La Cour suprême du Canada pourrait se pencher sur le cas de Sivaloganathan Thanabalasingham, cet homme qui a échappé l'an dernier à son procès pour le meurtre de son épouse en se prévalant de l'arrêt Jordan.

Le Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) a annoncé vendredi son intention de demander l'intervention du plus haut tribunal du pays dans cette affaire criminelle qui a choqué le Québec.

Il doit procéder par permission d'appel et, si elle est accordée, la Cour suprême pourrait renverser le jugement qui a ordonné l'arrêt des procédures contre l'homme et ordonner qu'il subisse son procès.

En avril dernier, un juge de la Cour supérieure avait ordonné l'arrêt des procédures criminelles. La raison: il s'était écoulé trop de temps entre l'arrestation de l'homme pour meurtre en 2012 et la date prévue de son procès en 2017. Un accusé a le droit de subir un procès dans un délai raisonnable, soulignait le juge, et son droit n'a pas été respecté.

Le DPCP avait d'abord demandé l'intervention de la Cour d'appel. Mais celle-ci a rejeté à la mi-février l'appel du DPCP. Selon la Cour, l'appel était devenu sans objet et théorique puisque Thanabalasingham - qui n'était pas citoyen canadien - avait déjà été renvoyé dans son pays d'origine, le Sri Lanka.

Or, il n'y a pas de traité d'extradition entre le Canada et le Sri Lanka. Bref, si un procès était ordonné, il aurait été difficile - voire impossible - de le ramener au pays pour faire face à la justice.

«Dans la présente affaire, l'intimé (Thanabalasingham) n'est peut-être pas mort, mais à toutes fins pratiques, il n'est pas plus disponible pour subir un procès à Montréal que s'il était mort», écrivait le juge Allan R. Hilton au nom de la majorité de la Cour d'appel.

La Cour avait été divisée 4-1 sur cette question: la juge en chef Nicole Duval Hesler avait rédigé une dissidence, sur laquelle le DPCP s'appuie pour sa demande à la Cour suprême.

Comme la juge en chef, il considère que la question n'est pas théorique et que l'arrêt des procédures n'est pas justifié.

Thanabalasingham a été le premier accusé de meurtre au Québec à obtenir un arrêt des procédures criminelles intentées contre lui en se prévalant de l'arrêt Jordan, qui établit que la durée des procédures judiciaires ne doit pas excéder 30 mois en Cour supérieure, sauf circonstances exceptionnelles. Dans son cas, il s'était écoulé 56 mois entre son arrestation et la date prévue du procès. Il avait passé tout ce temps en détention préventive.