Les juges canadiens doivent-ils être actifs sur les réseaux sociaux ? Comment peuvent-ils s'impliquer dans la collectivité ?

Ce sont certaines des questions qui sont à l'étude à l'occasion des consultations menées par le Conseil canadien de la magistrature dans le but moderniser les directives déontologiques à l'intention des juges.

Le conseil entreprend un premier examen en 20 ans de ses « Principes de déontologie judiciaire » en lançant des consultations afin de mesurer l'opinion publique sur le comportement acceptable des juges nommés par le fédéral.

« À mesure que la société évolue, les questions déontologiques auxquelles les juges sont parfois confrontés évoluent également », mentionne le juge en chef de la Cour suprême, Richard Wagner, qui est aussi le président du Conseil de la magistrature.

Les principes fondamentaux du travail d'un juge, comme l'intégrité, l'indépendance et l'impartialité, ne font pas l'objet de débats. L'examen se penchera sur six thèmes : les médias sociaux, les gens qui plaident pour eux-mêmes, les relations avec la population, le perfectionnement et la formation, la retraite et la gestion des instances, des conférences de règlement et des médiations judiciaires.

« Cependant, le travail des juges a changé. La société a évolué. Nous sommes confrontés à de nouvelles questions d'ordre déontologique, peut-on lire dans le document de travail publié par le Conseil canadien de la magistrature. Face à cet environnement changeant, le Conseil a entrepris de réexaminer les Principes de déontologie judiciaire actuels, afin de s'assurer qu'ils continuent de guider les juges en tenant compte de l'évolution des attentes du public. »

La population est sollicitée par le moyen d'un sondage. Les répondants sont invités à souscrire ou non à certaines affirmations comme « les juges ne doivent pas se définir comme étant membres de la magistrature dans les médias sociaux » ou « Les juges ne doivent pas utiliser les médias sociaux pour aimer, être ami ou partager à propos d'affaires qui pourraient être portées devant les tribunaux, ni pour susciter des débats négatifs (de nature politique ou autre) ou faire l'objet d'une controverse ».

Le Conseil cherche aussi à savoir à quelle mesure les juges doivent être socialement reclus. Est-il juste ou même souhaitable d'exiger du pouvoir judiciaire qu'il soit isolé et éloigné de tous engagements sociaux actifs ?

« Bien entendu, les juges ont une vie privée et ils doivent pouvoir jouir, dans toute la mesure du possible, des droits et des libertés des citoyens ordinaires, peut-on lire dans le guide déontologique actuel. En outre, les juges coupés de la réalité auront de moins bonnes chances d'être efficaces. »

Le document actuel indique clairement que son objectif est de fournir une orientation éthique. « Ils ne constituent pas un code ou une liste de comportements prohibés et ils ne doivent pas être utilisés comme tels. Ils n'énoncent pas de normes définissant l'inconduite judiciaire. »

Toutefois, le non-respect de ces normes peut entraîner des sanctions disciplinaires en vertu de la Loi sur les juges, pouvant même aller jusqu'à l'expulsion. En novembre, par exemple, le conseil a frappé un juge très respecté de la Cour supérieure de l'Ontario pour avoir accepté un poste de doyen temporaire dans une école de droit autochtone-le genre de dilemme que le guide révisé devrait aider à résoudre. L'affaire, toujours devant les tribunaux, a provoqué de vives critiques sur le conseil de la magistrature lui-même.