(Ottawa) Des citoyens ont manifesté dimanche dans les rues d’Ottawa pour réclamer la libération de Michael Kovrig et de Michael Spavor qui croupissent depuis 1000 jours dans des prisons chinoises distinctes.

Quelque 150 personnes se sont rassemblées dans la capitale. Ils ont marché pendant 90 minutes avant d’arriver dans un parc situé près de la Colline du Parlement. Ils cherchaient à imiter Michael Kovrig qui tente de faire chaque jour 7000 pas dans sa cellule étroite afin de maintenir son bien-être physique et mental.

« C’est long, 1000 milles. Cela nous use tous, mais plus particulièrement notre père », a déclaré Paul Spavor, le frère de Michael Spavor, qui était l’un des membres des deux familles qui ont marché en tête du cortège, tenant une bannière rouge sur laquelle on pouvait lire en blanc « #bringthemhome » et « #liberezles ».

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Paul Spavor et Vina Nadjibulla, le frère et la femme de Michael Spavor, et Ariana Botha, à droite, la sœur de Michael Kovrig, ont marché dimanche à Ottawa

« Nous pensons qu’il était important de marquer ce jour. Michael comprend bien l’ensemble de la situation. Il est plus prêt à nous laisser parler en son nom », a-t-il ajouté.

L’ambassadeur de Chine au Canada a déclaré que les manifestants et d’autres personnes nuisaient aux relations entre les deux pays et qu’ils portaient des accusations injustifiées contre son gouvernement.

Michael Kovrig, un diplomate canadien en congé qui travaillait auprès d’une organisation internationale, et Michael Spavor, un entrepreneur qui a tenté de nouer des liens avec la Corée du Nord, ont été arrêtés en représailles apparentes à l’arrestation par la GRC de la dirigeante de la multinationale chinoise Huaweile 1er décembre 2018 alors qu’elle transitait par l’aéroport de Vancouver.

La GRC a agi sur une demande d’extradition américaine parce que les États-Unis veulent poursuivre Meng Wanzhou, la directrice financière de Huawei Technologies, pour avoir enfreint les sanctions américaines contre l’Iran.

Neuf jours après l’arrestation de Meng Whanzhou, Michael Kovrig et Michael Spavor ont été arrêtés en Chine. Tous deux ont depuis été reconnus coupables d’espionnage devant des tribunaux chinois à huis clos – un processus qui, selon le Canada et des dizaines d’alliés, équivaut à une détention arbitraire pour de fausses accusations dans un système judiciaire fermé qui ne rend pas de compte.

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La Chine a nié ces accusations et accusé le Canada d’être le laquais du gouvernement américain, et a demandé à plusieurs reprises la libération immédiate de Meng Wanzhou. La Chine affirme que les États-Unis essaient simplement d’empêcher Huawei d’affirmer sa domination sur le marché international des télécommunications.

Les proches des deux hommes font pression pour une sorte de résolution politique qui pourrait les ramener à la maison.

« C’est une étape extrêmement difficile, mais que nous voulons marquer de cette manière, en partie, pour honorer la force et la résilience dont Michael et Michael Spavor ont fait preuve », a déclaré l’épouse de M. Kovrig, Vina Nadjibulla, dans une interview.

« Dans l’une de ses lettres, Michael avait dit que nous ne choisissions pas les circonstances. Mais nous avons le choix de la façon dont nous nous comportons dans ces circonstances. Et pendant 1000 jours, Michael a enduré cette injustice et sa détention avec une force remarquable, de la dignité et du caractère. »

L’ambassadrice d’Allemagne, l’ambassadeur de l’Union européenne et la haute-commissaire d’Australie ont participé à la manifestation, tout comme le conservateur Michael Chong et le libéral et ministre des Affaires étrangères sortant, Marc Garneau.

M. Garneau n’a pas précisé ce que faisait le Canada pour libérer les deux hommes, se contentant de dire qu’il continuait de se plaindre de leur détention arbitraire et exigeait leur libération. Le gouvernement continue de collaborer avec les États-Unis dans ce but.

« On se dirige dans une bonne direction, a lancé M. Garneau. Nous parlons à tout le monde. Je ne le dirais pas si ce n’était pas le cas. Nous progressons. Nous poursuivrons notre travail jusqu’à ce qu’ils soient libérés. »

La famille de Michael Spavor a gardé un profil bas, préférant les déclarations écrites aux interviews publiques, tandis que Vina Nadjibulla a fait part publiquement l’été dernier de ses préoccupations et a intensifié son plaidoyer public pour pousser les gouvernements canadien et américain à trouver un moyen de mettre fin à l’emprisonnement des deux Michael.

Cong Peiwu, ambassadeur de la Chine au Canada, a déclaré dans une interview que le fait de marquer les 1000 jours d’emprisonnement avait « gravement violé les normes régissant les relations internationales et le droit international ». Il a noté que Meng Wanzhou était en état d’arrestation au Canada depuis encore plus longtemps.

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« Récemment, nous avons noté qu’un petit nombre de personnes au Canada tentent d’attirer l’attention sur les prétendus 1000 jours de détention des deux Michaels, qui sont des citoyens canadiens, portant des accusations injustifiées contre la Chine dans cette affaire. »

Cong Peiwu a déclaré que son gouvernement s’en tenait à un rapport publié cette semaine par le Global Times, un journal contrôlé par le Parti communiste chinois, affirmant que Michael Spavor avait photographié du matériel militaire et partagé les images à l’extérieur du pays. Le rapport, citant des sources anonymes, a déclaré que Michael Spavor avait partagé des informations avec Michael Kovrig sur une longue période.

Vina Nadjibulla a réitéré son opinion de longue date selon laquelle ni Michael Kovrig ni Michael Spavor ne sont des espions, affirmant que l’allégation avait déjà été publiée par le passé. La famille et les amis de Michael Spavor ont affirmé dans des déclarations écrites qu’il ne faisait rien de mal en Chine et qu’il s’était engagé à construire des ponts avec la Corée du Nord.

Mme Nadjibulla a déclaré que les prochaines semaines et les prochains mois seront essentiels pour sortir de l’impasse. Le président américain Joe Biden et le premier ministre Justin Trudeau auront l’occasion de rencontrer le président chinois Xi Jinping à l’occasion des réunions d’automne du G20 et de la Conférence des Nations Unies sur les changements climatiques.

Elle a déclaré que les élections fédérales en cours n’avaient pas vraiment eu d’effet sur le sort des deux Michael.

« Ce n’est pas une question partisane. Cela me réconforte, a-t-elle déclaré. Les Canadiens de toutes les tendances politiques et tous les dirigeants politiques sont unis dans la façon dont ils considèrent cela comme une détention injuste et arbitraire et également dans leur appel à ce qu’ils reviennent au pays. »