Une tragique histoire d'amour et de violence connaîtra son dénouement aujourd'hui, lorsque la cour fixera la peine d'un infirmier qui aurait enduré coups, injures et agressions de la part de son amant avant de répliquer de la pire façon possible: en l'étranglant à mort.

«Les mots ne peuvent exprimer mon chagrin et mes regrets. Je ne peux pas le ramener. J'espère que ceci aidera la famille à guérir. J'accepte la responsabilité. J'accepte la punition de la cour. Rien de ce que je pourrais dire ne changera ce qui est arrivé», a lancé hier Michael-Andrew Garreau, en larmes, lors des plaidoiries sur la peine.

Sa famille dévastée l'écoutait dans la salle. Sur un téléviseur, il voyait aussi la mère et les frères de sa victime, qui écoutaient à partir d'Israël, où ils habitent.

Garreau, 36 ans, a avoué au début du mois qu'il a étranglé son conjoint Eran Allon, 29 ans, au terme d'une de leurs nombreuses disputes, en janvier 2010.

D'abord accusé de meurtre non prémédité, il a pu s'entendre avec la Couronne pour plaider coupable à une accusation d'homicide involontaire.

L'accusé a été décrit par sa mère, deux ex-conjoints et même la famille de sa victime comme quelqu'un d'aimable, allergique aux conflits, raffiné, intellectuel, serviable. Il était très engagé dans les associations d'infirmiers et le regroupement international des étudiants en soins infirmiers, dont il a été président.

C'est lors d'un voyage en Israël qu'il avait rencontré Eran Allon.

«Les deux s'aimaient beaucoup. Malheureusement, ça s'est terminé avec cette tragédie», a résumé l'avocat de Garreau hier.

Selon un rapport psychiatrique déposé en preuve, Garreau vivait mal avec la consommation d'alcool et de drogue de son conjoint, ses virées dans les clubs, ses excès de colère. Allon l'avait déjà menacé d'un couteau. Il avait saccagé la chambre d'hôtel lors d'un voyage du couple à Amsterdam. Il avait frappé et avait brisé son ordinateur lors d'une dispute. Il l'avait même déjà poussé en bas d'un balcon. Il avait refusé de passer un test de dépistage du VIH après l'avoir trompé.

Dans un courriel déposé en preuve, Garreau avait expliqué qu'il aimerait faire découvrir à son conjoint la vie tranquille avec un seul partenaire, loin des bars et des aventures d'un soir. «Quand tu es soûl, tu deviens méchant et abusif, et ça m'a fait peur», avait-il écrit.

Le rapport ne relève aucun historique de violence de la part de Garreau avant le jour du drame.

Ce soir-là, le couple avait pris une chambre d'hôtel au centre-ville de Montréal. Les deux hommes avaient consommé de l'alcool et des médicaments sous ordonnance.

Toujours selon le rapport psychiatrique et le témoignage de l'accusé, Allon aurait craché sur Garreau, lui aurait donné un coup de pied alors qu'il gisait au sol, l'aurait injurié. Garreau s'est réfugié dans la salle de bains. Allon a défoncé la porte.

Garreau raconte avoir voulu calmer son conjoint en l'embrassant. Celui-ci l'aurait mordu à la lèvre, au point où il a dû être traité à l'hôpital pour une sérieuse blessure.

L'accusé avoue avoir réagi fortement à la morsure. Il aurait commencé à étrangler son conjoint, pour se défendre, dit-il. Ses souvenirs sont flous par la suite. Le psychiatre croit que les médicaments et l'alcool ont pu l'empêcher d'avoir conscience de la portée de ses actes.

Un pathologiste a déterminé que la victime a été étranglée avec les mains, mais aussi une autre partie du corps, comme un pied ou un avant-bras, jusqu'à ce que mort s'ensuive.

Garreau aurait ensuite caché le corps dans une valise qu'il a abandonnée près des rues De Bullion et Charlotte, au centre-ville de Montréal. Il a fui à Ottawa, où il s'est livré à la police le lendemain de la découverte du cadavre.

La Couronne et la défense se sont entendues pour suggérer une peine de 12 ans de pénitencier, moins le temps passé en détention préventive, qui comptait en double en vertu de la législation de l'époque du crime. Il resterait donc neuf ans et quatre mois à purger.

Le juge Jean-Guy Boilard n'est toutefois pas obligé de suivre la recommandation des parties.