Cinq endroits ont été contaminés par la grippe aviaire en moins de deux semaines au Québec. « On n’est pas inquiets. On est paniqués », lance le président des Éleveurs de volaille du Québec (EVQ) qui redoute la multiplication des cas.

Mardi, deux importantes fermes de Saint-Alphonse-de-Granby, en Montérégie, se sont ajoutées à la liste des lieux infectés. Autour de 46 000 poulets et 30 000 poules pondeuses ont dû être euthanasiés à la première et 11 500 dindons ont été abattus à la deuxième.

Les deux fermes sont situées à moins de 2,5 km l’une de l’autre, mais elles appartiennent à des propriétaires différents.

« Ça signifie, un peu comme à Valcartier cet été, qu’il y a eu présence d’oiseaux malades dans l’environnement de ce secteur », explique Pierre-Luc Leblanc, président des Éleveurs de volailles du Québec. À Valcartier, au nord de la ville de Québec, cinq fermes ont été contaminées par l’influenza aviaire et 90 000 dindes ont été euthanasiées entre le 28 juin et le 1er août.

Le virus de la grippe H5N1 est principalement transporté par les oiseaux migrateurs et transmis aux espèces sauvages locales. Le virus comporte très peu de risque pour l’humain, mais il est hautement contagieux et mortel pour les volailles.

Depuis le début de l’année, plus de trois millions d’oiseaux ont été abattus au Canada afin d’éviter la propagation de la pandémie.

« C’est vraiment difficile de comprendre comment la maladie a pu entrer dans les fermes. Les producteurs changent de vêtements avant d’entrer dans leurs bâtiments, ils changent de bottes, ils désinfectent leurs rangs d’élevage. Malgré toutes les mesures, le virus réussit quand même à entrer. C’est vraiment inquiétant », note M. Leblanc. Les éleveurs sont d’ailleurs plus vigilants que jamais, puisqu’ils voient la flambée de cas ailleurs au Canada et aux États-Unis, ajoute-t-il.

La situation est d’autant plus préoccupante que Saint-Alphonse-de-Granby figure parmi les trois régions — avec Saint-Hyacinthe et Saint-Félix-de-Valois — comptant le plus de fermes de poulets et de dindes de la province. Dans un rayon de 10 km autour des deux établissements infectés, on recense 200 bâtiments d’élevage d’oiseaux ou de ponte, selon EVQ.

M. Leblanc parle de « catastrophe financière » pour les producteurs. Lorsqu’un cas de grippe aviaire est détecté dans une ferme, de deux à trois mois sont nécessaires afin d’abattre les bêtes, les composter et désinfecter les lieux. L’Agence canadienne d’inspection des aliments (ACIA) peut étirer ce délai si la pandémie se répand à d’autres fermes de la région.

Répercussions sur les autres

Les cas de grippe aviaire à Saint-Alphonse-de-Granby affectent indirectement tous les producteurs de volaille de la région. Mercredi, une partie des oiseaux de la Ferme Gilles Brodeur devaient partir vers l’abattoir, mais l’ACIA a demandé aux propriétaires d’attendre à vendredi afin de pouvoir tester les animaux. Il faut dire que la ferme est située exactement entre les deux lieux infectés.

« Une analyse doit être faite sur les oiseaux, mais ça augure bien », affirme Patrice Brodeur, l’un des propriétaires de l’entreprise familiale.

Depuis le début de la semaine, l’entrée pour accéder au terrain de la Ferme Gilles Brodeur est protégée par une chaîne afin de contrôler la venue de visiteurs. Les roues des camions de livraison doivent aussi être désinfectées à leur arrivée et à leur départ des lieux.

« Il y a plus de livraisons qu’on pourrait le croire dans une ferme. Il y a les livraisons de moulée pour les oiseaux. Certaines fermes peuvent aussi avoir des livraisons de propane ou de diesel », explique M. Brodeur. « Le principe de la désinfection, c’est que tout ce qui touche au sol, ça ne doit pas entrer dans le camion. »

En temps normal, lorsque les oiseaux partent pour l’abattoir, leur bâtiment reste vide deux ou trois jours. Dans le contexte actuel, M. Brodeur ignore s’il pourra relancer un nouveau cycle de production dès la semaine prochaine. Il attend de voir l’évolution des cas dans la Haute-Yamaska et la réponse de l’ACIA.

« On n’est pas si inquiets parce qu’on n’a pas le contrôle sur le virus », tente de relativiser M. Brodeur. « Mais des oiseaux sauvages, c’est vrai qu’il y en a beaucoup dans le coin », ajoute-t-il d’une voix pas si rassurée.

En savoir plus
  • Le Québec est le 2e producteur de volaille au Canada après l’Ontario, tant pour la production de poulets que pour celle de dindons.​
    Ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec