Dans son autobiographie à paraître dans trois semaines, l'ancien premier ministre Paul Martin règle longuement ses comptes avec son prédécesseur, Jean Chrétien.

La version non-corrigée du livre de 555 pages intitulé Contre vents et marées, que publiera la maison Fides, a été obtenue par Le Devoir.Paul Martin consacre plusieurs chapitres à sa course au leadership de 1990, celle, larvée, en vue de remplacer Jean Chrétien, ainsi que les deux années passées dans le siège de premier ministre. «Le Devoir» rapporte qu'il en veut à Jean Chrétien d'avoir fait primer la rivalité sur le bien du Parti libéral (PLC).

Un chapitre entier du livre porte sur le scandale des commandites. Pour Paul Martin, Jean Chrétien a voulu lui nuire en n'affrontant pas lui-même la tempête. Il l'accuse d'avoir retardé la publication du rapport de la vérificatrice générale Sheila Fraser jusqu'à ce que M. Martin le remplace à la tête du gouvernement.

Paul Martin écrit aussi que ses intentions ont souvent été mal interprétées par M. Chrétien. Les tentatives de renversement qu'on lui imputait n'étaient souvent, à son avis, que des maladresses.

Paul Martin confirme dans son livre qu'il a appris à la radio son expulsion du cabinet, en juin 2002 et que John Manley était assermenté comme ministre des Finances.

Paul Martin croit que l'une des décisions les plus inexplicables de Jean Chrétien a été de limiter à 5000 $ les sommes qu'un militant ou une entreprise peut verser à une formation politique. M. Martin considère que cela a entravé la marche du Parti libéral et a profité au Parti conservateur.

Paul Martin reproche aussi à M. Chrétien d'avoir laissé entendre que c'est à cause de son indécision chronique que le Canada s'est retrouvé dans la région si dangereuse de Kandahar, en Afghanistan. Il soutient qu'il aurait été impossible de déployer les troupes canadiennes plus tôt et que le Canada avait avantage à tirer profit de la chaîne d'approvisionnement déjà installée en Afghanistan.

M. Martin estime que si la mission est devenue si dangereuse c'est parce que le nouveau gouvernement conservateur a voulu défricher par les armes trop de territoire avant d'en avoir conquis les coeurs et les esprits.

À propos du référendum sur la souveraineté du Québec, en 1995, Paul Martin appréhendait un scénario catastrophe. L'ancien ministre des Finances signale qu'à l'époque, une bonne partie de la dette du Canada se trouvait dans des titres à court terme qui étaient exposés à une hausse très rapide des hausses des taux d'intérêt. Or, l'échéance de la plupart de ces prêts suivait de peu la tenue du référendum, ce qui aurait pu créer une importante crise de liquidités.

Enfin, l'obsession de Paul Martin pour les consultations l'auront suivi jusque dans la rédaction de ses mémoires. Il raconte en prologue qu'il ne s'est pas contenté de prendre la plume; il a consulté une quarantaine de personnes.