Un homme qui brisait volontairement ses condoms pendant des relations sexuelles avec des travailleuses du sexe a été reconnu coupable jeudi d’avoir agressé sexuellement deux femmes. William Bernard Martin a tenté de blâmer la taille imposante de son pénis pour expliquer les bris répétés, mais le juge a rejeté sa défense.

Le Montréalais de 31 ans a été déclaré coupable de deux chefs d’agression sexuelle et de trois chefs pour avoir obtenu des services sexuels moyennant rétribution. Il a été acquitté à l’égard des deux autres victimes, lesquelles n’ont pas témoigné au procès.

Ce dossier inusité s’apparente à un cas de « stealthing », soit le retrait non consenti du condom pendant une relation sexuelle. Quand une personne consent à une relation sexuelle avec un préservatif, il s’agit d’une agression sexuelle, s’il n’y a finalement pas eu de condom, selon la Cour suprême. Il faut un consentement explicite au retrait du préservatif en somme.

William Bernard Martin fréquentait en 2020 un salon de massage érotique de Montréal. La Couronne lui reproche d’avoir intentionnellement brisé son condom pendant des relations sexuelles avec quatre travailleuses du sexe. Au départ, les femmes croyaient qu’il s’agissait d’un accident, avant de réaliser que cela semblait être un modus operandi.

La première victime, « A », constate après cinq minutes de sa relation sexuelle que le condom vient de se rompre de « façon assez parfaite ». « Il n’était pas fendu », a-t-elle témoigné. C’est la panique « totale » pour la jeune femme qui craint alors de devenir enceinte ou d’attraper des maladies.

Scénario similaire pour la victime « B ». Cette fois, la jeune femme est « suspicieuse » pendant la relation sexuelle puisqu’elle observe sur les miroirs muraux l’accusé en train de manipuler la base de son condom. Soudain, elle entend un bruit « semblable à celui d’un élastique qui est déchiré ». Elle constate que le condom est « littéralement déchiré en deux ». La victime lui donne alors le bénéfice du doute.

Quelques semaines plus tard, « B » reconnaît l’accusé à la réception. Une altercation vient alors de se produire entre l’accusé et « D », une travailleuse du sexe. Celle-ci est furieuse parce qu’elle reproche à Martin d’avoir brisé son condom pendant la relation sexuelle. C’est dans ce contexte que plusieurs femmes du salon portent plainte.

Au procès, William Bernard Martin a soutenu que les condoms offerts par le salon – un client n’a pas le droit d’utiliser son propre préservatif – étaient trop petits pour lui. Il avance que le condom « a pu se briser parce que son pénis est très gros ou encore pour d’autres raisons sur lesquelles il refuse de spéculer », explique le juge.

William Bernard Martin a fait valoir au procès que le salon de massage utilisait des condoms de taille « standard » de la marque Lifestyles. Or, il vit un « inconfort » dans de tels condoms. Il a juré au procès n’avoir « jamais » brisé volontairement un préservatif.

Le juge André Perreault a toutefois rejeté sa défense.

« Le Tribunal retient que, quelle qu’ait été la grosseur du pénis de l’accusé, la taille du condom choisi par A convenait au pénis de l’accusé », conclut le juge.

De nombreux « mensonges »

Le magistrat a relevé de nombreux « mensonges » dans le témoignage de William Bernard Martin. Par exemple, le juge ne croit pas que l’accusé ait pu remarquer la marque précise du condom choisi par la victime. La crédibilité de l’accusé a aussi été affectée par le fait qu’il ait proposé à « B » de continuer la relation sexuelle même après le constat du bris du condom. Également, l’accusé a donné un mauvais numéro de téléphone à « B » après les faits.

Étonnamment, le juge Perreault affirme que « l’efficacité des condoms » pour se protéger contre une infection transmise sexuellement et une grossesse n’est pas une information de « connaissance d’office » par le Tribunal. « Ce ne sont pas des faits qui sont notoires », dit-il. Cela dit, son constat ne change rien au verdict.

Comme « D » n’a pas témoigné, la procureure de la Couronne, MAnna Levin, a présenté une preuve de faits similaires pour tenter d’obtenir un verdict de culpabilité. Toutefois, le juge n’a pas retenu la thèse de la Poursuite, acquittant ainsi l’accusé sur le chef d’agression sexuelle visant « D ». La Couronne n’avait pas de preuve concernant « C ».