Les singes atteints d’une malformation congénitale les privant de doigts ou de mains se consacrent malgré tout à l’épouillage de leurs semblables. Cela signifie que cette activité a une valeur sociale tout autant que médicale, ont découvert des chercheurs de l’Université Concordia.

« J’ai entrepris de comparer les techniques d’épouillage des singes infirmes et non handicapés, et j’ai remarqué la façon dont elles différaient », explique Jenny Espitia-Contreras, l’auteure principale de l’étude publiée début mars dans la revue PLOS One, qui poursuit actuellement sa maîtrise en évaluation environnementale à Concordia. « Selon le degré de déficience, les mouvements changent ou sont adaptés.

Grâce à des vidéos filmées par la Sarah Turner, coauteure et directrice de recherche de Mme Espitia-Contreras, et ses assistants de terrain durant ses recherches doctorales en 2007, Mme Paola Espitia-Contreras a pu étudier de près les habitudes d’épouillage des macaques. Elle s’est ainsi concentrée sur un groupe de 27 femelles, dont 11 étaient nées avec une malformation d’un membre.

« L’expérience de l’épouillage par les singes infirmes est probablement assez semblable, souligne Mme Turner. Ils remplissent la fonction sociale de l’épouillage et compensent par leur comportement social leurs déficiences physiques, même s’ils n’enlèvent pas autant d’ectoparasites. Ils sont certes moins efficaces, mais ne sont pas rejetés pour autant. »

Les singes handicapés utilisent souvent leurs deux mains plutôt qu’une seule et sont plus lents. Cela signifie qu’ils enlèvent moins de lentes à leurs congénères, mais cela ne les rend pas moins désirables comme partenaires d’épouillage, ce qui montre que le toucher est aussi important que l’épouillage comme tel dans l’opération.

Sarah Turner étudie la même population de quelque 400 macaques au Centre des singes d’Awajishima, sur l’île d’Awaji, dans le sud du Japon, depuis 1999. Environ 17 % des singes recensés sont nés avec une malformation d’un membre, allant d’un doigt manquant aux deux mains manquantes. La cause de ces déficiences demeure inconnue, mais celles-ci pourraient être attribuables au patrimoine génétique limité de cette population isolée ou à la présence de pesticides dans sa nourriture et son environnement.