ou du sucre dans son café fait sécréter de l’insuline, dit le DJuneau. Ça barre l’accès aux graisses. »

Pour compliquer le tout, la meilleure étude sur le sujet, publiée en 2017 dans le JAMA Internal Medicine par des chercheurs de l’Université de l’Illinois à Chicago, portait sur le jeûne un jour sur deux. La nutritionniste Stéphanie Chevalier estime que pour qu’une étude soit valable, elle doit avoir un suivi d’au moins six mois, et celle de 2017 a suivi 100 personnes pendant un an.

Certaines personnes ont de la difficulté à ne pas manger quand elles ont faim. « Moi, par exemple, je pense à mon déjeuner quand je me réveille, quand je suis encore dans mon lit », dit le DJuneau. L’étude de la capacité différente d’un individu à l’autre de résister à la faim est embryonnaire, note Mme Chevalier. « Il est tout à fait possible que des gens soient plus sensibles, dans leur cerveau, aux hormones de la satiété sécrétées quand on mange », dit-elle.

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    Source : statistique Canada