Un enquêteur de la Sûreté du Québec (SQ) accusé de fraude pour avoir menti aux médecins afin de prolonger son congé de maladie dénonce une enquête « bâclée » du corps policier et la « malveillance » des autorités. Alors que son procès criminel s'amorce demain, Nicolas Landry réclame 2 millions de dollars en dommages pour le préjudice subi par cette enquête « abusive ».

Cet enquêteur de l'escouade du crime organisé de la SQ a été accusé il y a trois ans d'avoir fraudé la SQ pour plus de 5000 $ entre le 22 mai et le 20 novembre 2014. « [Nicolas Landry] aurait sciemment transmis de fausses informations au personnel médical traitant dans le but de prolonger un congé de maladie. Il aurait ainsi touché une rémunération sous de fausses représentations », avait alors indiqué la SQ dans un communiqué.

Selon les policiers, Nicolas Landry aurait continué de travailler pendant son congé de maladie pour les agences de voyages de son père et de sa conjointe, tout en étant actionnaire d'une entreprise de déneigement. L'accusé se défend toutefois dans ses poursuites d'avoir été salarié de ces agences de voyages.

Son procès, qui devrait durer quatre semaines, doit commencer demain au palais de justice de Montréal. La Couronne prévoit faire entendre plus de 30 témoins et la défense, probablement une dizaine. Le procès devait s'amorcer lundi, mais la cause a été reportée, car le premier juge assigné connaissait un des enquêteurs.

En marge de la procédure criminelle, le policier de 42 ans a intenté vendredi deux poursuites civiles. Il réclame solidairement 1 million de dollars à la Procureure générale du Québec (PGQ), au Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP), à la patronne du DPCP, Me Annick Murphy, et au procureur de la Couronne Me Pierre-Olivier Gagnon. Il poursuit également le PGQ, la SQ et l'enquêteur François Berger pour 1,2 million dans un second recours.

La santé mentale de Nicolas Landry est au coeur de cette affaire. Pas moins de quatre médecins se sont penchés sur son cas depuis son arrêt de travail en 2009. Trois d'entre eux ont conclu qu'il souffrait d'une dépression moyenne ou sévère, indique le policier dans ses poursuites. Or, ajoute-t-il, les affaires internes de la SQ se sont basées sur le diagnostic d'un seul médecin évoquant un « cas clair de simulation », sans toutefois le confirmer, pour amorcer une enquête criminelle afin de démontrer qu'il avait menti aux médecins.

«Enquête bâclée»

« De fait, la Sûreté du Québec a fait une enquête bâclée en l'orientant de façon non objective, dans le seul but de faire perdre son emploi [à Nicolas Landry] en l'accusant de fraude », maintient le policier.

Nicolas Landry allègue que l'accusation de fraude a été déposée par la directrice du DPCP, Me Annick Murphy, à la suite de « pression » de la part de la SQ. Il avance que le haut dirigeant de la SQ Yves Morency a demandé « directement » à Me Murphy de le faire. Le policier n'étaye toutefois pas ses allégations dans ses poursuites. La SQ et le DPCP n'ont pas souhaité commenter l'affaire hier en raison du processus judiciaire en cours.

Dans sa deuxième poursuite, Nicolas Landry reproche à un enquêteur de la Direction des normes professionnelles de la SQ d'avoir « bâclé » son enquête en l'orientant de façon à lui faire perdre son emploi.

Le policier de 17 ans d'expérience évoque sa qualité de vie « grandement affectée », la dégradation de son état de santé et ses pertes financières importantes pour réclamer 2 millions de dollars en dommages. Il souligne avoir fait faillite en 2016 et avoir dû cesser les activités de son entreprise de déneigement en raison de l'enquête policière.

Depuis son arrestation pour fraude, Nicolas Landry a eu plusieurs démêlés avec la justice. Il a ainsi écopé de quelques jours de prison en 2016 dans une affaire de voies de fait.