(Montréal) Dans une cause reliée au temps supplémentaire des infirmières, le tribunal vient d’ordonner à des infirmières de l’urgence de l’Hôpital de Mont-Laurier de cesser de refuser de façon concertée de faire leur prestation normale de travail.

C’est le CISSS des Laurentides (Centre intégré de santé et de services sociaux) qui avait demandé l’intervention du Tribunal administratif du travail, après le « sit-in » de sept infirmières de l’urgence de cet hôpital, qui avaient refusé de débuter leur quart de travail. Il alléguait aussi qu’elles avaient refusé, de façon concertée, de donner leurs disponibilités pour du travail en heures supplémentaires.

Le CISSS n’a eu gain de cause qu’en partie.

Le Tribunal administratif du travail a jugé que le refus de faire sa prestation normale de travail constituait un « moyen de pression illégal ».

Il a donc ordonné aux infirmières de l’urgence de l’Hôpital de Mont-Laurier de « cesser immédiatement de refuser de façon concertée de fournir leur prestation usuelle de travail ».

Le Tribunal n’a toutefois pas donné gain de cause au CISSS concernant le refus de faire des heures supplémentaires.

Il a estimé qu’à ce sujet, la preuve était insuffisante puisqu’elle reposait sur du ouï-dire. Il s’agissait d’un témoin qui disait avoir entendu une conversation qui lui avait permis de conclure qu’un refus de faire des heures supplémentaires volontaires se préparait le 13 juillet.

La décision du Tribunal administratif du travail a été déposée devant la Cour supérieure, ce qui lui donne le même poids. Ainsi, « elles sont conséquemment susceptibles d’outrage au tribunal en cas de contravention » à l’ordonnance.

« Tout le monde est épuisé »

En entrevue avec La Presse Canadienne, Julie Daignault, présidente du Syndicat des professionnelles en soins des Laurentides, de la FIQ, a dénoncé la situation. « Tout le monde est épuisé. Tout le monde a travaillé longuement pendant la pandémie. »

« On est présentement devant une situation qui est très critique. L’employeur continue de gérer les horaires avec des temps supplémentaires et des temps supplémentaires obligatoires. Il force nos membres à rentrer travailler malgré leur épuisement », a-t-elle critiqué.

Mme Daignault concède qu’il y a pénurie d’infirmières, mais elle affirme qu’il y a là aussi un problème de gestion des horaires, d’affichage de postes qui soient intéressants et de recours trop fréquent aux heures supplémentaires.

« Je sais que je ne le vis pas seulement à Mont-Laurier, qu’on le vit partout dans les Laurentides et au Québec », ajoute la dirigeante régionale de la FIQ (Fédération interprofessionnelle de la santé).

« Si on continue comme ça, à obliger des professionnelles en soins à faire du temps supplémentaire obligatoire, on s’en va vers des gens qui vont tomber en maladie, qui vont démissionner et vouloir faire autre chose », prévient Mme Daignault.

Version du CISSS

Le CISSS des Laurentides, de son côté, a soutenu qu’il n’avait guère le choix d’agir comme il l’a fait, parce qu’il doit veiller à la continuité des soins pour le public.

« Il est vrai que la situation actuelle peut être difficile pour nos équipes de soins. Cependant, il est essentiel pour nous que les usagers demeurent au cœur des décisions. Nous avons tous la responsabilité de collaborer dans la mise en place de solutions au bénéfice de nos usagers et de notre personnel », a-t-il fait savoir, par courriel.

Le CISSS des Laurentides fait valoir que « le sit-in à l’Hôpital de Mont-Laurier survient après celui ayant eu lieu à l’Hôpital régional de Saint-Jérôme ».

Il ajoute que « tout arrêt de travail concerté, comme le cas du sit-in à l’Hôpital de Mont-Laurier, est une grève illégale. Le personnel du quart de soir, anticipant qu’une ressource manquerait pour le quart de nuit et que du temps supplémentaire obligatoire pourrait être requis, a tenu un sit-in. Les employés ont donc réagi avant même que l’employeur puisse agir et trouver une solution à cette situation précise qui aurait pu survenir 8 hplus tard ».

Le CISSS se dit ouvert à chercher des solutions aux problèmes soulevés par le syndicat de la FIQ. « Nous souhaitons envoyer un signal clair : il y a d’autres voies pour améliorer la situation, soit celle de la communication et collaboration. »

« En aucun temps nous n’avons été passifs face à la situation à l’Hôpital de Mont-Laurier. Depuis le 10 mai dernier, une cellule de crise est active et déjà un grand nombre d’actions ont été déployées. La révision des corridors de services, la modulation des lits disponibles en fonction des ressources, la couverture de quarts de travail par d’autres équipes au CISSS des Laurentides qui libèrent du personnel pour donner un coup demain ne sont que quelques exemples de ce qui est déjà en place », conclut le CISSS.