Finies les peines allégées en raison de la COVID-19 et les confinements à résidence. Après avoir atteint leur plus gros creux en 10 ans, les prisons voient progressivement revenir les personnes qui ont été condamnées à des peines plus légères et qui, pendant la COVID-19, avaient profité d’une clémence exceptionnelle.

Selon les chiffres obtenus par La Presse, la population moyenne de détenus dans les prisons québécoises n’a été que de 3618 en 2020-2021, alors qu’elle était de 4487 en 2018-2019 et qu’elle est montée jusqu’à 5177 en 2014-2015.

Plusieurs facteurs expliquent cette baisse. Les palais de justice ont notamment roulé au ralenti pendant des mois. Les autorités ont aussi sciemment cherché à réduire le plus possible la population dans les prisons, des milieux particulièrement propices aux éclosions.

Les exceptions consenties ces dernières années étaient strictement liées à la COVID-19 et la priorité est de revenir au système habituel qui fonctionne très bien, a indiqué à La Presse Louis-Julien Dufresne, attaché de presse de Geneviève Guilbault, ministre de la Sécurité publique.

Mathieu Lavoie, président du Syndicat des agents de la paix en services correctionnels du Québec (SAPSCQ-CSN) note que les mouvements ont déjà repris. « À Bordeaux, par exemple, il y a environ un mois, on a eu 200 entrées et la fin de semaine dernière, on en a eu 130 », note-t-il.

Qui sont ces gens qui, soudainement, retrouvent le chemin des prisons ? Essentiellement des personnes qui ont reçu des peines en discontinu à purger les fins de semaine, comme l’autorisent couramment des juges quand ils ont été convaincus que le prévenu risquerait autrement de perdre son emploi.

On parle de voies de fait simples, de vols à l’étalage, etc., explique MJean-Claude Hébert, avocat criminaliste. Chaque directeur de prison a un certain pouvoir discrétionnaire en vertu duquel il peut permettre à des personnes qui ont été condamnées « de surseoir à leur peine » dans certaines conditions, poursuit Me Hébert.

Les directeurs de prison ont donc agi pour limiter leur population carcérale, les juges et les avocats aussi.

Devant les tribunaux, la COVID-19 a régulièrement été invoquée par les avocats de la défense pour éviter que des prévenus se retrouvent dans les établissements à des moments critiques de la pandémie, note MCharles Côté, lui aussi avocat criminaliste.

Des peines ont été allégées, des travaux communautaires ont été souvent préférés à la détention, fait-il observer, relevant par exemple que l’un de ses clients a été confiné à résidence pour une bonne partie de sa peine (alors que le Québec était lui-même pas mal coincé à la maison !)

« On a essayé d’être imaginatif, on a trouvé des solutions alternatives à l’emprisonnement, mais là, les vieux réflexes reprennent le dessus », constate Me Côté à regret.

Population stable dans les pénitenciers fédéraux

Dans les pénitenciers fédéraux, le nombre de détenus « se situait autour de 14 000 ces dernières années », indique MIvan Zinger, enquêteur correctionnel du Canada.

Avec les 12 338 détenus qu’ils comptent présentement, on n’est pas tellement loin du compte habituel.

Alors que les prisons provinciales sont si peuplées que des détenus doivent régulièrement être transférés d’une prison à l’autre – et souvent dans une région assez éloignée de la leur, rappelle Mathieu Lavoie, le président des agents de la paix – les pénitenciers fédéraux, eux, comptent un nombre important de cellules vides.