Le directeur d’une unité de renseignement de la Gendarmerie royale du Canada basée à Ottawa, Cameron Ortis, a été arrêté jeudi, à l’issue d’une enquête de la police fédérale. Il est soupçonné d’avoir donné des informations sensibles, d’utilisation frauduleuse d’un ordinateur et d’abus de confiance.  

La nouvelle a d’abord été publiée par le réseau Global. La GRC a confirmé l’arrestation de M. Ortis en précisant la nature des accusations en vertu du Code criminel et de la Loi sur la protection de l’information qui devraient être portées contre lui vendredi après-midi, au palais de justice d’Ottawa.  

Selon le réseau Global, le directeur, qui est un membre civil de la GRC, est soupçonné d’espionnage au profit d’un pays étranger, une accusation rarement portée au Canada. Il aurait été arrêté à l’issue d’une enquête de sécurité nationale. Le réseau cite des sources qui décrivent le directeur comme un « espion sérieux ».

Selon ce que la GRC indique sur son site internet, Ortis est accusé des infractions suivantes :

Article 14 (1) de la Loi sur la protection de l’information : Commet une infraction la personne astreinte au secret à perpétuité qui, intentionnellement et sans autorisation, communique ou confirme des renseignements opérationnels spéciaux.  

Article 22 (1) (b) de la Loi sur la protection de l’information : Commet une infraction quiconque accomplit un acte en vue ou en préparation de la perpétration d’une infraction prévue à l’un des paragraphes 16 (1) ou (2), 17 (1), 19 (1) ou 20 (1), notamment :

b) obtient ou retient des renseignements ou en obtient l’accès.  

e) possède un instrument, du matériel ou un logiciel utile pour la dissimulation de la teneur de renseignements ou la communication, l’obtention ou la détention secrètes de renseignements.  

Article 122 du Code criminel du Canada : Est coupable d’un acte criminel et passible d’un emprisonnement maximal de cinq ans tout fonctionnaire qui, relativement aux fonctions de sa charge, commet une fraude ou un abus de confiance, que la fraude ou l’abus de confiance constitue ou non une infraction s’il est commis à l’égard d’un particulier.  

Article 342.1 (1) du Code criminel du Canada : Est coupable soit d’un acte criminel passible d’un emprisonnement maximal de dix ans, soit d’une infraction punissable sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire quiconque, sans justification ou excuse légitime, fabrique, répare, achète, vend, exporte du Canada, importe au Canada ou a en sa possession quelque instrument, dispositif, appareil, matière ou chose qu’il sait utilisé, modifié ou destiné à l’une ou l’autre des fins suivantes :

a) copier des données relatives à une carte de crédit devant servir à la commission d’une infraction visée au paragraphe 342 (3) ;

b) falsifier des cartes de crédit ou en fabriquer des fausses.  

« Les accusations sont liées à des activités qui auraient eu lieu pendant la durée de son emploi à la GRC », spécifie encore le corps policier fédéral qui n’en rajoute pas plus.  

Un personne reconnue coupable du chef à l’article 14 de la Loi sur la protection de l’information encourt une peine de 14 ans d’emprisonnement.  

Selon la page LinkedIn de M.  Ortis, ce dernier est à l’emploi du gouvernement du Canada depuis 12 ans. Il a étudié en économie, administration et relations internationales dans des universités en Colombie-Britannique.  

Une source policière a expliqué à La Presse ces derniers mois qu’au sein des Équipes intégrées de la sécurité nationale (EISN) pilotées par la GRC, plusieurs policiers autrefois affectés aux enquêtes antiterroristes ont été réaffectés à des dossiers qui concernent l’ingérence ou l’espionnage au profit de puissances étrangères. Les actions hostiles de pays étrangers constituent une préoccupation croissante pour la direction de la police fédérale.

« Les Canadiens peuvent continuer à faire confiance à nos agences de sécurité et de renseignement pour protéger notre sécurité et nos droits », a déclaré le ministre sortant de la Sécurité publique Ralph Goodale, sans vouloir commenter davantage parce que l’affaire est maintenant devant les tribunaux.

Son chef, Justin Trudeau, a quant à lui dit prendre l’affaire « très au sérieux » sans commenter davantage. 

« Je suis préoccupé par l’arrestation d’un agent du renseignement de la GRC qui a divulgué des informations sur la sécurité nationale. C’est un rappel de la menace posée par les acteurs étrangers. En tant que PM, j’agirai comme il se doit lorsqu’une menace est identifiée. », a pour sa part écrit sur Twitter le chef du Parti conservateur du Canada et candidat au poste de premier ministre, Andrew Scheer.

- Avec la collaboration de Joël-Denis Bellavance

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