Ce n’est pas un membre des Hells Angels qui était assis tout près de l’arène, dans les places réservées aux invités, lors d’un gala de boxe, le 20 septembre dernier, à Montréal, mais bien six.

C’est ce qu’a indiqué un policier de l’Escouade Éclipse du SPVM, qui s’est rendu au Centre Pierre-Charbonneau ce soir-là, et qui a témoigné mardi, photos à l’appui, au premier jour des audiences du Groupe Yvon Michel (GYM) devant la Régie des alcools, des courses et des jeux.

La RACJ soupçonne GYM d’avoir contrevenu à certains de ses règlements en permettant la présence d’individus liés au crime organisé dans un périmètre de sécurité, autour de l’arène, lors d’un gala de boxe le 20 septembre dernier, et en laissant le soin à une autre entreprise, qui n’a pas encore obtenu son permis de la Régie, New Era fighting & promotion, d’organiser l’événement en lieu et place du Groupe Yvon Michel.

Le policier d’Éclipse – une escouade spécialisée dans la surveillance des établissements licenciés et la collecte de renseignements sur le crime organisé –, Stephan Clavet, a notamment identifié les six membres des Hells Angels assis à deux rangées de l’arène : Salvatore Cazzetta, Salvatore Brunetti, Stéphane Plouffe, Vincent Boulanger, Yvon Tanguay et David Lefebvre, tous membres de la section de Montréal.

PHOTO DÉPOSÉE DEVANT LA RACJ

Dans l’ordre habituel, assis dans la deuxième rangée, Salvatore Cazzetta, Salvatore Brunetti, Stéphane Plouffe, Vincent Boulanger, Yvon Tanguay et David Lefebvre, ont assisté au gala de boxe du 20 septembre dernier au Centre Pierre Charbonneau.

Le policier a également confirmé la présence d’autres individus, dont des membres de clubs supporteurs qui assuraient la sécurité des Hells Angels, et certains autres accompagnateurs ayant plusieurs antécédents criminels.

« J’ai déjà vu des motards à des galas de boxe, mais jamais assis directement à côté de la scène. Il peut y avoir plusieurs possibilités ; influencer le combat, provoquer de la peur, provoquer, infiltrer l’économie légale, faire du blanchiment d’argent, avoir un contact privilégié parmi les organisateurs… .. Plusieurs questions se posent », a déclaré un autre policier, le sergent détective Érick Monfette de la section du Renseignement du SPVM, qui témoignait pour la première fois en tant qu’expert des motards.

Plusieurs problèmes

Plus tôt dans la journée, un directeur adjoint de la RACJ, Mario Lacroix, a expliqué que les motards étaient assis dans une section normalement réservée aux invités du promoteur, aux superviseurs de la régie, et aux ambulanciers.

Il a expliqué que c’est vers 20 h le soir du 20 septembre, lorsqu’il a appelé un responsable en fonction au Centre Pierre-Charbonneau, qu’il a été avisé de la présence d’individus criminalisés assis dans le périmètre de sécurité entourant l’arène.

PHOTO DÉPOSÉE DEVANT LA RACJ

Un policier de l’escouade Éclipse a photographié Vincent Boulanger (à gauche) alors que celui-ci sortait de l’amphithéâtre, flanqué de Guillaume Leblanc, le 20 septembre dernier au Centre Pierre-Charbonneau.

« Ça m’a interpellé. Ces places sont proches des juges. On était dans une période de règlement de comptes. On m’a dit qu’ils étaient les invités d’Yvon Michel. J’ai dit au responsable de ne pas déplacer les gens, de rester discret, mais d’appeler la police », a affirmé M. Lacroix.

« Ces billets sont normalement ceux des invités du promoteur. Selon les règlements, ce sont des billets de faveur et ils doivent être gratuits », a ajouté le témoin, précisant un peu plus tard, lors de son contre-interrogatoire, qu’un document indique que ces places auraient été vendues 250 $ chacune.

M. Lacroix a aussi affirmé qu’un agent de sécurité, notamment responsable des hôtesses de l’arène, arborait un tatouage « associé à un gang de motards », et qu’il y avait deux groupes de sécurité distincts lors de l’événement.

« Si les billets ont été donnés, il y a un problème. Si les billets ont été vendus, il y a encore un problème. Si c’est quelqu’un d’autre qui les a vendus, il y a un autre problème car cela me dit qu’Yvon Michel ne sait pas ce qu’il se passe », a répondu le directeur général adjoint, alors contre-interrogé par l’avocat de Groupe Yvon Michel, Me Martin Pichette.

« La question, ce n’est pas si les billets ont été donnés ou vendus, ce sont les gens qui se retrouvent là. Ont-ils eu la permission du promoteur ? Et le promoteur, c’est Yvon Michel », a-t-il ajouté.

Durant son contre-interrogatoire, Me Pichette a fait la démonstration que la Régie a donné sa bénédiction à des événements de boxe organisés par des promoteurs, en association avec des organisations qui n’ont pas de permis par exemple des équipes de hockey junior majeur.

On a également appris que New Era Fighting & promotion a demandé un permis à la RACJ en mars 2019, mais qu’il ne l’a toujours pas obtenu, notamment parce que l’enquête de réputation et d’antécédents des administrateurs effectuée par la Sûreté du Québec a été longue. Celle-ci est maintenant terminée et le dossier est sur le bureau du contentieux de la Régie.

En fin de journée, la procureure du contentieux, Me Joliane Pilon, a déposé une preuve documentaire, dont des factures faites aux noms d’Hugo Girard, de Groupe Yvon Michel/New Era fighting & promotion ou seulement au nom de New Era fighting & promotion.

De son côté l’avocat de GYM, Me Pichette, a émis des doutes sur l’existence de l’individu au tatouage de tête de mort ailée et a annoncé la présence d’un témoin supplémentaire mercredi, en plus du témoignage attendu d’Yvon Michel.

Ce dernier a passé la journée assis à côté de son avocat à écouter les témoignages avec attention.

Pour joindre Daniel Renaud, composez-le (514) 285-7000, poste 4918, écrivez à
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