À la mi-août, deux sondes ont frôlé Vénus. Même si leur objectif ultime est d’étudier Mercure et le Soleil, elles ont glané des données qui permettront de mieux comprendre comment l’étoile du berger perd son atmosphère. Et de prédire l’avenir lointain de la Terre. 

Champ magnétique

Vénus perd son atmosphère lentement, mais sûrement. C’est qu’elle n’a pas de champ magnétique, contrairement à la Terre, pour la protéger du vent solaire. Ce dernier arrache donc à Vénus ses gaz, ce qui explique pourquoi Vénus est si brillante. « Quand on regarde Vénus, on voit une traînée de gaz derrière elle, comme une comète », explique Robert Lamontagne, astrophysicien à l’Université de Montréal. C’est cette interaction entre le vent solaire et l’atmosphère vénusienne qu’ont mesurée les sondes BepiColombo et Solar Orbiter. « Elles ne sont pas optimisées pour étudier Vénus, mais elles ont à bord des spectromètres, des magnétomètres et, sur Solar Orbiter, des capteurs de particules qui sont utilisables pour mieux comprendre comment tout ça se déroule. » Les images dévoilées au mois d’août sont sursaturées parce que les sondes ont approché Vénus par le côté nuit, ce qui a donné une brève exposition à un croissant très brillant, puis la planète au complet. Il faudra plusieurs mois pour analyser les données.

Vénus ignorée

Les données de BepiColombo et de Solar Orbiter seront utiles pour planifier les prochaines missions prévues vers Vénus, notamment DaVinci+, choisie par la NASA en juin dernier, et qui doit s’envoler en 2029, selon M. Lamontagne. « Vénus est un peu l’enfant pauvre de l’exploration spatiale, par rapport à Mars. Dans les années 1960 et 1970, il y a eu quelques orbiteurs, puis presque rien avant deux missions dans les années 2000. C’est étrange, vu que ce sont les trois seules planètes qui se ressemblent dans le système solaire. C’est sûr qu’explorer Vénus est compliqué, avec la proximité du Soleil, la température et les pressions très élevées. Les atterrisseurs ne peuvent survivre qu’une ou deux heures. On ne peut imaginer une base habitée sur Vénus. Et pourtant, Vénus, c’est le futur de la Terre, dans 100 à 300 millions d’années. On aura alors un effet de serre comparable à celui de Vénus. »

Regardez le passage près de Vénus de BepiColombo (en anglais)
Regardez le passage près de Vénus de Solar Orbiter (en anglais)

Les deux sondes

Lancée en 2018, la sonde nippo-européenne BepiColombo doit arriver en orbite autour de Mercure en 2025. Elle est nommée en l’honneur de l’astronome italien Giuseppe Colombo, Bepi de son petit nom, qui a travaillé sur la mission américaine Mariner 10 qui a visité Mercure en 1974-1975. La seule autre mission vers Mercure a été Messenger, de 2008 à 2011.

IMAGE FOURNIE PAR L’AGENCE SPATIALE EUROPÉENNE

Impression d’artiste du passage de BepiColombo près de Vénus

Solar Orbiter, lancée l’an dernier, est une mission américano-européenne d’étude de l’origine du vent solaire qui se mettra en orbite autour du Soleil en 2023. Elle braquera notamment ses instruments sur les pôles du Soleil, difficiles à observer de la Terre, pendant 10 ans.

IMAGE FOURNIE PAR L’AGENCE SPATIALE EUROPÉENNE

Impression d’artiste du passage de Solar Orbiter près de Vénus

La vie vénusienne

En septembre dernier, des chercheurs britanniques et américains ont avancé que la vie existe dans les nuages de Vénus. Leur preuve : de la phosphine, un gaz impossible à produire naturellement sur Terre sauf par des microbes. Depuis, des critiques ont amené les auteurs de l’étude à admettre que les doutes sur leurs conclusions sont valides. « Durant la conférence de presse, les auteurs semblaient arrogants, ils mettaient la communauté scientifique au défi, dit M. Lamontagne. Leur ballon s’est dégonflé. Ça me rappelle une étude, il y a sept ou huit ans, sur des microbes intégrant de l’arsenic au lieu du phosphore dans leur ADN. Ça aussi, ça a été fortement remis en cause. »

En chiffres

467 °C : température à la surface de Vénus

93 fois : pression à la surface de Vénus, par rapport à la Terre

96 % : Proportion de l’atmosphère de Vénus qui est composé de CO2

0,04 % : Proportion de l’atmosphère de la Terre qui est composé de CO2

Source : NASA