(Starbase) Le premier décollage de la plus grande fusée du monde, Starship, développée par SpaceX pour des voyages vers la Lune et Mars, sera retenté jeudi après un report à la dernière minute lundi à cause d’un problème technique.

La nouvelle fenêtre de tir s’ouvrira jeudi à 8 h 28 locales (9 h 28 heure de l’Est) pour un tout petit peu plus d’une heure, a annoncé l’entreprise. Le lancement de cette géante doit avoir lieu depuis la base spatiale Starbase, à l’extrême sud du Texas aux États-Unis.

Du haut de ses 120 mètres, Starship appartient à la catégorie des lanceurs super-lourds, capables de transporter plus de 100 tonnes de cargaison en orbite. Sa puissance au décollage doit être plus de deux fois supérieure à celle de la légendaire Saturn V, la fusée du programme lunaire Apollo (111 mètres).  

Lundi matin, les conditions météo étaient idéales et le remplissage de la fusée avec son carburant cryogénique, de l’oxygène et du méthane liquides, se passait comme prévu.

Mais « une valve semble être gelée », a finalement tweeté Elon Musk, le patron de SpaceX, avant que le report ne soit officiellement annoncé, moins de 10 minutes avant l’heure de décollage prévue.

« Nous avons beaucoup appris aujourd’hui », a-t-il malgré tout déclaré.

Ce mastodonte noir et argenté n’a encore jamais volé dans sa configuration complète, avec son premier étage surpuissant, appelé Super Heavy.  

Seul le deuxième étage du véhicule, le vaisseau Starship qui donne par extension son nom à la fusée entière, a effectué des tests suborbitaux (à environ 10 km d’altitude).  

Le plan de vol pour le nouveau test est le suivant : environ trois minutes après le décollage, Super Heavy doit se détacher et retomber dans les eaux du golfe du Mexique. Le vaisseau Starship doit alors allumer ses six moteurs et continuer seul son ascension, jusqu’à environ 150 km d’altitude. Après avoir effectué un peu moins d’un tour de Terre durant environ une heure, il doit retomber dans l’océan Pacifique.  

Mais il s’agit là du « meilleur scénario », a fait savoir SpaceX, tant l’issue du vol d’essai est incertaine.  

Si durant les préparatifs « nous voyons quoi que ce soit qui nous inquiète, nous reporterons le vol », avait averti dimanche Elon Musk. Et atteindre l’orbite du premier coup est très peu probable, avait-il prévenu.

Le milliardaire s’est contenté de souhaiter que le test, dont le but principal est de récolter un maximum de données pour les prototypes suivants, ne détruise pas l’aire de lancement.  

Sa crainte : que l’un des 33 moteurs Raptor de Super Heavy explose et provoque un « effet domino » en se propageant aux autres. « Cela prendrait sûrement plusieurs mois pour reconstruire le pas de tir si nous le faisons fondre », a-t-il expliqué.  

Entièrement réutilisable

Ce vol inaugural sera suivi de très près par la NASA. L’agence spatiale américaine a choisi ce vaisseau pour faire réatterrir, pour la première fois en plus d’un demi-siècle, ses astronautes sur la Lune, lors de la mission Artémis 3 officiellement prévue en 2025.  

Les astronautes décolleront séparément à bord de la nouvelle méga-fusée de la NASA, SLS (98 mètres de haut, avec une puissance au décollage quasiment deux fois inférieure à celle prévue pour Starship).

Ils se rendront jusqu’à la Lune dans la capsule Orion, et celle-ci s’amarrera alors au vaisseau Starship, préalablement placé en orbite lunaire. C’est lui qui fera descendre les astronautes sur la surface de la Lune. Sans cet alunisseur, Artémis 3 ne pourra pas avoir lieu.  

À l’avenir, la nouvelle fusée doit être entièrement réutilisable. Super Heavy devra revenir se poser contre sa tour de lancement, équipée de bras pour l’attraper.  

Le vaisseau Starship devra, lui, revenir se poser sur Terre à l’aide de rétrofusées. C’est cette manœuvre qui avait été plusieurs fois tentée en 2020 et 2021. Plusieurs prototypes étaient alors redescendus trop vite, et avaient percuté le sol dans d’impressionnantes explosions – avant que l’un d’eux ne réussisse finalement son atterrissage.

L’idée d’un lanceur réutilisable, la grande stratégie d’Elon Musk, est de casser les prix. Chaque vol de Starship pourrait à terme ne coûter que « quelques millions » de dollars, a-t-il redit dimanche.  

La fusée a déjà des clients : le milliardaire américain Jared Isaacman sera aux commandes de son premier vol avec équipage.

Un autre milliardaire, le Japonais Yusaku Maezawa, et l’entrepreneur américain Dennis Tito (le premier touriste spatial de l’histoire), ont également annoncé qu’ils monteraient à bord pour un voyage autour de la Lune.  

Mais pour Elon Musk, Starship est surtout le vaisseau qui doit permettre à l’humanité de devenir multiplanétaire : « Nous avons un chemin ardu de deux ou trois ans devant nous […] mais à la fin nous devrions avoir quelque chose qui permette d’installer une base sur la Lune et sur Mars. »