Ce matin, Philippe Couillard se trouve en Chine. Pendant ce temps, à Montréal, le maire Denis Coderre annonce la programmation des Fêtes du 375e anniversaire de la Ville de Montréal, un événement pour lequel Québec signera un chèque de 60 millions.

Bien sûr, on y a invité le ministre responsable de Montréal, Robert Poëti. Le ministre fédéral Denis Lebel sera aussi de l'annonce, même si Ottawa reste obstinément muet sur sa participation financière - le gouvernement Harper garde ses billes pour souligner le 150e de la Constitution canadienne, aussi en 2017.

MM. Coderre, Poëti et Lebel côte à côte pour la première fois: le décor est dressé pour un bel échange sur le péage du pont Champlain. Mais à Québec, on commence à trouver que le maire plénipotentiaire de Montréal manque d'élégance en voulant braquer sur lui les feux de la rampe. L'événement de ce matin est apparu il y a quelques jours seulement sur le radar du gouvernement du Québec. La mission de Philippe Couillard est prévue depuis des semaines.

L'annonce pouvait-elle être devancée de quelques jours ou reportée après le retour de Chine? C'est la question qu'on se pose chez les stratèges à Québec. «C'est du Coderre tout craché!», laisse-t-on tomber. Élu dans Roberval, Philippe Couillard peut participer à toutes les annonces qu'il souhaite dans la région de la capitale. Il en fait passablement en région. Mais il a besoin d'accroître sa visibilité dans la grande région de Montréal, où les réseaux de télé et de radio arrosent le 450, la banlieue qui sera, avec la montée de la CAQ, de plus en plus déterminante dans les luttes électorales. Une telle annonce qui a de surcroît une connotation institutionnelle, voire historique, est une occasion taillée sur mesure pour un premier ministre, à moins que le maire ne veuille pas partager les feux de la rampe.

Déjà-vu

À Québec, l'apparition de l'événement de ce matin à l'agenda a en a rappelé un autre, de la même farine. Fin septembre, la mairie de Montréal avait organisé son annonce pour souligner la contribution historique de Robert Bourassa. On allait nommer un segment très achalandé, des artères importantes de Montréal pour honorer le défunt premier ministre libéral. Au cabinet de Philippe Couillard, les rumeurs de l'annonce imminente avaient soulevé l'incrédulité: «Cela ne peut pas se faire ce jour-là, M. Couillard sera à Charlottetown, avec les autres premiers ministres.»

Qu'est-il arrivé? Cela s'est fait ce jour-là, justement. Pas la veille ni le lendemain: au seul moment où le chef du PLQ, le premier ministre, ne pouvait être présent pour rendre hommage à son prédécesseur.

Pour réduire la portée de l'événement, Québec a fait en sorte qu'on n'y parlera pas des «legs», les équipements que donnera Québec à sa métropole. On sait déjà que le recouvrement d'une partie de l'autoroute Ville-Marie en fait partie, ainsi que l'agrandissement du musée Pointe-à-Callière. Un projet dont on ne parle plus guère, la restauration de l'oratoire Saint-Joseph, a perdu de son élan avec le départ à la retraite de Raymond Bachand, le député d'Outremont. Des gestes plus «légers», comme l'illumination du pont Jacques-Cartier, sont aussi en perte de vitesse.

L'annonce d'aujourd'hui se résumera finalement à une invitation générale à la population à soumettre des projets pour marquer cet anniversaire, bien que dans les cartons, la plupart des initiatives soient déjà ciblées. Belle tribune pour se chamailler sur le péage!