Esther Gaudreault, 54 ans, a reçu un diagnostic de cancer du sein en juillet 2008. Après avoir subi une mastectomie partielle, six traitements de chimiothérapie et 16 traitements de radiothérapie, elle croyait être «sortie du bois».

Aujourd'hui, la Montréalaise qui a été soignée à l'hôpital Maisonneuve-Rosemont est inquiète. Elle fait partie des 9463 Québécoises qui seront jointes d'ici le mois d'août pour se faire indiquer si leurs tests de pathologie liés au traitement du cancer du sein devront être analysés de nouveau. Des femmes qui ignorent pour l'instant si elles ont reçu le bon traitement.

En plus d'être inquiète, Mme Gaudreault est surtout «profondément en colère» contre les docteurs Gaétan Barrette et Louis Gaboury qui ont, à son avis, «semé la panique» en raison de la manière dont ils ont informé la population sur les erreurs possibles dans des laboratoires de pathologie au Québec. Sa colère est aussi dirigée vers le ministre de la Santé, Yves Bolduc, pour la façon dont il a géré la crise.

«On a joué au yoyo avec les émotions des femmes et on continue à le faire. Quand on sait dans quel état de fragilité on se retrouve dans les mois qui suivent le traitement, une telle attitude est tout simplement indécente !» estime Mme Gaudreault, qui songe à porter plainte au Collège des médecins.

Parmi les 9463 Québécoises qui ont reçu un diagnostic de cancer du sein entre avril 2008 et juin 2009, de nouvelles analyses sur des tests de pathologie seront faites pour 2730 femmes, selon le ministère de la Santé.

Comme le recommandait le ministre Bolduc, Mme Gaudreault a téléphoné à Info-Santé à la suite d'un reportage en mai dernier qui portait sur les résultats de l'étude du Dr Gaboury au sujet des erreurs possibles dans les résultats des tests pour le traitement de cancer du sein. «La pauvre infirmière d'Info-Santé n'avait aucune information. Ça m'a donné plus d'inquiétude plutôt que de me rassurer», souligne-t-elle.

Le CHUM, Maisonneuve-Rosemont et Sacré-Coeur sont les hôpitaux montréalais visés par la révision des tests, a révélé le ministre Bolduc, hier. Mme Gaudreault a reçu le résultat non concluant d'un premier test du marqueur biologique HER-2 réalisé à l'hôpital Maisonneuve-Rosemont. Puis, un second test a été fait au CHUM. Il s'est avéré négatif.

«Quand j'ai parlé à mon médecin, il m'a répondu que mes tests avaient été envoyés au CHUM, dans le laboratoire du Dr Gaboury. Je me disais que c'était correct. Après tout, c'est le médecin qui est l'auteur de l'étude sur les tests erronés. Aujourd'hui, je ne sais plus», raconte la quinquagénaire directrice générale de l'Association francophone pour le savoir.

Dominic Brûlé, mère de famille de 42 ans, a aussi été traitée au CHUM pour un cancer du sein durant la période visée par la révision des tests. Cette mère de trois enfants avait également été rassurée par le personnel soignant. «Être soignée au CHUM me réconfortait. Je me disais que j'étais au meilleur endroit au Québec. Si j'étais dans un hôpital de région, ce serait autre chose. J'ai d'autant plus été surprise ce matin (hier)», indique cette Montréalaise.

Mme Brûlé a reçu le diagnostic en septembre dernier. «C'est pratiquement sûr que je suis parmi les femmes visées», dit celle qui se promet de joindre son infirmière pivot dès aujourd'hui pour en savoir plus. Comme Mme Gaudreault, son test pour les récepteurs hormonaux s'est avéré positif, mais pas celui du marqueur HER-2.

«Quand tu reçois tes résultats de tests, et que le HER-2 est négatif, tu es soulagée. Tu te dis : "Ouf, je n'aurai pas ça en plus". Ton cancer n'est donc pas le plus agressif et tu n'as pas à prendre un médicament supplémentaire avec beaucoup d'effets secondaires (l'Herceptin)», souligne d'ailleurs Mme Gaudreault.

Les chiffres révisés à la hausse par le Ministère - 600 patientes de plus - ont aussi inquiété des patientes traitées pour un cancer du sein dans d'autres hôpitaux de la région montréalaise. Et ce, même s'il n'y a que trois hôpitaux visés par cette révision. C'est le cas de Guylaine Couture, 32 ans, qui a reçu son diagnostic à l'hôpital Pierre Le Gardeur à Terrebonne en mai 2008. Son test HER-2 était-il un faux négatif ? se demande-t-elle aujourd'hui. «Mon oncologue m'a rassurée, mais un doute subsiste. J'ai quand même peur que le téléphone sonne et qu'on me dise qu'on doit tout recommencer», dit-elle.