Une agente de voyages qui a reconnu ce printemps avoir orchestré une fraude de 745 000 $ en vendant à des centaines de clients des voyages au rabais en 2010 et 2011 veut maintenant retirer sa reconnaissance de culpabilité. Manon Hubert soutient qu'elle n'était pas dans un bon « état psychologique » au moment où elle a plaidé coupable.

Cette volte-face a de quoi surprendre, puisque Manon Hubert a longuement été interrogée en avril dernier par la juge Julie Riendeau, qui voulait s'assurer qu'elle comprenait bien les conséquences de sa décision. « Personne n'est jamais forcé de plaider coupable », lui avait rappelé la juge. « C'est fait de façon éclairée ? », lui avait également demandé son avocat, Me Dimitri Raymond. « Très éclairée », avait-elle répondu avec aplomb.

Alors que les avocats devaient suggérer à la juge une peine d'emprisonnement dans la collectivité de deux ans moins un jour la semaine dernière au palais de justice de Montréal, la fraudeuse de 53 ans s'est immédiatement adressée à la juge pour plaider son innocence.

« Depuis le début de la négociation, je suis en désaccord de plaider coupable à quelque chose que je n'ai pas fait. J'ai plaidé coupable, effectivement, mais il y a eu une tension énorme. Lors des négociations, beaucoup de choses étaient contre ma volonté. [...] Depuis le début, je suis non coupable, depuis le début, je cite mon innocence », a-t-elle affirmé le 10 octobre dernier. Manon Hubert, qui n'a pas d'emploi, s'oppose particulièrement à l'obligation de payer 700 $ par mois pour sa fraude.

« Je n'autorise pas en ce moment Madame à retirer son plaidoyer de culpabilité », a fermement répondu la juge Riendeau, qui a invité Manon Hubert à présenter une « requête en retrait de plaidoyer » en bonne et due forme.

L'avocat de la fraudeuse, congédié sur-le-champ par celle-ci, a déploré une « attaque » à son « intégrité ».

VOUÉ À L'ÉCHEC

Le modus operandi de Manon Hubert était voué à l'échec. Selon les faits admis, elle achetait « énormément » de voyages de la victime, Club Voyages Langelier, et les revendait à un prix inférieur de 40 à 50 % à des centaines de clients.

Or, Manon Hubert vendait aussi à ses clients des voyages dont les dates étaient éloignées, mais sans faire de réservation. Elle se servait ensuite de ces ventes faciles pour payer la victime. De plus, elle donnait mille et une raisons au dirigeant de l'agence flouée pour expliquer ses retards de paiement.

Ce dernier a découvert le pot aux roses en janvier 2012 lorsque des chèques de Manon Hubert n'ont pas été honorés par la banque. Le dirigeant de l'agence flouée a alors appris qu'un groupe important était sur le point de partir, alors qu'il n'avait jamais été payé par la fraudeuse pour ce voyage de 192 000 $.

En raison de cette fraude, la victime a dû vendre son entreprise pour ne pas faire faillite. Club Voyages Langelier a subi une fraude de 745 000 $, bien que la perte réelle soit plutôt de 257 000 $.

L'affaire reviendra en cour le 20 novembre.