(Montréal) Pour les jeunes enfants, le fait de participer à des sports organisés de façon continue est lié à une meilleure santé émotionnelle lorsqu’ils atteignent l’âge de 12 ans, conclut une récente étude menée sur de petits Québécois.

Intuitivement, les parents savent que le sport est bon pour leurs enfants.

Mais ici, des chercheurs montréalais ont voulu évaluer et mesurer l’impact des sports organisés sur le niveau de détresse psychologique des adolescents.

Il est question ici d’activités sportives supervisées par un entraîneur, qu’il s’agisse de sports de groupe comme le soccer, ou d’un sport individuel comme le tennis — pratiqués de façon régulière entre les âges de 6 et 10 ans.

Leur but était de voir si la participation sportive soutenue contribuait à réduire les difficultés émotionnelles au-delà d’autres caractéristiques des enfants et de leur famille.

Le résultat ? Ces enfants sont plus disposés à avoir une meilleure santé mentale à l’âge de 12 ans, ce qui veut dire moins de détresse émotionnelle, moins de timidité, de retrait et d’anxiété sociale, a expliqué en entrevue avec La Presse canadienne Linda Pagani, chercheuse au Centre de recherche du CHU Sainte-Justine et professeure titulaire à l’École de psychoéducation de l’Université de Montréal, qui a travaillé sur cette étude menée par son collègue de l’École de psychoéducation Frédéric N. Brière.

Selon elle, ces enfants vivent moins de détresse, car la pratique de ces sports apporte plusieurs enseignements. « On apprend à être en équipe, on apprend à écouter les consignes, à être plus collaboratif, plus coopératif. Toutes ces caractéristiques-là vont aider les enfants à long terme ». Un jour, ils seront au secondaire - une jungle sociale, dit-elle-et ensuite sur le marché du travail où ces qualités vont leur être fort utiles.

Car les activités de collaboration et de coopération amènent les jeunes à développer une foule de choses dont des compétences sociales qui sont liées à la santé mentale. Cela leur apprend à ne pas s’isoler et parfois à foncer même quand ils ne se sentent pas bien.

« C’est très important, dit-elle : surtout dans cette “culture d’écran” ».

« Les enfants passent tellement de temps seuls devant leurs écrans qu’ils sont moins rodés sur le plan des interactions sociales ». Si ces interactions sont moins satisfaisantes, cela peut entraîner le jeune dans un engrenage qui vient avec son lot de conséquences, dont la détresse émotionnelle, souligne la chercheuse.

Pour en arriver à ces conclusions, la vie de quelque 1490 enfants québécois, vivant un peu partout dans la province, a été examinée. Ceux-ci font partie de la cohorte d’enfants nés en 1997-1998 et suivis dans le cadre d’une étude longitudinale publique coordonnée par l’Institut de la statistique du Québec (ISQ). Ils ont été observés sur une base régulière, avant qu’ils commencent le sport et après, afin de considérer toutes les possibilités, dit Mme Pagani.

La participation à des activités physiques organisées a été rapportée par les mères des enfants — et les pères ou partenaires. La détresse émotionnelle, l’anxiété, la timidité et le retrait social des enfants à 12 ans ont été relevés par leurs enseignants.

Mme Pagani confirme avoir été en mesure d’éliminer d’autres variables positives ou négatives pouvant expliquer ces résultats, comme un milieu familial stable par rapport à un qui ne le serait pas ou encore des événements traumatiques dans la vie de l’enfant comme un deuil ou le divorce de ses parents. Il a été possible d’« isoler la variable sport », affirme-t-elle.

« On a pu contrôler les explications alternatives », dit l’experte, habituée à créer des études aux données multiples et complexes. Ainsi, elle assure avoir pu éliminer la possibilité selon laquelle les enfants déjà anxieux ou timides auraient évité les activités sportives organisées entre 6 et 10 ans, justement en raison d’une fragilité émotionnelle pré-existante — ce qui aurait pu fausser les résultats.

L’effet statistique de la participation sportive stable entre 6 ans et 10 ans sur la santé mentale est considéré comme modéré, tenant compte de toutes les variables contrôlées dans l’étude, précise-t-elle.

Pour elle, ces résultats de recherche permettent de dire aux parents : « investir dans le sport est aussi important que d’investir dans la scolarité des enfants ». On veut qu’un jeune devienne compétent sur le plan académique, mais aussi sur le plan social.

« L’adaptation émotionnelle au moment de la transition du primaire au secondaire est particulièrement importante pour les enfants, qui s’apprêtent à entrer dans un univers plus vaste, plus complexe et plus exigeant. Notre étude soutient les recommandations canadiennes en matière d’activité physique chez les enfants », rapporte de son côté Frédéric N. Brière dans un communiqué.

L’étude a été publiée dans la revue scientifique Pediatric Research.