(Ottawa) Le chef de Bearskin Lake a lancé vendredi un appel à l’aide : la communauté autochtone éloignée, dans le nord de l’Ontario, est « presque à un point de rupture » : la moitié de la population a été déclarée positive.

Le chef Lefty Kamenawatamin s’est joint à d’autres dirigeants autochtones dans une conférence de presse, vendredi, pour demander à Ottawa d’envoyer une aide de toute urgence — notamment du personnel pour livrer aux citoyens des fournitures essentielles comme de la nourriture, de l’eau et du bois de chauffage, par un temps polaire.

Les dirigeants autochtones ont critiqué les retards du gouvernement fédéral dans l’envoi de l’aide — l’un d’eux a affirmé que les Autochtones étaient réduits à « mendier dans leur propre pays ».

La communauté oji-crie de Bearskin Lake, dans le nord-ouest de l’Ontario, a déclaré l’état d’urgence sanitaire la semaine dernière. Le coronavirus a infecté 201 de ses 400 résidents, dont des aînés et un bébé de neuf mois. À cause de l’ampleur de l’éclosion, une grande partie de la communauté est en isolement et il n’y a pas assez de travailleurs pour assurer les services essentiels, y compris la distribution aux ménages de fournitures vitales.

Le chef Kamenawatamin a déclaré qu’environ 80 % de la population était vaccinée, mais il manque selon lui de trousses de dépistage, d’endroits pour s’isoler et d’autres fournitures essentielles.

Un porte-parole de la ministre fédérale des Services aux Autochtones, Patty Hajdu, a déclaré qu’une demande d’aide militaire avait été reçue jeudi soir par l’entremise du gouvernement de l’Ontario. « Le gouvernement fédéral travaille aussi rapidement qu’il le peut pour donner suite à une demande d’aide militaire », a indiqué Andrew MacKendrick.

Le chef Kamenawatamin a déclaré qu’il n’y avait désormais dans la communauté qu’une trentaine de travailleurs de première ligne capables de livrer de l’eau, des produits d’épicerie et d’autres fournitures essentielles aux personnes contraintes de s’isoler parce qu’elles, ou des proches, ont été déclarées positives.

Ottawa « se traîne les pieds »

Charles Fox, ancien grand chef de la nation Nishnawbe Aski et résident de Bearskin Lake, prévient que la COVID-19 se propage maintenant à d’autres communautés autochtones voisines du nord de l’Ontario. M. Fox a vivement critiqué ce qu’il a qualifié d’« attitude dédaigneuse » de la part des ministres fédéraux. « Les gens s’en foutent parce que nous sommes une Première Nation éloignée. Vérité et réconciliation, vous dites ? »

Selon lui, si cette éclosion avait eu lieu à Toronto, il y aurait un tollé national. Il a indiqué qu’un financement de 1,1 million avait été mis à disposition par le gouvernement fédéral, mais que cela ne couvrirait que le coût des avions nolisés pour cette communauté éloignée qui n’est accessible que par la voie des airs.

Le député néo-démocrate fédéral Charlie Angus, qui avait convoqué la conférence de presse de vendredi, a estimé qu’il « ne devrait pas être si difficile pour le gouvernement fédéral d’envoyer de l’aide » à cette communauté. « Les habitants de Bearskin Lake tentent désespérément d’obtenir des produits essentiels comme le bois pour chauffer les maisons et l’épicerie pour les personnes en isolement », a déclaré M. Angus. « Le gouvernement libéral doit cesser de se traîner les pieds et aider cette communauté de toute urgence. »

Le grand chef Derek Fox, de la nation Nishnawbe Aski, qui représente une cinquantaine de communautés du nord de l’Ontario, a déclaré que Bearskin Lake avait reçu des offres d’aide d’autres groupes autochtones, de médecins et de citoyens inquiets. Mais l’aide fédérale est essentielle, a-t-il dit, pour « réduire les formalités administratives » et agir au plus tôt.

Plus tôt vendredi, en conférence de presse à Ottawa, le ministre fédéral des Affaires intergouvernementales, Dominic LeBlanc, avait promis que son gouvernement ferait tout ce qui est en son pouvoir pour aider les communautés autochtones durement frappées par la COVID-19 comme celle de Bearskin Lake. M. LeBlanc a assuré que ses collègues ministres étaient en contact fréquent avec leurs homologues provinciaux pour coordonner l’aide fédérale.

Nicolas Moquin, porte-parole du ministère fédéral des Services aux Autochtones, a déclaré qu’il travaillait en étroite collaboration avec les dirigeants de Bearskin Lake et d’autres organismes locaux. Le ministère a indiqué qu’il avait déployé sur place une équipe d’intervention rapide, dont trois infirmières autorisées et un ambulancier paramédical. Trois infirmières d’autres communautés autochtones étaient également présentes, ainsi que trois personnes pour aider les membres de la communauté à couper du bois de chauffage, a-t-il ajouté.

Le ministre fédéral de la Santé, Jean-Yves Duclos, a déclaré de son côté que sa collègue Patty Hajdu était en contact quotidien avec les dirigeants des communautés autochtones pour s’assurer qu’elles disposent de suffisamment de tests de dépistage rapides, d’un soutien pour le traçage des contacts et de vaccins.