Les enquêteurs du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) ont arrêté il y a quelques semaines et jeudi deux individus reliés à un nouveau groupe de motards « inclusif » dont fait partie un ancien chef de gang expulsé du Canada en 2014, mais revenu au pays après avoir obtenu sa citoyenneté, a appris La Presse.

Le groupe, qui aurait été créé l’an dernier et serait surtout présent à Montréal et à Laval, s’appelle Moors, section North Shore (rive nord) et son membre le plus connu est Richard Goodridge.

Depuis leur apparition, les Moors ont été vus par les policiers à quelques reprises, portant une veste typique des motards. À l’endos de celle-ci, leurs nom, logo et région sont cousus en trois parties, avec les lettres MC, pour motorcycle club, comme les clubs de motards approuvés par les Hells Angels.

Leur logo représente un homme portant une coiffure orientale et tenant divers objets. À l’origine, les Moors (Maures, en français) tiraient leur nom des populations d’origine berbère qui vivaient en Afrique du Nord durant l’Antiquité.

Selon nos informations, l’une des philosophies des Moors serait d’être plus « inclusifs » que les autres groupes de motards.

Le membre le plus connu des Moors est Richard Goodridge, 52 ans, expulsé du Canada vers son pays d’origine, le Guyana, en 2014, pour grande criminalité, mais revenu à Montréal deux ans plus tard, vraisemblablement après avoir obtenu sa citoyenneté canadienne, selon des sources.

En 2016, un porte-parole d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada avait indiqué à La Presse qu’en raison de la Loi sur la projection des renseignements personnels, il n’était pas en mesure de divulguer de l’information sur Richard Goodridge sans le consentement de celui-ci.

PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, ARCHIVES LA PRESSE

Richard Goodridge

Sa veste des Moors saisie

D’après nos renseignements, la résidence de Richard Goodridge à Laval a été perquisitionnée jeudi par les enquêteurs de la Division du crime organisé (DCO) du SPVM, dans le cadre d’une enquête sur une tentative de meurtre par arme à feu survenue en plein jour, dans une ruelle située à l’angle des rues Saint-Dominique et Saint-Zotique, dans la Petite Italie, le 20 avril.

Goodridge n’a toutefois pas été accusé, mais des téléphones cellulaires, des vêtements et une veste des Moors ont été trouvés chez lui et saisis.

PHOTO FOURNIE PAR LE SPVM

En revanche, un individu qui serait un aspirant membre des Moors, Steven Thérien, et un autre qui serait membre des Moors, Patrick Gilbert, ont été arrêtés et accusés à la suite de cet évènement durant lequel ils auraient été présents, selon les prétentions de la police et de la poursuite.

Dans une résidence de Blainville reliée à Thérien, les policiers auraient notamment trouvé jeudi un pistolet, un revolver et une veste des Moors. L’homme de 30 ans a été accusé de possession d’arme et de non-respect de condition.

PHOTO FOURNIE PAR LE SPVM

PHOTO FOURNIE PAR LE SPVM

La poursuite s’est opposée à sa remise en liberté et son enquête sur cautionnement a été fixée à la semaine prochaine.

Quant à Gilbert, 46 ans, il a été arrêté le jour même de l’évènement, le 20 avril, grâce à la rapidité d’intervention et à la perspicacité de deux policiers à vélo.

Vers 14 h, des témoins ont entendu sept ou huit coups de feu et vu quatre hommes prendre la fuite en courant avant que deux véhicules quittent le secteur sur les chapeaux de roues.

Alertés par les appels au 911, les agents Patrick Langevin et Yves Desjardins ont interpellé Patrick Gilbert alors qu’il fuyait vraisemblablement les lieux à bord d’un Honda CRV.

Du crack et de la cocaïne ont été trouvés dans le VUS et sur le conducteur. Gilbert a été arrêté et accusé de possession de stupéfiants dans un but de trafic.

La police croit qu’une transaction qui a mal tourné pourrait être à l’origine des coups de feu. Sept douilles ont été retrouvées sur les lieux des évènements, selon des rapports lus par le procureur lors de l’enquête sur remise en liberté de Gilbert.

Pour joindre Daniel Renaud, composez le 514 285-7000, poste 4918, écrivez à drenaud@lapresse.ca ou écrivez à l’adresse postale de La Presse.

Qui est Richard Goodridge ?

Surnommé Black Jew

Durant les années 1990, membre des Scorpions, liés aux Rockers, défunt club-école des Hells Angels.

Durant la guerre des motards, il avait été vu dans un convoi dans lequel se trouvait Maurice Boucher.

Au milieu des années 2000, il a fondé un gang de rue appelé 67 avec le défunt caïd Ducarme Joseph.

Les deux hommes se sont brouillés par la suite et la police soupçonne Goodridge d’avoir joué un rôle dans l’attentat contre Joseph survenu dans la boutique de vêtements de ce dernier dans le Vieux-Montréal, en mars 2010. Goodridge n’a toutefois jamais été accusé relativement à cette affaire.

Durant les années 1990 et 2000, Goodridge a été victime d’au moins quatre tentatives de meurtre, dont une au cours de laquelle un projectile lui a sectionné un doigt à Toronto.

Même s’il est bien connu des policiers, Richard Goodridge a peu d’antécédents judiciaires.

Il a été intercepté à bord d’une voiture dans laquelle il y avait une arme à Toronto en 2004.

Au Québec, il a été reconnu coupable de deux chefs de possession d’arme et de vol de carte de crédit. Il a été acquitté ou a bénéficié d’un arrêt du processus judiciaire dans plusieurs autres dossiers.

En décembre dernier, il a été accusé de voies de fait et d’agression armée pour un évènement survenu en octobre dernier à Laval. Il a plaidé non coupable et les procédures sont toujours en cours.

D’autres groupes émergents d’intérêt

Outre les Moors, les policiers et les agents correctionnels s’intéressent à deux autres groupes apparus en 2020 et en 2021, les Vikings et le Red Power Crew.

Les membres des Vikings, parmi lesquels on retrouve des rappeurs qui publient des vidéos sur YouTube, portent des vêtements affichant le nom du groupe, assorti des lettres GDR, pour « gang de rue ».

Selon la police, ils seraient liés aux Hells Angels et n’hésiteraient pas à user de violence.

On les retrouverait partout au Québec, mais ils seraient plus présents dans les régions de Montréal, Gatineau, Laval et Granby.

Ils vendent des vêtements à leur effigie sur les réseaux sociaux ou dans un local à Granby.

Le Red Power Crew formerait une clique affiliée aux Hells Angels. Des individus portant leurs vêtements ont été vus aux funérailles du Hells Angel Paul Magnan, qui ont eu lieu à Saint-Ubalde, dans la région de la Capitale-Nationale, le 1er mai dernier.