Un neuvième homicide depuis le début de l’année est survenu dans la métropole mercredi. Le drame s’ajoute à la longue liste d’évènements de violence avec arme à feu dans le Grand Montréal ces derniers jours. L’homme tué par balle en fin d’après-midi dans le quartier Saint-Michel, était bien connu des policiers : il devait entrer au pénitencier vendredi.

La victime, Sébastien Giroux, 36 ans, avait plaidé coupable à une accusation de complicité de meurtre après le fait le 17 mars dernier.

Selon une suggestion commune de la poursuite et de la défense, il devait être condamné à trois ans de pénitencier, mais le prononcé de sa peine avait été reporté au 13 mai pour des raisons familiales. Il était en liberté, mais devait respecter des conditions.

« C’est une mesure assez exceptionnelle », avait souligné le juge Marc David, de la Cour supérieure, en rendant sa décision.

Ce sursis aura été fatal pour Sébastien Giroux. Considéré par la police comme une relation des motards et des gangs de rue, mais également du tueur à gages Frédérick Silva et de son groupe, il aurait été tué de quelques projectiles, dont certains à la tête, vers 16 h 25.

Son meurtre, en plein après-midi, n’a pas laissé de marbre les résidants du quartier.

Cette nouvelle fusillade fait suite à plusieurs autres survenues dans le Grand Montréal dans les derniers jours. À Laval, mardi, un épisode de coups de feu est survenu en début d’après-midi au beau milieu d’un secteur résidentiel. Il s’agissait déjà du troisième évènement du genre en trois jours à se produire dans l’île Jésus.

Selon des témoins, un homme habillé en noir, arme de poing à la main, s’est avancé dans l’avenue Shelley, rue commerciale du quartier Saint-Michel, puis quatre coups de feu ont retenti. La victime a reçu au moins un projectile à la tête et s’est effondrée. Le suspect a alors pris la fuite à pied.

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Le suspect a pris la fuite à pied.

« Je me suis approché de la personne. Elle était clairement déjà partie. Le sang ne mentait pas. C’est moi qui ai appelé la police », laisse tomber Philippe, qui faisait le plein d’essence à une station-service à quelques mètres du drame, et qui a tout vu.

« Un appel a été fait au 911 pour des bruits s’apparentant à des coups de feu. Lorsque les premiers policiers sont arrivés sur les lieux, ils ont trouvé un homme blessé par balles. Son décès a été constaté sur place », indique l’agente Mariane Allaire Morin, du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM).

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L’évènement s’est produit près de l’angle de l’avenue Shelley et du boulevard Crémazie.

L’évènement s’est produit près de l’angle de l’avenue Shelley et du boulevard Crémazie, près d’un endroit connu des policiers.

Aucune arrestation n’avait eu lieu mercredi soir, a précisé le SPVM, qui tentera d’établir les circonstances entourant l’évènement.

Un large périmètre a été établi dans l’avenue Shelley, entre le boulevard Crémazie et la rue Michel-Ange, où des techniciens en identité judiciaire étaient au travail mercredi soir.

L’enquête est menée par les enquêteurs des Crimes majeurs du SPVM. Il s’agit du neuvième meurtre commis cette année à Montréal.

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Les policiers ont sécurisé le périmètre.

Des résidants inquiets

Jane Sokalski, qui habite à quelques mètres de la scène de crime, était sur son balcon lorsque le drame s’est produit. « Peu après 16 h, j’ai entendu deux gros bam, je pensais que quelque chose était tombé au sol. J’ai réalisé ce qui s’était passé quand les policiers sont arrivés », dit-elle. Le fait que l’évènement se soit produit tout près de chez elle l’inquiète. « En plus, c’était en plein jour », s’exclame la femme.

François Nadler, qui réside à Laval, s’inquiète lui aussi. Ses deux filles habitent dans le quartier avec leur mère.

Je commence à penser à faire habiter mes enfants ailleurs. On dirait que ça se réchauffe. Il y a plusieurs fusillades à Montréal. Ce n’est pas la première fois qu’il y a un évènement comme ça dans le coin.

le citoyen François Nadler

Quelques mètres plus loin, Abdel Kader et ses deux amis observent la scène, stupéfaits. « Je m’entraîne au gym à côté d’ici. Je me dis que ça peut arriver à n’importe qui. Je ne me sens pas serein à 100 %. La vie va continuer, mais il faut être sur ses gardes, on dirait. »

Complicité après le fait

Le 24 mai 2017, Sébastien Giroux accompagnait le tueur à gages Frédérick Silva lorsque ce dernier a tué par balle Daniel Armando Somoza-Gildea, client d’un bar de danseuses du centre-ville de Montréal, à la suite d’une dispute.

Silva était alors déjà recherché pour une tentative de meurtre contre le chef de clan de la mafia Salvatore Scoppa, en février de la même année.

Après le meurtre du client du bar, Giroux a pris la fuite en voiture avec Silva, qui n’est jamais retourné chez lui par la suite.

PHOTO FOURNIE PAR LE SPVM

Frédérick Silva

Ainsi a débuté une longue cavale de près de deux ans au cours de laquelle Silva a tué trois autres hommes à l’automne 2018.

Selon un résumé des faits déposé en cour, Giroux aurait ensuite aidé Silva à se procurer un passeport sous un faux nom.

C’est pour cette raison que Giroux a été accusé de complicité après le fait et a plaidé coupable le 17 mars.

Proche des frères Zéphir

Jusqu’à son entrée au pénitencier le 13 mai, Giroux devait respecter plusieurs conditions. Il devait notamment demeurer à son adresse, respecter un couvre-feu entre 21 h et 6 h, ne pas quitter le Québec et ne pas être en présence physique de gens ayant des antécédents criminels, sauf les frères Jean Ismaël et Emmanuel Zéphir, dont l’un est le parrain de son enfant.

Outre les frères Zéphir et Silva, Sébastien Giroux, surnommé Scratch, était considéré par la police comme un proche du défunt gang des Syndicate, ainsi que d’un membre en règle des Hells Angels de la section de Montréal et ses hommes de main.

Sébastien Giroux avait quelques antécédents criminels, notamment une peine de 20 mois pour complot et trafic de cocaïne prononcée en 2007 et une autre de 10 mois pour trafic de drogue imposée en novembre 2008.

Silva a été condamné à la prison à perpétuité sans admissibilité à une libération conditionnelle avant 25 ans pour les trois meurtres commis durant sa cavale.

La semaine dernière, il a reconnu que la preuve de la poursuite était probante dans l’affaire du meurtre de Daniel Armando Somoza-Gildea, et il recevra sa peine dans les prochains jours.

Pour joindre Daniel Renaud, composez le 514 285-7000, poste 4918, écrivez à drenaud@lapresse.ca ou écrivez à l’adresse postale de La Presse.