(Ottawa) Un juge de la Colombie-Britannique prévient qu’il y aura ce qu’il appelle un « tsunami » de cas de fausse représentation à l’identité autochtone devant les tribunaux canadiens.

Le juge de la Cour provinciale, David Patterson, affirme que cette situation est alimentée par le « désir » de personnes non autochtones d’accéder à ce qu’elles considèrent comme les avantages de l’identification en tant qu’Autochtone en matière de détermination de la peine.

Il fait valoir que les juges doivent être « conscients du problème » et exiger des preuves garantissant qu’un délinquant a le droit d’être condamné en tant qu’Autochtone.

Un ensemble de lignes directrices connues sous le nom de facteurs Gladue obligent les tribunaux à tenir compte des expériences passées d’une personne autochtone lors de la détermination de la peine.

Cela peut inclure les traumatismes familiaux, la pauvreté et la question de savoir si le fait d’être séparé de leur culture aurait pu contribuer à leur infraction.

Le juge Patterson a conclu dans une décision concernant le pasteur Nathan Allen Joseph Legault que l’accusé avait présenté des affirmations douteuses et inadéquates sur l’identité métisse, fondées sur des histoires circulant dans la famille selon lesquelles son arrière-arrière-grand-mère était autochtone.

Dans ce cas, le pasteur Legault a été reconnu coupable d’accusations liées à la pornographie juvénile.

Les crimes tournaient autour de la communication avec deux personnes mineures qu’il avait rencontrées alors qu’il était directeur de camp de jeunesse et stagiaire en pastorale en Saskatchewan et à Windsor, en Ontario.

M. Legault a soutenu dans cette affaire qu’il se considérait comme Métis parce que son ancêtre faisait partie de la Confédération Haudenosaunee.

Le juge Patterson a déclaré dans la décision que l’auto-identification signifiait que les facteurs Gladue devaient être pris en compte.

Les facteurs sont nommés d’après une décision rendue en 1999 par la Cour suprême du Canada dans l’affaire R. c. Gladue. Le plus haut tribunal a réaffirmé ces principes en 2012 dans une autre affaire, R. c. Ipeelee, qui a déclaré que le fait de ne pas les prendre en compte constituait une erreur de droit.

Dans sa décision, le juge Patterson a souligné qu’il ne serait pas approprié qu’un juge ou un avocat chargé d’établir la peine détermine si une personne a ou non une ascendance autochtone.

Mais il a néanmoins décidé que Legault ne répondait pas aux critères pour que de tels facteurs s’appliquent dans son cas, et que ses antécédents familiaux ne l’avaient pas affecté « négativement » d’une manière qui aurait un sens juridique.

« En bref, rien ne permet d’assimiler l’expérience de vie de M. Legault à celle du peuple métis en particulier ou des peuples autochtones du Canada en général », a-t-il écrit.

« Je suis d’avis que la seule façon de donner un sens à l’enseignement de la Cour suprême du Canada dans les arrêts Gladue et Ipeelee est que les juges soient conscients de la question de la fausse représentation à l’identité autochtone et exigent une preuve qui convainque le tribunal que la personne condamnée a le droit d’être condamnée en tant qu’Autochtone », a-t-il ajouté.

La définition des Métis, un sujet controversé

Le juge Patterson a cité le rapport Gladue préparé pour le cas de M. Legault, qui soutenait que « les Métis constituent l’identité autochtone la plus controversée et la plus diversifiée sur le plan ethnique » au Canada.

On continuait ainsi : « Bien que le gouvernement canadien ait reconnu les Métis comme un peuple distinct des Inuits et des Premières Nations, la définition des Métis, et donc qui est ou non Métis, reste souvent une source de controverse. »

Les Métis, en général, sont définis comme un groupe autochtone distinct dont les terres natales prennent leur source dans la rivière Rouge, au Manitoba.

Des chercheurs, dont l’écrivaine Chelsea Vowel, ont décrit le groupe comme étant issu d’une ascendance mixte européenne et autochtone et ayant formé une nouvelle culture distincte au milieu du XVIIIe siècle.

Des critiques ont exprimé leurs inquiétudes concernant les personnes qui se qualifient de Métis alors qu’elles ont simplement un ancêtre autochtone éloigné et n’ont aucun lien avec la communauté actuelle.

Dans sa décision, le juge a cité le cas de l’auteur Joseph Boyden, qui détenait la même carte de membre de la tribu métis des Woodlands de l’Ontario que celle présentée par M. Legault.

Le juge Patterson a cité un rapport de l’Université de la Saskatchewan rédigé par l’avocat métis Jean Teillet sur le sujet.

« Les fraudeurs prétendent souvent que la carte de membre d’une organisation autochtone est une preuve de leur identité autochtone, a affirmé M. Teillet dans le rapport. Ce n’est pas ce que les peuples autochtones entendent par communauté. »