Téléphones intelligents ou jetables, câbles USB, câbles d’alimentation pour téléphones ou tablettes, adaptateurs, oreillettes Bluetooth, couteaux, dont l’un avec une lame de plus de 20 cm, pics artisanaux, drogues, tabac et même poinçon à tatouages : c’est une véritable caverne d’Ali Baba que les agents correctionnels du pénitencier de Donnacona ont découverte lundi.

« Lors d’une fouille de secteur, le chien de l’un de nos maîtres-chiens s’est arrêté devant une porte. Les agents correctionnels ont trouvé ça bizarre. Ils ont examiné le cadrage de la porte de la cellule et constaté que celui-ci avait été contrefait près du plancher, juste à l’intérieur de la cellule. Les agents ont découvert le trou et trouvé tous ces objets dans le cadrage », décrit Frédérick Lebeau, président régional (Québec) du Syndicat des agents correctionnels du Canada affilié à la CSN.

La cachette des détenus du pavillon E
  • L’ouverture a été pratiquée dans le bas du cadre de la porte, tout près de l’endroit où celle-ci vient s’appuyer, à l’intérieur de la cellule. Des objets qui y avaient été dissimulés jonchent le sol peu après la découverte des agents correctionnels.

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    L’ouverture a été pratiquée dans le bas du cadre de la porte, tout près de l’endroit où celle-ci vient s’appuyer, à l’intérieur de la cellule. Des objets qui y avaient été dissimulés jonchent le sol peu après la découverte des agents correctionnels.

  • Les détenus ouvraient et rebouchaient le trou avec différentes matières chaque fois qu’ils s’en servaient.

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    Les détenus ouvraient et rebouchaient le trou avec différentes matières chaque fois qu’ils s’en servaient.

  • En s’approchant du trou, les agents correctionnels ont commencé à apercevoir des objets dans l’ombre de la cavité.

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    En s’approchant du trou, les agents correctionnels ont commencé à apercevoir des objets dans l’ombre de la cavité.

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« Le trou devait être là depuis un certain bout de temps. Le métal du cadrage a été découpé avec une scie. Chaque fois qu’ils prenaient un objet dans leur cachette, les détenus rebouchaient le trou avec du matériel d’artisanat, du plâtre ou du papier de toilette mouillé, et remettaient de la peinture, la même que celle du pénitencier », ajoute le chef syndical.

Parmi les objets découverts, on trouve également un couteau en céramique, indétectable par les appareils de détection installés aux entrées du pénitencier, du papier sablé et une clé Allen, nécessaire pour retirer les vis ou boulons présents partout dans l’établissement carcéral.

« Parmi les objets interdits et non autorisés saisis le 11 avril, on retrouve 57,7 grammes de marijuana, 22 téléphones cellulaires, 16 fils de chargeurs, deux clés USB, une oreillette sans fil, quatre pics, un couteau en céramique, une scie à métaux, six morceaux de papier sablé, cinq blagues à tabac et trois cigares. Au total, la valeur en établissement des objets saisis est évaluée à 39 500 $ », a indiqué, avec plus de précisions, le gestionnaire régional (Québec) des communications, Jean-François Mathieu, tard mercredi soir.

Tout ça, ce n’était pas à un seul détenu. C’était probablement l’entreposage de la rangée au complet.

Frédérick Lebeau, président régional (Québec) du Syndicat des agents correctionnels du Canada affilié à la CSN

D’après nos informations, la rangée où la cachette a été découverte est occupée par des membres de gangs de rue de Toronto et d’autres villes ontariennes.

« Échec du système »

« Il faut que le service correctionnel agisse avant qu’il soit trop tard. Il va arriver un évènement grave à un moment donné. Un conflit entre membres de gangs pourrait prendre fin dans une effusion de sang », craint le chef syndical, qui accuse Ottawa de se traîner les pieds dans l’adoption de solutions.

« Cette découverte est une démonstration de l’échec du système. Le gouvernement ne réagit pas assez vite. La commissaire du Service correctionnel du Canada, Anne Kelly, se préoccupe très peu de ce qui se passe dans les établissements en matière de drogues et d’armes », dit-il.

M. Lebeau croit que la plupart des objets trouvés lundi ont été livrés par drone. Selon lui, on enregistre au moins deux ou trois livraisons par drone chaque semaine à Donnacona, ce qui en ferait l’un des pires pénitenciers en cette matière.

Un nouveau système de détection de drones par une technologie 3D doit être en fonction à compter de novembre à Donnacona. Mais Frédérick Lebeau demande aussi que des détecteurs à balayage corporel (scanneurs), semblables à ceux que l’on trouve dans les aéroports, soient installés aux portes par lesquelles les détenus retournent dans l’établissement après leurs sorties dans la cour, car les gardiens n’ont pas le pouvoir de les fouiller.

« On pourra savoir qu’il y a eu 475 drones dans la journée, mais si on n’est pas en mesure de récupérer les objets livrés, on n’est pas plus avancés », déplore M. Lebeau.

« Nous sommes inquiets. Tant qu’on ne met pas en place des mécanismes de défense, la mission des services correctionnels est un échec lamentable. On ne donne aucune chance à la réinsertion sociale quand on permet ce genre de comportements là », conclut le chef syndical.

« La sûreté et la sécurité de notre personnel, de nos détenus et de nos établissements sont une priorité du SCC. Nous sommes engagés à travailler avec le personnel en établissement ainsi que nos partenaires syndicaux pour répondre aux préoccupations qu’ils soulèvent et pour trouver des solutions afin de renforcer les mesures destinées à prévenir l’introduction d’objets interdits et non autorisés dans nos établissements », a pour sa part déclaré M. Mathieu, ajoutant qu’il nous reviendra ultérieurement au sujet des détecteurs à balayage corporel.

Pour joindre Daniel Renaud, composez le 514 285-7000, poste 4918, écrivez à drenaud@lapresse.ca ou écrivez à l’adresse postale de La Presse.

En savoir plus
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    Nombre de livraisons par drone connues qui ont été faites au Québec au cours de la dernière année. C’est plus de 40 % de toutes les livraisons par drone survenues dans les pénitenciers de partout au pays pour la même période.
    SOURCE : Service correctionnel du Canada