Même si elles étaient violentes et troublantes, les images créées par Rémy Couture n'étaient pas obscènes au point d'être criminelles, a tranché samedi un jury, au Palais de justice de Montréal.

Rémy Couture, le «maquilleur de l'horreur», a été jugé non coupable des trois chefs d'accusation pour «corruption des moeurs par fabrication et distribution de matériel obscène» qui pesaient contre lui.

Les sept femmes et cinq hommes chargés de juger Rémy Couture ont délibéré pendant presque deux jours avant d'en arriver à cette conclusion. L'accusé a poussé un long soupir de soulagement lorsque le président du jury, le juré numéro 1, a prononcé les mots «non coupable» à trois reprises.

«C'est la fin d'un cauchemar qui dure trois ans. Je suis très satisfait du verdict», a-t-il affirmé après être sorti de la salle d'audience. «Je sais que beaucoup de gens étaient derrière moi.»

M. Couture a aussi affirmé que cette décision constituait une bonne nouvelle pour beaucoup d'artistes. «Tout le monde trouvait que cette accusation était dangereuse pour la liberté artistique, alors je crois que tout le monde va être soulagé», a-t-il fait valoir.

Le jury devait décider si l'oeuvre du maquilleur spécialisé en horreur constituait de l'obscénité au sens du Code criminel.

Sévices sexuels et meurtres

Le contenu au centre du débat est constitué de 1000 photos et deux courts métrages qu'il avait mis en ligne sur son site internet, InnerDepravity, entre 2005 et 2009.

M. Couture se servait de ce site comme d'une vitrine pour montrer son savoir-faire. Son fil conducteur était le journal visuel d'un tueur en série. On y voyait un homme affublé d'un masque d'horreur torturer des femmes ligotées, leur infliger des sévices sexuels et les tuer.

Les images s'inscrivent dans les genres torture porno et gore selon Richard Bégin, un expert en cinéma présenté par la défense. Deux experts présentés par la Couronne sont d'avis que l'oeuvre de M. Couture constitue de l'obscénité qui peut causer préjudice à la société.

Le procès a duré deux semaines. M. Couture était défendu par les avocats Robert Doré et Véronique Robert, tandis que Me Geneviève Dagenais et Me Michel Pennou occupaient pour la Couronne.

Soulagement et résignation

En sortant de la salle d'audience, les deux procureurs de la Couronne au dossier ont affirmé que malgré la décision du jury, il s'agissait d'une question qui méritait d'être étudiée.

«On a considéré que ces images étaient suffisamment affreuses pour que [...] nous soumettions cette affaire au jury», a expliqué l'avocate Geneviève Dagenais. «C'est une décision importante et nous la respectons.»

La Couronne a 30 jours pour porter l'affaire en appel. «Nous prendrons notre décision sur des points de droit», a fait valoir la procureure.

Les deux avocats de Rémy Couture, pour leur part, se sont dits bien contents. «On pense que c'était une question évidemment importante. Pas facile, parce que les images étaient difficiles à voir. Il s'agissait quand même d'images violentes», a exposé Véronique Robert. «On est très satisfaits.»