Un prédateur sexuel détenu pendant 13 ans aux États-Unis pour de sordides crimes commis avec son frère jumeau a tout tenté cette semaine pour faire reporter son procès pour agression sexuelle. Mais hier, la victime présumée de Georgi Spitzer a finalement pu briser le silence, six ans après avoir cru que son dernier jour était arrivé.

« J’étais absolument sûre qu’il allait me tuer, me découper en morceaux, envelopper mon corps dans une pellicule de plastique, puis l’envoyer morceau par morceau à mon fils », a témoigné avec aplomb la plaignante, hier au palais de justice de Montréal. Une ordonnance de la cour protège son identité.

La femme, nouvellement arrivée au pays, a rencontré l’accusé au centre-ville de Montréal en 2012. Trois ans plus tôt, Georgi Spitzer avait été expulsé des États-Unis après avoir été condamné à 60 ans de prison pour une série d’agressions sexuelles sur cinq femmes entre 1993 et 1996. Sa peine avait toutefois été réduite en appel.

Le Montréalais de 62 ans et son frère jumeau Stefan se faisaient passer pour des producteurs de cinéma auprès de jeunes femmes. Ils droguaient leurs victimes et filmaient ensuite leurs agressions sexuelles. Un sordide stratagème qui leur a voulu le surnom de « Roofie Romeos » [les Roméo de la drogue du viol] par la presse américaine.

PHOTO ARCHIVES LA PRESSE

Georgi Spitzer

Fin janvier 2013, la plaignante se rend à l’appartement de l’accusé. En sortant de la douche, elle décide de mettre fin à leur relation. « Tu sais quoi ? C’est fini. Je veux m’en aller, je m’en vais maintenant », lui lance-t-elle. « Ayons du sexe », réplique Georgi Spitzer.

La plaignante se dirige vers la sortie, mais l’accusé lui bloque le passage et la lance sur le lit. Elle se débat avec vigueur, mais son agresseur est trop fort. « Il m’a bloqué la bouche avec sa main. J’arrivais à peine à respirer. Je me battais pour ma vie. Ma seule chance de survie était d’atteindre ses yeux », a-t-elle raconté.

Après l’agression, la victime menace de le dénoncer aux autorités. Mais ce dernier la convainc de se taire. « Tu vas avoir peur de chaque coin d’ombre », menace-t-il. « J’ai privilégié ma sécurité », témoigne-t-elle.

« Je n’ai jamais violé cette femme. Jamais », a soutenu Georgi Spitzer, seul témoin pour sa défense.

Multiples reports

Le procès de Georgi Spitzer était sur le point de s’amorcer lundi, lorsque le juge Christian Tremblay a rejeté une nouvelle demande de report pour raisons de santé. Mais l’accusé s’est soudainement effondré en évoquant un problème au cœur. « Appelez les secours, mais je ne suis pas très inquiet », a déclaré le juge.

Georgi Spitzer a ensuite passé la nuit à l’hôpital après avoir insisté pour subir d’autres tests de santé, au grand dam du juge. Puis, hier matin, l’accusé est arrivé au palais de justice en insultant les journalistes. Son avocate, Me Ana-Maria Mocanu, a réclamé au juge une évaluation de l’état mental de son client.

« Aujourd’hui, je ne me sens pas bien, j’ai de l’anxiété, un manque de concentration », a témoigné l’accusé, en évoquant un choc post-traumatique. « La preuve est tout à fait claire. M. Spitzer ne veut pas que sa cause procède aujourd’hui », a plaidé le procureur de la Couronne Me Bruno Ménard.

Le juge rendra sa décision en février prochain.