Espérant que son certificat de sécurité soit révoqué dès aujourd'hui, le Montréalais Adil Charkaoui réclame au gouvernement fédéral des excuses officielles et n'exclut pas de poursuivre Ottawa en justice.

«La question n'est pas écartée. En ce moment, mes avocats étudient toutes les avenues juridiques», a répondu M. Charkaoui en conférence de presse, hier, alors qu'on lui demandait s'il allait intenter une poursuite au civil pour obtenir une compensation financière.«Quand on vous enlève votre permis d'enseignement, quand on envoie de fausses allégations sans preuve à toutes les agences étrangères à travers le monde, qu'on m'empêche de travailler, que je passe 21 mois en prison, que je sois stigmatisé de la sorte, que je ne puisse plus retourner dans mon pays d'origine, moi je pense que ça mérite une compensation», a-t-il dit.

Le Montréalais d'origine marocaine était à Ottawa, hier, pour réclamer des excuses au gouvernement, qui l'a arrêté, emprisonné, puis mis en liberté avec l'obligation de respecter de nombreuses conditions, dont le port d'un émetteur GPS à la cheville, en raison du certificat de sécurité délivré contre lui.

Après six ans de bataille judiciaire, la juge Danièle Tremblay-Lamer, de la Cour fédérale, a ordonné jeudi dernier que M. Charkaoui recouvre complètement la liberté.

Deux ministres du gouvernement canadien, dans une lettre datée du 31 juillet, avaient eux-mêmes reconnu que la preuve était «insuffisante» contre M. Charkaoui, qu'Ottawa soupçonnait, en 2003, d'appartenir à Al-Qaeda. M. Charkaoui a toujours clamé son innocence et réclamé l'accès à la preuve détenue contre lui.

«Pendant six ans et demi, j'ai vécu avec l'étiquette de présumé terroriste alors que je n'étais même pas accusé; je ne veux plus vivre avec l'étiquette d'ex-présumé terroriste», a dit hier l'enseignant de 36 ans, père de trois enfants.

La juge Tremblay-Lamer doit entendre aujourd'hui, à huis clos, les avocats du gouvernement. Mais déjà, la semaine dernière, elle a annoncé que le certificat de sécurité contre lequel se bat M. Charkaoui depuis des années sera révoqué dans les prochaines semaines puisque rien ne le justifie.

En 2007, le Canadien d'origine syrienne Maher Arar, détenu et torturé sous de fausses accusations en Syrie, a obtenu des excuses officielles du premier ministre Stephen Harper, en plus d'une compensation financière de 10,5 millions de dollars.

Au moment où M. Charkaoui a recouvré la pleine liberté, la semaine dernière, un autre Canadien, Abousfian Abdelrazik, a annoncé qu'il intentait une poursuite de 27 millions contre Ottawa pour avoir été retenu injustement au Soudan pendant six ans.