Accusé des meurtres de deux lieutenants de la mafia sicilienne commis à Laval en 2016, Dominico Scarfo a tenu certains propos sur ces assassinats et a démontré sa connaissance du milieu du crime organisé, trois ans plus tard, alors qu’il était enregistré à son insu par un ancien tueur à gages devenu taupe pour la police.

Scarfo, 49 ans, est accusé d’avoir comploté pour les meurtres et d’avoir tué Lorenzo Giordano et Rocco Sollecito, en mars et mai 2016, et a son procès devant jury depuis deux semaines.

PHOTO FOURNIE PAR LA SÛRETÉ DU QUÉBEC

Dominico Scarfo

Giordano a été assassiné dans une voiture conduite par une femme alors que le couple venait d’arriver au centre de conditionnement physique où s’entraînait le mafieux depuis sa libération conditionnelle. Selon la poursuite, c’est Scarfo qui tenait l’arme avec laquelle Giordano a été tué.

Rocco Sollecito a pour sa part été abattu par un individu caché dans un abribus, alors qu’il venait de quitter son condo. C’est cet individu qui est devenu agent civil d’infiltration (ACI) pour la police.

Selon la poursuite, Scarfo conduisait une voiture qui précédait le VUS de Sollecito, et il se serait arrêté durant quelques secondes à un arrêt obligatoire pour donner le temps au tueur d’agir.

À l’été 2019, l’ex-tueur à gages est retourné voir Scarfo en portant un dispositif d’enregistrement portatif et a tenté de le faire parler de ces meurtres. C’est un premier enregistrement réalisé le 28 juillet que les jurés ont écouté mardi.

Objectif : faire de l’argent

« Pourquoi tu ne l’as pas tué [Giordano] une fois sorti de l’auto ? Je ne comprends pas. Et la femme qui criait. Je te connais, tu es comme un curé, tu aimes ça propre », lui a demandé l’ACI.

« J’aime juste apparaître derrière les personnes », lui a répondu Scarfo.

PHOTO DÉPOSÉE EN COUR

Lorenzo Giordano était assis sur le siège passager de cette voiture lorsqu’il a été tué à bout portant le 1er mars 2016 à Laval.

« C’est comme l’abribus. Dès le premier jour, c’était la meilleure place », a poursuivi l’ACI, en faisant vraisemblablement référence au meurtre de Rocco Sollecito.

« Je te l’ai dit. Il [en parlant d’une autre personne dont l’identité est frappée d’une ordonnance de non-publication] voulait qu’on se gare dans un endroit où nous n’avions pas le droit de nous stationner », a renchéri Scarfo, en riant.

Ce dernier semblait encore prêt à rendre des services en 2019. Il dit à l’ACI qu’il veut travailler, « que son objectif est de faire de l’argent, qu’il a deux ou trois gars qui travaillent avec lui et qu’il veut du pouvoir et un territoire ». Il demande aussi à l’ACI d’arranger un rendez-vous avec Andrea Scoppa.

« Mais a-t-il encore des hommes loyaux ? », demande Scarfo, en ajoutant que Scoppa « a un gros contrat sur sa tête ».

Un ancêtre dans la Ndrangheta

À un certain moment, Scarfo raconte que son arrière-grand-père était dans la Ndrangheta, organisation mafieuse italienne.

Lorsqu’il parle de personnes assassinées, l’ACI utilise le mot « cannolis », en faisant référence à une scène du film Le parrain.

« Les Scoppa nous en doivent, à toi et moi. Je te garantis que je veux l’argent pour ce que nous avons fait, les cannolis. Rien n’est gratuit », dit l’ACI durant la conversation.

Les deux hommes ont des mots très durs à l’endroit de l’individu qu’on ne peut identifier en vertu d’un interdit de publication et le traitent notamment de « cafard ».

« Il a gardé la moto, je ne peux pas le croire », dit l’ACI, en faisant visiblement référence à l’engin utilisé lors du meurtre de Rocco Sollecito.

« Je ne veux pas y penser », dit Scarfo.

Le procès se poursuit mercredi avec l’écoute d’un autre scénario d’infiltration fait par l’ACI auprès de l’accusé durant l’été 2019.

Pour joindre Daniel Renaud, composez le 514 285-7000, poste 4918, écrivez à drenaud@apresse.ca ou écrivez à l’adresse postale de La Presse.