(Québec) Les leaders de la Grande mosquée de Québec se sont dits déçus, mais prêts à tourner la page vendredi après la décision de la Cour suprême du Canada, lors d’une conférence de presse organisée sur les lieux du carnage d’Alexandre Bissonnette.

« La peur des familles des victimes, c’est de voir leurs enfants grandir et qui, dans 25 ans, vont croiser le tueur de leur père dans les rues de Québec », a lancé Mohamed Labidi, président du Centre culturel islamique du Québec (CCIQ).

Le CCIQ a partagé sa « déception » après la décision du plus haut tribunal au pays.

Vendredi matin, la Cour suprême a invalidé une disposition controversée de l’ère Harper qui permettait des peines de prison extrêmement longues pour les meurtres multiples.

Elle a aussi confirmé que la peine de prison ferme de 40 ans imposée par la Cour supérieure du Québec à Bissonnette était inconstitutionnelle. Le tueur pourra sortir après 25 ans, dès 2042, si la Commission des libérations conditionnelles l’accepte.

« À notre avis, cette décision ne prend en considération à leur juste valeur l’atrocité et le fléau des meurtres multiples qui se multiplient en Amérique du Nord, de même que l’aspect haineux, islamophobe et raciste du crime », a déclaré M. Labidi.

Les leaders du CCIQ se réjouissent tout de même de la fin de ce chapitre judiciaire qui a été particulièrement douloureux, s’est étiré sur plusieurs années et a passé devant trois tribunaux différents.

« Nous acceptons, car il n’y a plus d’autres recours. Notre seul recours, c’est de tourner la page », a indiqué le porte-parole du CCIQ, Boufeldja Benabdallah.

Mais l’homme croit toutefois que la décision de la Cour suprême vient « rompre l’équilibre ». « On tient compte de la réhabilitation d’un individu, […] mais en même temps, les familles qui ont été touchées doivent aussi sentir qu’elles ont gain de cause, que le tueur est puni à la juste valeur de ses crimes. »

Moins d’islamophobie à Québec ?

Ces leaders de la communauté musulmane de Québec souhaitent désormais laisser derrière eux ces années particulièrement douloureuses. Mohamed Labidi, dont la voiture avait été incendiée peu de temps après l’attentat du 29 janvier 2017, constate que l’islamophobie recule dans la capitale.

« Il y a encore des embûches, il y a encore des gens qui nous envoient des messages haineux. Mais on sent que les choses s’améliorent », dit-il. « Une des bonnes choses que cet évènement tragique et douloureux a apportée, c’est un rapprochement entre la communauté musulmane et les citoyens québécois. On l’a senti dans ces années difficiles. »

« On veut tourner la page, on veut tourner la page », insiste quant à lui M. Benabdallah. « J’ai assez pleuré. C’est le moment de dire "c’est terminé" et de travailler sur le vivre-ensemble. »