Trois agents de sécurité ont été blâmés en douce par le Bureau de la sécurité privée (BSP) après leur implication l'hiver dernier dans un incident à Maniwaki au cours duquel un jeune prévenu a été atteint d'une balle à la tête. Mais Garda, firme qui emploie les trois hommes, ne compte pas en rester là.

Garda a déposé devant la Cour supérieure une requête contre le BSP et le Tribunal administratif du Québec (TAQ). Dans sa requête, l'entreprise déplore que le BSP ait mené une enquête sur ses agents et ait suspendu leurs permis sans l'en avertir, et que le TAQ lui ait refusé de contester ces suspensions. Garda estime en outre que les décisions du BSP «sont erronées, incorrectes et déraisonnables en vertu des faits».

Le 31 janvier dernier, Steven Bertrand, 18 ans, a été atteint à la tête d'une balle tirée par le constable spécial en fonction au Palais de justice de Maniwaki. Le coup de feu est survenu au cours d'une altercation entre les deux hommes.

Sur une vidéo de la scène, largement partagée sur les réseaux sociaux, on aperçoit trois agents de la firme Garda qui, malgré les appels du constable spécial, n'interviennent que peu, voire pas, pour lui venir en aide. Garda était mandatée par le Centre jeunesse de l'Outaouais pour assurer le transport de jeunes délinquants entre le lieu de détention et le palais de justice.

Le Bureau des enquêtes indépendantes a sur-le-champ ouvert une enquête - toujours en cours - sur le drame.

Enquête du BSP

Or, au cours des jours suivants, le BSP, qui émet les permis des agents de sécurité de la province, a amorcé une enquête sur le travail des trois agents impliqués, sans toutefois en informer leur employeur. Au mois d'août, les trois hommes ont chacun reçu des avis de suspension de leur permis : cinq jours pour deux d'entre eux, trois jours pour le troisième. Le BSP n'en a pas davantage informé Garda, qui l'a appris un mois plus tard.

Dans ces avis, le BSP signale que Garda «n'a pas fourni de formation spécifique [...] aux agents de sécurité», selon les documents déposés en cour.

«Seulement deux documents de quelques pages [leur] auraient été remis en 2016 à titre de formation pour des fonctions impliquant des interventions physiques auprès des bénéficiaires des services de sécurité», peut-on encore lire.

Le BSP ajoute que «les actes posés ont pour effet direct de briser le lien de confiance [...] qui doit exister entre un agent de sécurité et le public».

Dans sa requête, Garda souligne que ces remarques mettent en jeu sa réputation et sa responsabilité dans l'événement de Maniwaki. Elle souhaite «rétablir les faits», déplorant en outre n'avoir pu exprimer son point de vue auprès du BSP dans son enquête.

Garda déplore en outre que le BSP ne l'ait informée ni de l'enquête qu'il menait ni de la suspension des permis de ses trois agents, comme le prévoit la Loi sur la sécurité privée.

Garda a donc tenté de contester la décision du BSP devant le TAQ, qui a toutefois refusé de traiter ces contestations au motif que la loi n'accorde pas ce droit à l'entreprise, mais bien aux agents eux-mêmes.

La société de sécurité somme donc la Cour supérieure d'ordonner au TAQ de recevoir sa contestation de la suspension de ses trois agents et d'ouvrir un dossier en bonne et due forme. La cause sera bientôt entendue.