Son acharnement à défendre les Hells Angels et sa timidité à dénoncer du bout des lèvres la violence de la guerre des années 90, qu'il a plutôt décrite comme une «chicane», ont torpillé les chances du vétéran motard René Pearson d'obtenir sa semi-liberté.

Pearson, 62 ans, ancien Viking de Matane et cofondateur de la section des Hells Angels de Québec, s'est présenté devant les commissaires aux libérations conditionnelles pour la première fois, vendredi. Il a purgé la moitié d'une peine de quatre ans prononcée en 2013 après qu'il eut plaidé coupable à l'accusation de complot général de meurtre des superprocès SharQc.

«J'ai plaidé coupable parce que ça faisait quatre ans et demi que j'étais en dedans et j'étais écoeuré. Il y a eu des avocats de l'extérieur qui ont négocié avec un juge. Huit mois avant que je plaide coupable, ils m'ont demandé: quelle peine tu veux?»

«Je n'ai jamais pris part à des messes [réunions de motards] ni à un vote de guerre. Je n'ai jamais versé mon 10%», a dit le motard. Lorsque les commissaires lui ont fait valoir qu'en plaidant coupable, il avait également accepté ces faits, Pearson a répondu qu'il n'avait pas tout lu et compris ce qu'on lui reprochait.

«On m'a accusé d'avoir tué des gens que je ne connais même pas et qui n'étaient même pas dans mon secteur. Ça se passait à Montréal et c'était inconnu pour moi», a dit le motard, en rappelant qu'il purgeait une autre peine durant la période où la majorité des meurtres ont été commis.

La guerre revisitée

«Dans les années 80, les Vikings ont quitté Matane et se sont établis à Québec pour organiser des activités de bicycle. C'est dans ce contexte que nous sommes devenus des Hells Angels, pour faire comme en Californie. Si le groupe s'est criminalisé par la suite, je ne suis pas responsable», a-t-il lancé devant des commissaires médusés.

«Oui, des membres ont été violents, mais partout dans le monde, les Hells Angels ne sont pas comme on les décrit. C'est un club social. Beaucoup de membres ont des activités légales», a-t-il ajouté.

Pearson a également revisité la guerre des motards en affirmant que «certains disent que la chicane a commencé à cause d'une femme» que deux anciens frères d'armes se seraient disputée. Il a également dit que le meurtre du petit Desrochers était l'oeuvre d'un «autre clan de Montréal» et que la lutte contre les motards était politique, la preuve étant que d'anciens procureurs et policiers sont devenus députés par la suite.

«Ce qui est préoccupant pour la Commission aujourd'hui, c'est que vous êtes incapable de reconnaître que les Hells Angels ne sont pas qu'un club social, mais une organisation qui fait des crimes», a conclu le commissaire René Allard en refusant à Pearson sa semi-liberté. Résigné mais peu surpris, le motard a quitté la salle en se disant qu'il se reprendra à l'occasion de sa libération d'office, dans neuf mois.