(Montréal) Un important incendie de forêt progresse très rapidement au Lac-Saint-Jean, ravageant 58 000 hectares, une superficie qui a presque doublée en 24 heures, et qui a forcé les autorités à faire évacuer un large périmètre.

« Les vents ont changé de direction, si bien que le feu a pris une croissance dans sa largeur. Il est descendu jusqu’à la centrale Péribonka IV d’Hydro-Québec », a précisé en entrevue à La Presse canadienne samedi après-midi Josée Poitras, agente à la prévention et aux communications de la Société de protection des forêts contre le feu (SOPFEU).

La centrale hydroélectrique n’est pas menacée pour le moment, bien que les flammes se trouvent à 1,2 km de l’infrastructure, a insisté Mme Poitras en ajoutant que de l’arrosage est effectué et que la centrale est dégagée de la forêt.

L’installation de la société d’État est en soi bien protégée dans sa conception puisqu’elle est souterraine, autrement dit, elle est construite à même le roc.

La centrale a été mise en dormance par mesure préventive, a indiqué Maxence Huard-Lefebvre, un porte-parole d’Hydro-Québec.

M. Huard-Lefebvre assure qu’il n’y a « absolument aucun » risque pour l’alimentation électrique au Québec. « Les centrales hydroélectriques au Québec sont interreliées sur le réseau, a-t-il expliqué. Une centrale n’est pas associée à des clients en particulier. »

Hydro-Québec, qui détient une entente avec la SOPFEU pour protéger ses actifs quand les incendies de forêt s’approchent à moins de 5 km, continue à suivre la situation et anticipe que les vents tournent bientôt.

Chalets menacés

L’incendie est hors de contrôle depuis mardi.

« C’est parti à peu près au nord de Dolbeau-Mistassini, dans le secteur de Chutes-des-Passes, et il se dirige vers le Saguenay, vers les Monts-Valin, pour donner une image au public » a illustré, Mme Poitras.

Une centaine d’employés de la SOPFEU, dont 49 pompiers forestiers sont mobilisés depuis samedi matin et des renforts ont été demandés aux autres bases de la SOPFEU dans l’ensemble du Québec.

Selon Josée Poitras, l’incendie de forêt menace des zones de villégiatures où se trouvent des chalets. D’ailleurs, une interdiction de circuler en forêt a été ordonnée vendredi soir, dans la zone touchée, par le ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs, a précisé la porte-parole de la SOFEU.

« Il y a beaucoup de chalets dans le secteur et les deux MRC touchées, la MRC Maria-Chapdelaine et la MRC du Fjord-du-Saguenay, font des pieds et des mains depuis le début de cet incendie pour joindre les propriétaires de ces chalets-là […] Il y a des chalets qui ont brûlé. Heureusement, il n’y a aucune victime. Personne n’a été coincé dans le feu », a souligné Mme Poitras.

Des avions-citernes de la SOPFEU et des hélicoptères sont encore mis à contribution samedi. Le mercure va monter jusqu’à 32 degrés Celsius samedi à Dolbeau-Mistassini, mais la chaleur ressentie avec le facteur humidex sera plutôt de 40 degrés, selon les prévisions d’Environnement Canada, ce qui va compliquer le travail des pompiers.

« Le temps est sec et a asséché le combustible et le combustible, c’est une forêt boréale, donc du résineux qui s’enflamme très rapidement », a-t-elle précisé.

« La tête du feu est très agressive et le feu poursuit sa progression. Les pompiers vont procéder à l’extinction de certaines bordures du feu et protéger aussi des infrastructures. Il y a le pont de la rivière au Serpent, qui est stratégique, et il y a toujours une protection qui est faite par les pompiers. »

Le météorologue d’Environnement Canada Alain Roberge rapporte que le temps chaud et plutôt sec est là pour rester, malgré les précipitations attendues plus tard samedi dans le secteur.

Celles-ci risquent de ne pas être en quantité suffisante pour offrir un répit aux pompiers, soutient-il.

« Le pire, c’est que lorsque les premières averses arrivent, elles sont souvent accompagnées d’orages. Donc même si la pluie est au rendez-vous, les orages peuvent créer de nouveaux feux. »

Le Lac-Saint-Jean fait également l’objet d’un avertissement de smog, en raison de la fumée qui se dégage de l’incendie et qui mine la qualité de l’air dans les alentours.

Vendredi soir, le premier ministre du Québec a exprimé ses inquiétudes concernant la situation sur Twitter.

« L’incendie de forêt déclenché au Lac-Saint-Jean nous préoccupe grandement », a indiqué François Legault dans un gazouillis.

« Notre priorité : la sécurité des Québécois dans les zones à proximité. Nous suivons ça de près », a-t-il ajouté.

Le feu pourrait s’approcher dans les prochains jours de la centrale de la Péribonka d’Hydro-Québec.

Autre feu dans le Bas-Saint-Laurent

Un feu de tourbière rapporté à 15 h vendredi a aussi mobilisé des équipes de la SOPFEU à Rivière-Ouelle, dans le Bas-Saint-Laurent. Des avions-citernes ont aussi été appelés à combattre les flammes qui ont ravagé 15 hectares.

Une vingtaine de pompiers forestiers ont été déployés samedi matin et des pompiers municipaux leur prêtent main-forte.

Début de saison difficile

Treize incendies de forêt sont en activité au Québec.

La SOPFEU a déjà combattu 435 incendies cette année, soit deux fois plus que la moyenne à cette date depuis les dix dernières années.

« Très tôt en début de saison il y avait des interdictions de faire des feux à ciel ouvert », a souligné Josée Poitras, ce qui est d’ailleurs toujours le cas dans plusieurs régions du Québec.

Contrairement à ce qu’on pourrait penser, la foudre n’a été qu’à l’origine de trois incendies depuis le début de l’année, « 99 % de ces feux étant de cause humaine », selon les statistiques dévoilées par la porte-parole de la SOPFEU.