Priver les nouveaux arrivants de la carte soleil pendant trois mois est discriminatoire, conclut la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (CDPDJ). Elle demande à Québec d'abroger ce délai de carence prévu à l'assurance maladie ou à tout le moins d'offrir une couverture temporaire à un coût raisonnable.

Le ministre de la Santé et des Services sociaux, Réjean Hébert, entend «changer la formule actuelle» et n'écarte pas l'idée d'éliminer le délai. «L'objectif était d'éviter les abus du système, pas de faire de la discrimination dans l'accès aux soins», a-t-il affirmé à La Presse, hier.

La règle du délai de carence a été instaurée en 2001. Pauline Marois, ministre de la Santé à l'époque, en avait préparé la première mouture.

En vertu de cette règle, une personne qui arrive au Québec pour y résider ou qui y revient après un long séjour à l'étranger n'a pas accès au régime public d'assurance maladie pendant trois mois. Quelques exceptions existent.

Exclusion

Opposée à cette règle, l'Alliance des communautés culturelles pour l'égalité dans la santé et les services sociaux (ACCESSS) a demandé à la CDPDJ de se pencher sur la question. Dans un avis rendu public hier, elle soutient que le délai de carence «va à l'encontre de la Charte des droits et libertés de la personne». «Cette exclusion est indirectement fondée sur l'origine nationale ou ethnique puisque la vaste majorité des nouveaux arrivants dans la province qui la subit ne sont pas des citoyens», souligne-t-elle.

De 2002 à 2012, 86% des nouveaux arrivants ont été soumis au délai de carence. L'année dernière, 6664 citoyens canadiens et 11 240 résidents temporaires et non-résidents étaient touchés.

Selon la Commission, les droits à la sûreté, à l'intégrité et à la dignité des personnes sont également violés. Pour un nouvel arrivant, «c'est très difficile d'obtenir une assurance privée, et si on peut l'obtenir, c'est souvent à un coût prohibitif», a expliqué Daniel Carpentier, directeur adjoint à la recherche de la CDPDJ.