Un juge montréalais risque la destitution pour ses crises de colère et ses interventions douteuses en pleine cour, des gestes qu'il attribue à un retour trop rapide après un congé de maladie ainsi qu'à son «tempérament agressif».

À l'automne 2014, Antonio De Michele a questionné des justiciables d'origine africaine sur la possibilité qu'ils aient été en contact avec le virus Ebola, en plus de faire une blague sur le fait que l'un d'entre eux portait le nom de famille Bobo.

Pendant le même mois, trois des audiences du juge ont donné lieu à des plaintes autorisées par le Conseil de la magistrature. Chaque fois, on lui reprochait d'être sorti de ses gonds et d'avoir traité trop rudement les citoyens qu'il avait devant lui.

Au total, c'est donc contre quatre plaintes que M. De Michele a dû se défendre, plus tôt cette semaine, devant un comité de cinq personnes majoritairement composé de confrères juges.

Dans un témoignage parfois tendu, le magistrat a présenté ses excuses aux plaignants.

Dans un cas, «j'ai disjoncté. Dans ma tête, j'ai littéralement disjoncté, a admis le juge. Ce jour-là, j'ai eu un court-circuit.»

Antonio De Michele a notamment expliqué qu'il était revenu d'un congé de maladie trop rapidement au mois de juin précédent, après avoir souffert d'une forme de cancer. «Ça m'a rendu irritable», a-t-il témoigné.

Le juge a aussi admis «être tout de même de tempérament agressif».

Un précédent

Antonio De Michele n'en était pas à sa première comparution devant le Conseil de la magistrature. En 2009, il avait été réprimandé pour avoir fait des commentaires cassants à l'endroit d'une justiciable en pleine audience. «Les remarques sur la personne et le ton utilisé à l'audition sont de nature à miner la confiance du justiciable et portent atteinte à l'intégrité, l'honneur et la dignité de la magistrature», avait écrit le comité d'enquête du Conseil.

C'est ce précédent qui a poussé MMichel Jolin, chargé de présenter le dossier au Conseil de la magistrature, à présenter la destitution du juge comme seule option possible.

«Le juge a déjà été sanctionné. On voit aujourd'hui que la leçon n'a pas servi, a-t-il plaidé. Je cherche en vain des motifs pour lesquels le juge De Michele devrait avoir la permission de continuer à siéger.»

Un comportement comme le sien, «ça ne doit plus durer, ça ne doit plus s'endurer», a ajouté l'avocat.

De l'autre côté du prétoire, c'est MLuc Richard qui défendait le juge De Michele.

«On n'est pas dans un de ces cas de récidive volontaire ou immédiate», a-t-il dit, ajoutant que l'un des incidents avait été «monté en épingle». «Je vois difficilement [...] comment on pourrait se retrouver dans un de ces cas où l'on recommande la destitution du juge», a ajouté MRichard.

La cause a été prise en délibéré.