«S'il est bien fait, l'abattage rituel n'est pas inhumain», affirme Joe Regenstein, professeur de sciences des aliments à l'Université Cornell. Joint hier par La Presse, l'expert a contredit l'ex-député péquiste André Simard, selon qui l'abattage halal, réalisé sans insensibilisation préalable de l'animal, heurte les valeurs des Québécois.

Au contraire, l'abattage religieux est probablement le plus humain de tous, estime M. Regenstein. S'il est pratiqué à la main, sans stress, en faisant perdre connaissance à l'animal le plus rapidement possible.

«Je pense que la plupart des critiques qui remettent en question le bien-être des animaux au moment de l'abattage religieux se basent sur de mauvaises données scientifiques ou sur des considérations politiques, sans rapport avec le bien-être animal», dit le professeur.

Le vendredi 26 octobre, à l'occasion de l'importante fête du sacrifice - ou Aïd -, plusieurs des 1,6 milliard de musulmans du monde vont égorger un animal selon le rituel halal. Ce type d'abattage choque les Occidentaux, peut-être par méconnaissance des pratiques séculières, note M. Regenstein.

Le professeur a demandé à ses étudiants quelle méthode ils jugeaient la plus humaine: l'usage d'un pistolet à tige qui perfore le crâne, un pistolet qui étourdit sans faire de perforation, l'asphyxie par gaz, l'électrocution (quatre méthodes qui sont employées dans nos abattoirs pour insensibiliser les bêtes) ou l'égorgement avec un couteau tranchant. C'est ce dernier choix, correspondant au rituel religieux, qui a obtenu le plus de votes.

Les autres méthodes ne sont ni parfaites ni immédiates: 16% des bovins ne perdent pas connaissance du premier coup avec le pistolet perforant, a rapporté Le Nouvel Observateur.

Les communautés - tant juives que musulmanes - ne font cependant pas toujours l'abattage correctement, déplore M. Regenstein. Des études ont d'ailleurs comparé de mauvais abattoirs religieux à de bons abattoirs laïques, souligne-t-il.

Le bien-être des animaux abattus religieusement doit être amélioré, en respect des règles religieuses, estime le professeur. C'est possible: Temple Gradin, professeure à l'Université du Colorado connue pour ses travaux sur le bien-être animal, a visité un bon abattoir religieux, où les animaux s'effondrent - signe visible de leur perte de connaissance - en moyenne 17 secondes après l'égorgement. Le délai le plus long y était de 33 secondes.

Des abattoirs québécois, certifiés halal, étourdissent au préalable les animaux, profitant de la division de la communauté musulmane à ce sujet. Mais il est difficile de miser sur ce compromis, puisqu'il «n'est pas accepté par les courants dominants», fait valoir l'expert.

M. Regenstein participe au colloque «Le halal dans tous ses états», qui s'ouvre aujourd'hui à l'UQAM.