(Saint-Jérôme) La poursuite a réclamé lundi une peine «sévère et exemplaire» de 12 ans de pénitencier contre le «dangereux et dérangé» pilote Normand Dubé pour avoir intimidé trois fonctionnaires et fait incendier leur résidence pour se venger à la suite de banals litiges administratifs. Une peine bien plus sévère que les 18 mois de détention réclamée par la défense.

La Couronne demande au juge Gilles Garneau d’envoyer un message «dissuasif […] d’exemplarité avec un E majuscule». «M. Dubé a commandé trois incendies criminels sur une période de 11 mois chez des fonctionnaires avec qui il était en conflit pour assouvir une vengeance impulsive et incompréhensible. L’accusé a franchi une ligne qui doit être dénoncée», a plaidé le procureur de la Couronne, Me Steve Baribeau, lundi au palais de justice de Saint-Jérôme.

Normand Dubé a déjà été condamné l’an dernier à sept ans de pénitencier pour son attaque spectaculaire sur des lignes à haute tension d’Hydro-Québec en décembre 2014. Son crime motivé par la vengeance a causé pour 30 millions de dollars en dommages à la société d’État et a bien failli plonger le Québec dans le noir en plein hiver. Il est en appel du verdict dans ce dossier, mais n’a pas contesté la peine imposée.  

L’homme de 57 ans a embauché il y a quelques années des hommes de main pour incendier les résidences de trois fonctionnaires avec des cocktails Molotov. Motivé par la vengeance selon le juge, Normand Dubé en voulait à ces fonctionnaires pour des banalités, comme une contravention de 2000 $ pour l’importation d’un hélicoptère ou la contestation de son rôle d’évaluation foncière.

Ainsi, une surintendante de l’Agence des services frontaliers du Canada, le directeur du service d’urbanisme de Sainte-Anne-des-Plaines et une employée de cette municipalité ont tous été la cible de Normand Dubé entre 2011 et 2014. Personne n’a heureusement été blessé dans ces incendies criminels, même si des personnes se trouvaient dans les résidences.

«En harcelant pendant des années des gens qui faisaient leur travail et en faisant mettre le feu à leur résidence, Normand Dubé a agi par pure méchanceté et avec une insouciance totalement déréglée pour la vie humaine. Juste pour faire du mal. Les gestes posés sont choquants et révoltants quand on s’attaque à des résidences de fonctionnaires parce qu’on n’est pas d’accord avec une décision», a plaidé Me Baribeau.

La défense a brossé un portrait bien différent de Normand Dubé et de ses crimes, rejetant du même souffle la «démonisation» de l’accusé par la Couronne. L’avocat de la défense Me Maxime Chevalier a fait valoir que personne n’avait été blessé dans les incendies et que ces derniers n’avaient pas causé d’importants dommages matériels. De plus, Normand Dubé n’avait aucun antécédent judiciaire au moment de commettre les crimes et son risque de récidive est faible à court ou à moyen terme selon un rapport présentenciel.

Pourtant, la peine demandée par la Couronne s’apparente à des peines imposées dans des cas d’homicide involontaire, a plaidé Me Chevalier. Selon sa revue de la jurisprudence en matière d’incendie criminel, une peine de moins de deux ans d’emprisonnement serait plus appropriée. Toutefois, en tenant compte de la peine déjà imposée dans le dossier d’Hydro-Québec, la défense réclame l’ajout de 18 mois de détention, pour un total de huit ans et demi pour les deux causes.

Le juge Garneau rendra sa décision le 16 septembre prochain.